Tribunes Présidentielles: Ces baraques qui défient Tsimi Evouna

Yaoundé, 18 Avril 2013
© Nelson Ze Evina | Le Soir

Les préparatifs de la 41ème fête nationale de l'unité battent le plein pour le 20 mai prochain. A Yaoundé, Paul Biya a coutume de présider personnellement le défilé civil et militaire au Boulevard éponyme.

II y a plusieurs décennies, la place des fêtes de Ngoa-Ekelle est transférée au Boulevard du 20 mai. Celui-ci est incontestablement le plus prestigieux de Yaoundé. Une série de baraques jonche l'itinéraire. Tout au long des années écoulées, l'on a passé le temps à attribuer le manque d'intérêt de la Présidence de la République et la Communauté Urbaine de Yaoundé à la crise économique qui a traversé le pays, empêchant de facto l'Etat à engager des dépenses de prestige. Malheureusement aujourd'hui, la réalité démontre le contraire. Les autorités claironnent dans le discours politique que le Cameroun a retrouvé le chemin de la croissance. Par conséquent, le pays a engagé une pléthore de projets structurants dans une logique d'émergence à l'horizon 2035. Dans la mouvance des retombées colossales liées à l'annulation de la dette extérieure suite à l'atteinte du point d'achèvement-PPTE, les métropoles de Yaoundé et Douala émargent grassement dans les caisses du C2D. C'est un financement français destiné à la réalisation des travaux d'aménagement et de modernisation de ces villes. Un temps record aura pleinement suffi pour découvrir Yaoundé avec un nouveau visage, totalement transformé par le Délégué du gouvernement, Tsimi Evouna Gilbert. Contrairement à la cadence des travaux marquée par les déguerpissements parfois intempestifs et spectaculaires. A défaut d'être pathétiques avec un nombre très impressionnant de sans abris, l'élan et le zèle de Tsimi Evouna s'évanouissent vaporeusement devant les baraques qui servent de tribunes présidentielles. Le Boulevard du 20 mai est avant tout, un endroit riche de symboles, un lieu de communion, qui sert de vitrine à la capitale politique du Cameroun. Pour preuve, le plan d'urbanisation de la ville ne tolère guère la construction sous aucun prétexte, des édifices aux normes et standards approximatifs sur le site. Il suffit de dénombrer pour s'en convaincre, les joyaux architecturaux qui colonisent cet espace notamment l'immeuble CAMTEL, la CAA (en chantier), le Hilton Hôtel, les Services du PM, l'immeuble ministériel N°2, Campost, SOB et le Crédit Foncier. Par ailleurs, le prestigieux bâtiment "le Djeuga" vient d'être mis en service.

Il présente une fière allure. D'autres types de construction autorisés sont encore en chantier ou tout simplement en projet. C'est le cas du projet de construction de l'immeuble siège de l'Agence de Régulation des Télécommunications (ART) en face de Hilton Hôtel. La question qui ne cesse de tarauder les esprits est justement le paradoxe qui exprime la présence des taudis dans le même périmètre, sans que cela révolte Tsimi Evouna. C'est dans cet univers dégradant et surtout désagréable que Paul Biya préside le défilé en présence bien entendu des membres du gouvernement et les invités de marque. Quel contraste dénigrant dans un sanctuaire qui se veut de prestige! C'est également dans ces cabanes faites en bois de valeur dégradée que se déroulent toutes les autres parades à l'instar de la fête du travail, la journée internationale de la Femme et la fête nationale de la jeunesse.


LE DÉLÉGUÉ DU GOUVERNEMENT TENU EN RESPECT

Pourquoi une cécité subite de la part de Tsimi Evouna sur cet endroit à la fois humiliant et répugnant et qui de surcroît n'honore en rien la beauté de la capitale? Que fait le Cabinet Civil pour doter le Boulevard du 20 mai des tribunes à la hauteur du Cameroun? La réponse à cette question est simple malgré le halo de mystères qui l'entoure dès lors que certains naïfs tentent d'attribuer le monopole du marché depuis belle lurette par le Génie Militaire, à un ouvrage stratégique. Car combien de bâtiments logent pourtant des unités de Défense qui sont des édifices appartenant aux particuliers et bâtis par le Génie Civil? Et que dire de la Présidence et des résidences, présidentielles construites par des entreprises civiles? La vérité pour exorciser ce grossier mensonge est que les travaux de réfection et de décoration des tribunes présidentielles demeurent la chasse gardée des officiers généraux depuis l'accession de Paul Biya au pouvoir. Le marché en question est cyclique. Une entente permettrait la rotation pour taire la guerre ouverte qui opposerait les officiers généraux en service à Yaoundé avec ceux exerçant hors des services centraux. Actuellement, le marché de rafistolage des tribunes reviendrait de droit au Commandant du train du défilé militaire. Fort de cette révélation, les incursions de Tsimi Evouna sont formellement interdites, y compris le cabinet civil. Le projet de délocalisation desdites tribunes vers le quartier Mfandena dans le cadre de la célébration du cinquantenaire de l'indépendance initié par Martin Belinga Eboutou aurait été farouchement combattu par les autorités militaires. Celles-ci sentaient déjà la manne leur filer entre les doigts. Ledit projet a purement et simplement été archive. La réalisation d'un projet similaire ferait perdre ou diminuer la cagnotte. Voilà la raison pour laquelle, le Génie Militaire évite d'utiliser les matériaux durables sur les ouvrages de la place des cérémonies du Boulevard du 20 mai. Que de dépenses dispendieuses pour de simples ouvrages définitivement provisoires! La dénaturation des symboles et des institutions n'est pas en reste. Elle a même franchi le Rubicon. Car en a-t-on besoin de préciser que tous les emblèmes représentés sur la façade principale des baraques font ostentatoirement l'apologie des différents corps d'Armées et la Police uniquement. Ce n'est que depuis 2010 qu'on peut constater un petit rajout avec le logo du cinquantenaire. Le concept de paix et d'Unité nationales se limiterait-il aux seules forces de Défense pour qu'elles s'en prévalent si arrogamment l'exclusivité? C'est la raison pour laquelle, ce dossier échappe au contrôle du Délégué du gouvernement. Il est la propriété privée de la Défense dans un Etat où tout citoyen est un orfèvre à part entière de la paix et de l'unité nationales.


22/04/2013
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