Tribunal Criminel Spécial: Iya Mohammed plaide non coupable. L’affaire renvoyée au 10 septembre
DOUALA - 27 AOUT 2014
© Alain NOAH AWANA | Le Messager
L’ex-Dg de la Sodecoton est accusé de détournement de 11 milliards Fcfa. L’affaire renvoyée au 10 septembre
© Alain NOAH AWANA | Le Messager
L’ex-Dg de la Sodecoton est accusé de détournement de 11 milliards Fcfa. L’affaire renvoyée au 10 septembre
Opération Epervier: Iya Mohammed détendu devant la barre
L’ex-Dg de la Sodecoton et ses coaccusés se sont entendu lire les charges retenues contre eux dans l’affaire qui les oppose à l’Etat du Cameroun.
Tribunal criminel spécial (Tcs) de Yaoundé, mardi 26 août 2014. Dans une des salles d’audience située au premier étage, se trouve environ trente personnes. Globalement, elles discutent de l’actualité, ou se donnent des accolades en signe de retrouvailles. Petit à petit, la salle se remplit. La foule est cosmopolite. Parents et amis des personnes dont le procès s’ouvre dans quelques minutes, journalistes venus couvrir cette grande première, mais aussi des agents de renseignement reconnaissables à leur regard inquisiteur sur tout ce qui se passe ici. A 10h25 sonnées, l’homme que la plupart des personnes sont venues voir fait son entrée dans la salle. Sanglé dans une superbe gandoura brodée de couleur bleu-ciel, chéchia blanche sur la tête, le visage frais, Iya Mohammed est accompagné d’un de ses coaccusés, Lucien Fotso. L’ex-directeur général de la Société de développement du coton (Sodecoton) jette un regard circulaire sur l’assistance, avant de s’asseoir sur le premier banc, du côté de l’espace réservé aux avocats de la défense.
De temps en temps, il se lève pour saluer et converser avec des proches venus lui marquer leur soutien. De temps en temps aussi, il sort de la pièce, mais toujours flanqué d’un de ses gardes. «Je vais bien, malgré les circonstances», lance-t-il à une avocate d’un air détendu. Seuls ses yeux un peu rougis témoignent de ce que l’homme est bien conscient de la situation délicate dans laquelle il se trouve. Et ceux qui ne le savent pas vont vite être au fait avec l’entrée des trois juges chargés de l’affaire Etat du Cameroun contre Iya Mohammed et compagnie.
Après quelques formalités d’usage, Iya Mohammed, Lucien Fotso, Mahamat Karagama, Pierre Kaptene, Jérôme Minlend, Clavier Henri et Christophe Mbaiougam sont appelés par le juge au banc des accusés. Seuls les quatre premiers sont présents. Le juge Yap, président de la collégialité, fait lever Iya Mohammed, principal accusé dans l’affaire. Debout, dégnement cet homme âgé de 64 ans écoute le greffier lui lire toutes les charges retenues contre lui.
«Non coupable»
Mais, à l’observation, il n’a pas l’habitude des tribunaux camerounais. Car, une fois cette lecture terminée, l’homme fort de Garoua se rassoit. Et le juge de lui indiquer qu’il doit se remettre debout. «On voit bien que vous n’avez pas l’habitude du tribunal, M. Iya Mohammed», ironise le magistrat. Avant d’ajouter, pince-sans-rire, qu’il est honoré de se retrouver en face d’un homme qu’il n’avait vu jusque-là qu’à la télévision. Naturellement, Iya Mohammed a décidé de plaider « Non coupable ». On peut passer aux autres accusés présents. Ces derniers vont également tous indiquer aux juges qu’ils plaident non coupable au cours de ce procès qui démarre avec la première audience. Comme c’est le cas en pareilles circonstances, l’audience ne durera pas.
