Témoignages: Les jeudi 4 et samedi 6 novembre 1982 que nous avons vécu
DOUALA - 06 NPV. 2012
© Le Messager
Ce jour est commémoré la passation de témoin entre les Présidents A2 et B.P. (Ahmadou Ahidjo, Biya Paul) Dans les lignes qui suivent, nous vous faisons partager, les événements tels que nous les avons perçus. Le point de vue d’un profane. Historiens, politologues, constitutionnalistes voudront bien nous faire part de leur perception.
Jeune géomètre-topographe en service dans une des Sociétés d’études topographiques en vue à l’époque, nous nous trouvions à Buéa en mission d’étude de la voirie de la ville capitale de la province du Sud –Ouest. Une ville au statut particulier. Buéa en tant que unité administrative était à l’époque un district donc le Chef-lieu de l’arrondissement était Limbé (Victoria encore il y a deux ans) qui était cumulativement Chef-lieu du département du Fako. Quelques jours avant le 4 novembre, la fumée avait été observée sur un des cratères du mont Fako (Mont-Cameroun). Mes jeunes aides dont l’un s’appelait Kitty me dirent à cet effet que, pour leurs parents, dont certains avaient vécu la dernière éruption du char des dieux, la quantité de fumée dégagée ne présage pas d’une éruption, mais que Efasamoto, le dieu de la montagne, moitié homme, moitié animal comme le Trimobe du conte, les annonçait que des événements qui feraient date allaient se produire. Cela allait se vérifier par deux événements : la mort du paramount chief des bakwéri, le discours le plus court qu’aie jamais prononcé le grand camarade, le président de l’U.n.c et Président de la République Ahmadou Ahidjo (A2). Il faut noter que malgré son pèlerinage à la Mecque, il ne se faisait plus donner du El Hadj. Au cours de notre mission, nous habitions chez un cousin alors adjoint au Commandant du Gmi, la rue nous séparait de la résidence du Gouverneur de la province (aujourd’hui région, Ndlr). Comme s’il avait un pressentiment contrairement à ses horaires, notre cousin rentra tôt ce jour. Lui, son épouse et moi étions assis au salon attendant le journal de vingt heures qui se faisait désirer comme un couple de jeunes mariés à leur soirée de noces. Au Cameroun, comme cela a toujours été observé, quand le journal prend du retard, cela signifie à 99% que des textes importants sont attendus de la Présidence. Cette nuit, ce ne furent pas des textes mais un message. Il est exactement 20 heures 23 minutes quand commence sa diffusion. Elle va durer trois minutes et ce sera le seul titre du journal.
Au pied du mont Fako, en cette période de l’année, la nuit ne se prête pas aux balades. Elle devint plus glaciale, plus calme après l’écoute de ce message. Seuls, de temps en temps les messages répétés du talky walky de notre cousin nous sortait de l’espèce d’ahurissement dans laquelle nous étions. Ce dernier quant à lui entre temps s’était changé et avait revêtu une tenue de circonstance. Quand à nous il nous revint ces quelques paroles prononcées par Mgr Albert NDONGMO qui laissait entendre plus d’une décennie plus tôt, que son coup d’Etat était spirituel et que seuls les anges opéreraient… Sans contrainte, le Président A2 d’une voie monocorde annonce à la nation ébahie:
j’ai décidé de démissionner de mes fonctions de Président de la République Unie du Cameroun. Cette décision prendra effet le samedi 6 Novembre à 10 heures…
J’invite toutes les Camerounaises et tous les Camerounais à accorder sans réserve leur confiance et à apporter leur concours à mon successeur constitutionnel M. Paul BIYA. Il mérite la confiance de tous…
Notons que suite à un amendement de la Constitution de 1972 intervenu en 1979 (loi 79/02 du 29 Juin 1979) le Premier ministre devenait successeur du Président de la République en cas de vacance (cependant, il ne nous semble pas que les dispositions de l’alinéa (b) de l’article 7 aient été respectées. La date du 6 Novembre 1982 n’ayant pas été arrêtée après le constat de la Cour Suprême).
Nous sommes convaincus, que la nuit du 4 au 5 Novembre 1982 a été longue pour beaucoup de Camerounais qui, certainement avaient dû la passer à se demander s’ils ne rêvaient pas.
Quand à la ville de Buéa, ses habitants se lèvent groggy. C’est le seul sujet. Personne n’en croit ses oreilles. La T.V n’est pas encore sortie de terre. Feu E.N.S ancien SG/PR nous a dit dans une interview quand il était président de l’U.n.d.p avant le "coup de parti", que c’est lui qui avait signé les marchés de l’actuel axe-lourd (de la mort) Douala – Edéa – Yaoundé et celui de la TV. Que ces réalisations n’étaient pas à mettre au compte du Renouveau. Une parenthèse. En ce qui nous concerne l’esprit n’était pas au travail. Tellement nous pensions que ce n’était peut être que la face visible d’un iceberg, une véritable énigme.
Puis vint la journée du 06 novembre 1982. Même si, la journée avait pu être déclarée fériée et chômée, nous devions être présents sur le terrain. Ne voulant rien rater de l’événement, nous primes notre transistor, l’aide qui avait pour tâche de tenir le parasol pour nous mettre à l’abri des intempéries reçu comme bonus, nous le tenir aussi. Puis vint l’instant solennel.
D’abord notre surprise : il ne nous est pas signalé l’arrivée du Président démissionnaire au palais des verres. Ceci de notre part a limité la solennité de l’événement. Un peu comme si une personne ayant juré sur l’honneur commençant à avoir des regrets a peur de se dédire.
