Université de yaoundé II : Les membres de l’Addec expulsés du campus de Soa - André Benang : « Le recteur nous a garanti qu’il allait utiliser la violence »
L’association de défense des droits des étudiants voulait poursuivre les activités marquant la 4ème édition de la semaine de l’étudiant. A l’esplanade de l’amphi 700 de l’université de Yaoundé II Soa, devant la salle des actes, il est environ 11h30 ce mercredi 21 avril.
André Benang, vice président de l’Association pour la défense des droits des étudiants du Cameroun (Addec), tient un discours. Dans sa main gauche un papier de format A4, dans la main droite, un haut parleur. En face de lui des adeptes de l’Addec et quelques étudiants curieux écoutent plus ou moins attentivement. Trente minutes après, Jean Tabi Manga, le recteur de l’Université de Yaoundé II, surgit. Il est accompagné de six agents en service au rectorat. Il tente en vain d’arracher le haut parleur que tient André Benang. « Je vous demande de quitter ces lieux, vous êtes en train de semer le désordre au sein du campus et, en plus, vous n’êtes pas autorisé à manifester ici, je crois que vous avez reçu ma correspondance », lance, irrité, Jean Tabi Manga aux membres de l’Addec.
Face à leur refus de partir, le recteur de l’Université de Soa promet d’employer des méthodes plus dissuasives. Cinq minutes après, une dizaine de vigiles, matraques et décharges électriques à la main, foncent vers André Benang et ses adeptes.Ces derniers vont être copieusement molestés, décharges électriques et de gaz lacrymogènes à l’appui.
Sous les coups, Cyril Sapè, secrétaire aux affaires académiques de l’Addec, s’écroule. Pris de peur, les vigiles disparaissent. Cyril Sapè gît au sol, les yeux retournés, inconscient.
Il ne peut bouger. Une foule d’étudiants entoure l’étudiant évanoui. Malgré l’opposition de l’Addec, Cyril Sapè sera finalement conduit au Centre-médico-social de l’université. Deux de ses camarades l’accompagnent. Entre temps, les membres de l’Addec et la foule d’étudiants se dirigent vers le rectorat en chantant : « Etudiant, Lumière! Etudiant, lumière ».
Les vigiles les font sortir du campus. Autour de 14 heures, Cyril Sapè sort du centre médico-social, soutenu par deux de ses camarades. «Il a reçu deux perfusions et ça va mieux. Nous retournons au siège de l’Addec et ne comptons pas nous arrêter là », confie, déterminé, André Benang, Vice président de l’Addec. Nos démarches pour rencontrer le recteur seront sans succès. « Le recteur est fâché, le ministre de l’Enseignement supérieur arrive dans quelques minutes (pour assister au déroulement des jeux universitaires, ndlr). Jean Tabi Manga ne peut pas vous parler car il faut bien qu’il gère cette tension », répond son garde du corps au reporter du Jour.
Cet incident survient dans la foulée des activités marquant la 4ème édition de la semaine de l’étudiant qui a débuté le lundi 19 avril 2010 et qui s’achève le 25 avril prochain.
Rosine Nana Motio
André Benang : « Le recteur nous a garanti qu’il allait utiliser la violence »
Le vice-président de l’Addec s’exprime sur leur affrontement avec les forces de l’ordre et donne les raisons de leur manifestation.
Quel discours vous a tenu Jean Tabi Manga quand il est venu vers vous ?
Le recteur est venu nous sommer de partir et nous a garanti qu’il allait utiliser la violence. Alors que nous sommes venus pour vulgariser et promulguer les droits de l’homme, et donc les droits de l’homme à l’université. Nous œuvrons pour l’application du droit des étudiants dans les universités. Devant plus d’une centaine d’étudiants, avec l’appui du recteur, ces droits ont été violés alors que nous manifestions sans violence.
Sur quoi porte votre manifestation ?
Notre manifestation concerne juste des débats entre étudiants sur les droits de l’Homme. Je ne sais pas pourquoi certains nous prennent à partie. Les débats que nous voulons tenir sont reconnus dans les textes universitaires. Contre la non-violence que nous promouvons, le recteur a envoyé les forces de l’ordre sur nous en nous promettant brimade et violation de nos droits.
Pourquoi avoir choisi le site des Jeux universitaires pour manifester ?
Parce que pendant les jeux, nous avons la possibilité de rencontrer le maximum d’étudiants possible.
Il semble que votre demande de manifestation avait été rejetée…
La lettre que le recteur nous a adressée disait que pour des questions de convivialité, nous n’avions pas le droit de tenir nos activités au sein du campus pendant les jeux. Nous lui avons écrit en lui disant que nous ne tenions pas compte de sa suggestion, puisque nos activités contribuent à cette convivialité. Il n’y a donc aucun antagonisme entre les Jeux universitaires et ce que nous avons l’intention de faire. La loi nous autorise à manifester et à nous exprimer dès lors que nous ne troublons pas l’ordre public.
Après votre affrontement avec les forces de l’ordre, quel est l’ampleur des dégâts?
Nous avons un camarade qui a été bastonné et qui est resté inconscient pendant plus de 30 mn avant que l’ambulance ne vienne de manière arrogante le ramasser. Nous ne savons pas ce qu’il deviendra, mais nous craignons beaucoup.
Que comptez-vous faire ?
Nous n’avons pas l’intention de laisser le recteur continuer dans sa mécréance. Nous allons faire des sit-in jusqu’à ce qu’il vienne vers nous pour s’expliquer. Il faut qu’il nous dise ce qui l’a poussé à envoyer les forces de l’ordre violenter nos camarades.
Ateba Biwolé