Le procureur général, invité à prendre la parole, informe qu’il indiquera la liste des témoins de la partie civile avant la prochaine audience. Il est suivi dans cette optique par Me Sama, bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun, qui officie en tant qu’avocat de l’Etat représenté par la Sodecoton. Tous les avocats de la défense n’y trouvent aucun inconvénient, en dehors de Me Tchoungang, ancien bâtonnier, qui souhaite que les poursuites contre son client, Jérôme Minlend, soient tout simplement abandonnées parce que ce dernier avait déjà remboursé la somme que lui imputait les pouvoirs publics (voir encadré).
Renvoi au 10 septembre
Après avoir pris note de cette réserve, les juges consultent leurs calendriers, avant de fixer la date de la prochaine audience au 10 septembre 2014, «pour production des listes des témoins». Celle de ce mardi est aussitôt levée. Avant de partir du Tcs, Iya Mohammed va longuement se concerter avec ses avocats, principalement Me Eugène Balemaken. L’ambiance détendue dans laquelle s’est déroulée sa première apparition au Tribunal criminel spécial semble l’avoir un peu requinqué. Souriant, il serre la main de ses proches, avant de se retirer dans un couloir avec son avocat. Ce n’est qu’une vingtaine de minutes plus tard qu’il sortira de l’immeuble pour s’engouffrer dans un minibus blanc de la prison centrale de Yaoundé, sous les flashs des caméras et le regard de nombreux curieux maintenus à l’extérieur du portail. Pour un autre rendez-vous dans deux semaines…
En rappel, Iya Mohammed et ses coaccusés sont poursuivis pour détournement de deniers publics en coaction et complicité de détournement de deniers publics. On reproche principalement à l’ex-directeur général de la Sodecoton d’avoir perçu indûment des avantages salariaux d’un montant de plus de 51 millions Fcfa ; d’avoir fait perdre à l’entreprise environ 6 milliards Fcfa en huiles végétales, tourteaux, et ristournes ; d’avoir soutenu des associations sportives du Septentrion à hauteur de 4,7 milliards Fcfa sans l’avis du conseil d’administration ; d’avoir également payé des prestations fictives pour 350 millions Fcfa ; et enfin, d’avoir payé une indemnité de 7 millions sans raison.
Alain NOAH AWANA
Me Charles Tchoungang: «mon client doit être retiré de l’affaire»
Le conseil de l’un des coaccusés dans ce qu’on va désormais appeler « Affaire Iya Mohammed » n’a pas manqué, lors de cette première audience, de signifier que son client n’avait rien à voir dans ce procès qui oppose l’ex-directeur général de la Sodecoton, et certains de ses anciens collaborateurs, à l’Etat du Cameroun. «Monsieur le président du tribunal, il faudrait qu’avant la prochaine audience, certains détails soient réglés. Nous n’avons rien à faire dans cette affaire», a d’emblée indiqué l’ancien bâtonnier de l’ordre des avocats du Cameroun. Me Charles Tchoungang explique alors que son client, mis en débet par le Conseil de discipline budgétaire et financière du Contrôle supérieur de l’Etat (Consupe), avait déjà payé les 208 millions Fcfa qui lui avaient été imputés au cours d’une mission de cette institution chargée de contrôler les comptes de gestion des organismes étatiques au Cameroun.
Pour aller plus loin, l’avocat de Jérôme Minlend, qui comparaît libre, a réitéré au Messager que son client avait déjà payé la somme qui lui avait été imputée par le Consupe bien avant l’ouverture de l’instruction. Pour cette raison, cet avocat chevronné estime que «mon client doit être retiré de cette affaire». Il rassure cependant que Jérôme Minlend sera là lors de la prochaine audience le 10 septembre 2014, mais il sera surtout question de soumettre les documents justificatifs qui prouvent que le commissaire aux comptes n’a pas manœuvré pour s’octroyer l’argent de l’Etat, via la Sodecoton. En fait, selon les explications, le coaccusé avait fait des prestations auprès de l’entreprise, qui avaient été payées en bonne et due forme. Mais, l’accusation estime que la facture de 350 millions Fcfa constituant le paiement des prestations – encore que ce montant présenté par le parquet est contesté par la défense – ait été un moyen de détournement. Quoi qu’il en soit, le juge a demandé au Parquet de revoir ce cas précis en vue de faire justice.