© Le Messager
Ce jour est commémoré la passation de témoin entre les Présidents A2 et B.P. (Ahmadou Ahidjo, Biya Paul) Dans les lignes qui suivent, nous vous faisons partager, les événements tels que nous les avons perçus. Le point de vue d’un profane. Historiens, politologues, constitutionnalistes voudront bien nous faire part de leur perception.
Jeune géomètre-topographe en service dans une des Sociétés d’études topographiques en vue à l’époque, nous nous trouvions à Buéa en mission d’étude de la voirie de la ville capitale de la province du Sud –Ouest. Une ville au statut particulier. Buéa en tant que unité administrative était à l’époque un district donc le Chef-lieu de l’arrondissement était Limbé (Victoria encore il y a deux ans) qui était cumulativement Chef-lieu du département du Fako. Quelques jours avant le 4 novembre, la fumée avait été observée sur un des cratères du mont Fako (Mont-Cameroun). Mes jeunes aides dont l’un s’appelait Kitty me dirent à cet effet que, pour leurs parents, dont certains avaient vécu la dernière éruption du char des dieux, la quantité de fumée dégagée ne présage pas d’une éruption, mais que Efasamoto, le dieu de la montagne, moitié homme, moitié animal comme le Trimobe du conte, les annonçait que des événements qui feraient date allaient se produire. Cela allait se vérifier par deux événements : la mort du paramount chief des bakwéri, le discours le plus court qu’aie jamais prononcé le grand camarade, le président de l’U.n.c et Président de la République Ahmadou Ahidjo (A2). Il faut noter que malgré son pèlerinage à la Mecque, il ne se faisait plus donner du El Hadj. Au cours de notre mission, nous habitions chez un cousin alors adjoint au Commandant du Gmi, la rue nous séparait de la résidence du Gouverneur de la province (aujourd’hui région, Ndlr). Comme s’il avait un pressentiment contrairement à ses horaires, notre cousin rentra tôt ce jour. Lui, son épouse et moi étions assis au salon attendant le journal de vingt heures qui se faisait désirer comme un couple de jeunes mariés à leur soirée de noces. Au Cameroun, comme cela a toujours été observé, quand le journal prend du retard, cela signifie à 99% que des textes importants sont attendus de la Présidence. Cette nuit, ce ne furent pas des textes mais un message. Il est exactement 20 heures 23 minutes quand commence sa diffusion. Elle va durer trois minutes et ce sera le seul titre du journal.
Au pied du mont Fako, en cette période de l’année, la nuit ne se prête pas aux balades. Elle devint plus glaciale, plus calme après l’écoute de ce message. Seuls, de temps en temps les messages répétés du talky walky de notre cousin nous sortait de l’espèce d’ahurissement dans laquelle nous étions. Ce dernier quant à lui entre temps s’était changé et avait revêtu une tenue de circonstance. Quand à nous il nous revint ces quelques paroles prononcées par Mgr Albert NDONGMO qui laissait entendre plus d’une décennie plus tôt, que son coup d’Etat était spirituel et que seuls les anges opéreraient… Sans contrainte, le Président A2 d’une voie monocorde annonce à la nation ébahie:
j’ai décidé de démissionner de mes fonctions de Président de la République Unie du Cameroun. Cette décision prendra effet le samedi 6 Novembre à 10 heures…
J’invite toutes les Camerounaises et tous les Camerounais à accorder sans réserve leur confiance et à apporter leur concours à mon successeur constitutionnel M. Paul BIYA. Il mérite la confiance de tous…
Notons que suite à un amendement de la Constitution de 1972 intervenu en 1979 (loi 79/02 du 29 Juin 1979) le Premier ministre devenait successeur du Président de la République en cas de vacance (cependant, il ne nous semble pas que les dispositions de l’alinéa (b) de l’article 7 aient été respectées. La date du 6 Novembre 1982 n’ayant pas été arrêtée après le constat de la Cour Suprême).
Nous sommes convaincus, que la nuit du 4 au 5 Novembre 1982 a été longue pour beaucoup de Camerounais qui, certainement avaient dû la passer à se demander s’ils ne rêvaient pas.
Quand à la ville de Buéa, ses habitants se lèvent groggy. C’est le seul sujet. Personne n’en croit ses oreilles. La T.V n’est pas encore sortie de terre. Feu E.N.S ancien SG/PR nous a dit dans une interview quand il était président de l’U.n.d.p avant le "coup de parti", que c’est lui qui avait signé les marchés de l’actuel axe-lourd (de la mort) Douala – Edéa – Yaoundé et celui de la TV. Que ces réalisations n’étaient pas à mettre au compte du Renouveau. Une parenthèse. En ce qui nous concerne l’esprit n’était pas au travail. Tellement nous pensions que ce n’était peut être que la face visible d’un iceberg, une véritable énigme.
Puis vint la journée du 06 novembre 1982. Même si, la journée avait pu être déclarée fériée et chômée, nous devions être présents sur le terrain. Ne voulant rien rater de l’événement, nous primes notre transistor, l’aide qui avait pour tâche de tenir le parasol pour nous mettre à l’abri des intempéries reçu comme bonus, nous le tenir aussi. Puis vint l’instant solennel.
D’abord notre surprise : il ne nous est pas signalé l’arrivée du Président démissionnaire au palais des verres. Ceci de notre part a limité la solennité de l’événement. Un peu comme si une personne ayant juré sur l’honneur commençant à avoir des regrets a peur de se dédire.