Yves Michel Fotso: «Je me battrai jusqu'au bout pour ne pas me laisser dépouiller»
YAOUNDE - 09 MARS 2015
© Onana N. Aaron | Cameroon-Info.Net
Dans une interview accordée à Jeune Afrique en kiosque cette semaine, Yves Michel Fotso parle des conditions de sa détention au secrétariat d’Etat à la défense (Sed) à Yaoundé, quatre ans après son interpellation (1er décembre 2010) dans son domicile à Douala.
Yves Michel Fotso a entamé sa cinquième année de détention. Il est poursuivi dans deux affaires, notamment celle de l’achat inabouti d’un avion présidentiel et la liquidation de la Cameroon Airlines. Condamné à vingt-et-cinq ans de prison le 22 septembre 2012 dans l’affaire de l’avion présidentiel, l’héritier du milliardaire Fotso Victor dénonce ses conditions de détention. « Je suis enfermé seul dès 21h 30, et ma porte n'est rouverte que le matin à 8 heures. Je suis donc isolé de tout contact pendant près de onze heures par jour. Mon quotidien est très difficile. Je le passe essentiellement à lire les nombreux dossiers qui m'accablent. Mais je ne baisse pas les bras. Je me battrai jusqu'au bout pour ne pas me laisser dépouiller, pour faire éclater la vérité et être enfin innocenté ».
A propos du détournement évoqué dans cette affaire qui l’a trainé dernière les barreaux ensemble avec Marafa Hamidou Yaya, Jean-Marie Atangana Mebara et autres, Yves-Michel Fotso continue de clamer son innocence : « l’affaire est un simple différent commercial entre un client, l’Etat du Cameroun, et son fournisseur, la société GIA International, cette dernière étant chargée d’acquérir l’avion auprès du fabriquant Boeing [elle a fait faillite en 2001 et l’appareil n’a pas été livré]. En tant que patron de Cameroon Airlines, je n’étais ni client ni fournisseur, mais un simple facilitateur », explique-t-il. Selon l’ex-DG ce différend a par ailleurs été réglé dès qeptembre 2006, à son insu, avec la signature d’un accord transactionnel entre GIA International et l’Etat du Cameroun, sous l’égide du tribunal des faillites de l’Etat de l’Oregon, aux Etats-Unis. « L’Etat a même été indemnisé. Mais les juges qui m’ont condamné refusent obstinément d’en tenir compte » déplore-t-il.
Acharnement judiciaire et complot
Confiné dans sa cellule, Yves Michel Fotso crie à un complot et espère. « Il existe une forte probabilité que la Cour suprême casse le verdict du Tribunal de grande instance de Yaoundé. Mais je ne suis pas naïf : mes bourreaux feront tout pour me maintenir en prison », se plaint-il. Il en veut pour preuve le fait que s'agissant de l'affaire de l'avion présidentiel, Julienne Koumba, ancienne directrice générale adjointe de la CBC, n'a pas dit la vérité sur quatre points cruciaux. Idem pour plusieurs autres témoins de l'accusation. Une situation qui arrangerait certaine pontes du régime. « Au fil du temps, certaines personnes haut placées dans la hiérarchie de l'Etat ont décidé de profiter de la situation pour faire main basse sur mes biens », explique Yves Fotso.
Une brouille entre père et fils
Dès son incarcération une certaine opinion a laissé entendre que pour montrer tout son soutien à son fils, Victor Fotso proposait de rembourser les sommes supposées détournées pour que ce dernier recouvre la liberté. Mais deux ans après il n’en est toujours rien. « Il s'est précipité à la prison dès le lendemain et m'a assuré de sa détermination à obtenir ma libération dans les plus brefs délais. Pour lui, ce qu'on me reprochait n'avait rien à voir avec l'éducation qu'il m'avait inculquée. De plus, il n'avait rien à redire sur ma gestion de ses entreprises, explique Yves Michel avant d’ajouter, malheureusement, quelques aigrefins sont parvenus à nous brouiller. En effet, comme je l'ai appris à mes dépens, au sein de ma propre famille, nombreux étaient ceux qui espéraient ma disparition. Il faut préciser que mon père est polygame et père de nombreux enfants. Certains de mes jeunes frères et sœurs qui travaillaient déjà à des postes de direction dans certaines de nos sociétés n'ont pas hésité à saisir l'opportunité de ma détention pour essayer de m'évincer définitivement ».
Aujourd’hui, selon Yves Michel, son père n’a plus la main mise sur ses affaires, ce qui complique davantage le soutien financier que ce dernier pourrait lui apporter. Il tire ses forces dans le soutien que lui apporte sa femme qu’il a épousée après son incarcération, le 27 mai 2011, et ses enfants. « Je bataille sans relâche grâce au soutien de ma femme, de mes enfants et de quelques amis qui me sont heureusement restés fidèles. S'il en avait été autrement, j'aurai déjà perdu la raison », affirme-t-il.
Onana N. Aaron, Cameroon-Info.Net