A.N.A.
L’ex-Dg de la Sodecoton et ses coaccusés se sont entendu lire les charges retenues contre eux dans l’affaire qui les oppose à l’Etat du Cameroun.
Tribunal criminel spécial (Tcs) de Yaoundé, mardi 26 août 2014. Dans une des salles d’audience située au premier étage, se trouve environ trente personnes. Globalement, elles discutent de l’actualité, ou se donnent des accolades en signe de retrouvailles. Petit à petit, la salle se remplit. La foule est cosmopolite. Parents et amis des personnes dont le procès s’ouvre dans quelques minutes, journalistes venus couvrir cette grande première, mais aussi des agents de renseignement reconnaissables à leur regard inquisiteur sur tout ce qui se passe ici. A 10h25 sonnées, l’homme que la plupart des personnes sont venues voir fait son entrée dans la salle. Sanglé dans une superbe gandoura brodée de couleur bleu-ciel, chéchia blanche sur la tête, le visage frais, Iya Mohammed est accompagné d’un de ses coaccusés, Lucien Fotso. L’ex-directeur général de la Société de développement du coton (Sodecoton) jette un regard circulaire sur l’assistance, avant de s’asseoir sur le premier banc, du côté de l’espace réservé aux avocats de la défense.
De temps en temps, il se lève pour saluer et converser avec des proches venus lui marquer leur soutien. De temps en temps aussi, il sort de la pièce, mais toujours flanqué d’un de ses gardes. «Je vais bien, malgré les circonstances», lance-t-il à une avocate d’un air détendu. Seuls ses yeux un peu rougis témoignent de ce que l’homme est bien conscient de la situation délicate dans laquelle il se trouve. Et ceux qui ne le savent pas vont vite être au fait avec l’entrée des trois juges chargés de l’affaire Etat du Cameroun contre Iya Mohammed et compagnie.
Après quelques formalités d’usage, Iya Mohammed, Lucien Fotso, Mahamat Karagama, Pierre Kaptene, Jérôme Minlend, Clavier Henri et Christophe Mbaiougam sont appelés par le juge au banc des accusés. Seuls les quatre premiers sont présents. Le juge Yap, président de la collégialité, fait lever Iya Mohammed, principal accusé dans l’affaire. Debout, dégnement cet homme âgé de 64 ans écoute le greffier lui lire toutes les charges retenues contre lui.
«Non coupable»
Mais, à l’observation, il n’a pas l’habitude des tribunaux camerounais. Car, une fois cette lecture terminée, l’homme fort de Garoua se rassoit. Et le juge de lui indiquer qu’il doit se remettre debout. «On voit bien que vous n’avez pas l’habitude du tribunal, M. Iya Mohammed», ironise le magistrat. Avant d’ajouter, pince-sans-rire, qu’il est honoré de se retrouver en face d’un homme qu’il n’avait vu jusque-là qu’à la télévision. Naturellement, Iya Mohammed a décidé de plaider « Non coupable ». On peut passer aux autres accusés présents. Ces derniers vont également tous indiquer aux juges qu’ils plaident non coupable au cours de ce procès qui démarre avec la première audience. Comme c’est le cas en pareilles circonstances, l’audience ne durera pas.
Le procureur général, invité à prendre la parole, informe qu’il indiquera la liste des témoins de la partie civile avant la prochaine audience. Il est suivi dans cette optique par Me Sama, bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun, qui officie en tant qu’avocat de l’Etat représenté par la Sodecoton. Tous les avocats de la défense n’y trouvent aucun inconvénient, en dehors de Me Tchoungang, ancien bâtonnier, qui souhaite que les poursuites contre son client, Jérôme Minlend, soient tout simplement abandonnées parce que ce dernier avait déjà remboursé la somme que lui imputait les pouvoirs publics (voir encadré).
Renvoi au 10 septembre
Après avoir pris note de cette réserve, les juges consultent leurs calendriers, avant de fixer la date de la prochaine audience au 10 septembre 2014, «pour production des listes des témoins». Celle de ce mardi est aussitôt levée. Avant de partir du Tcs, Iya Mohammed va longuement se concerter avec ses avocats, principalement Me Eugène Balemaken. L’ambiance détendue dans laquelle s’est déroulée sa première apparition au Tribunal criminel spécial semble l’avoir un peu requinqué. Souriant, il serre la main de ses proches, avant de se retirer dans un couloir avec son avocat. Ce n’est qu’une vingtaine de minutes plus tard qu’il sortira de l’immeuble pour s’engouffrer dans un minibus blanc de la prison centrale de Yaoundé, sous les flashs des caméras et le regard de nombreux curieux maintenus à l’extérieur du portail. Pour un autre rendez-vous dans deux semaines…
En rappel, Iya Mohammed et ses coaccusés sont poursuivis pour détournement de deniers publics en coaction et complicité de détournement de deniers publics. On reproche principalement à l’ex-directeur général de la Sodecoton d’avoir perçu indûment des avantages salariaux d’un montant de plus de 51 millions Fcfa ; d’avoir fait perdre à l’entreprise environ 6 milliards Fcfa en huiles végétales, tourteaux, et ristournes ; d’avoir soutenu des associations sportives du Septentrion à hauteur de 4,7 milliards Fcfa sans l’avis du conseil d’administration ; d’avoir également payé des prestations fictives pour 350 millions Fcfa ; et enfin, d’avoir payé une indemnité de 7 millions sans raison.
Alain NOAH AWANA
Me Charles Tchoungang: «mon client doit être retiré de l’affaire»
Le conseil de l’un des coaccusés dans ce qu’on va désormais appeler « Affaire Iya Mohammed » n’a pas manqué, lors de cette première audience, de signifier que son client n’avait rien à voir dans ce procès qui oppose l’ex-directeur général de la Sodecoton, et certains de ses anciens collaborateurs, à l’Etat du Cameroun. «Monsieur le président du tribunal, il faudrait qu’avant la prochaine audience, certains détails soient réglés. Nous n’avons rien à faire dans cette affaire», a d’emblée indiqué l’ancien bâtonnier de l’ordre des avocats du Cameroun. Me Charles Tchoungang explique alors que son client, mis en débet par le Conseil de discipline budgétaire et financière du Contrôle supérieur de l’Etat (Consupe), avait déjà payé les 208 millions Fcfa qui lui avaient été imputés au cours d’une mission de cette institution chargée de contrôler les comptes de gestion des organismes étatiques au Cameroun.
Pour aller plus loin, l’avocat de Jérôme Minlend, qui comparaît libre, a réitéré au Messager que son client avait déjà payé la somme qui lui avait été imputée par le Consupe bien avant l’ouverture de l’instruction. Pour cette raison, cet avocat chevronné estime que «mon client doit être retiré de cette affaire». Il rassure cependant que Jérôme Minlend sera là lors de la prochaine audience le 10 septembre 2014, mais il sera surtout question de soumettre les documents justificatifs qui prouvent que le commissaire aux comptes n’a pas manœuvré pour s’octroyer l’argent de l’Etat, via la Sodecoton. En fait, selon les explications, le coaccusé avait fait des prestations auprès de l’entreprise, qui avaient été payées en bonne et due forme. Mais, l’accusation estime que la facture de 350 millions Fcfa constituant le paiement des prestations – encore que ce montant présenté par le parquet est contesté par la défense – ait été un moyen de détournement. Quoi qu’il en soit, le juge a demandé au Parquet de revoir ce cas précis en vue de faire justice.
A.N.A.