L'offre
de Viettel était techniquement et financièrement inférieure, la
procédure bancale, ce qui conduit la concurrence à faire une
requête.Selon certaines indiscrétions, le ministre camerounais des
Postes et télécommunications (PT), Jean-Pierre Biyiti bi Essam devrait
recevoir, ce vendredi 14 décembre, les investisseurs vietnamiens
représentants la société étatique Vietnam Telecom (Viettel) en vue de la
signature de la convention d'attribution de la 3ème licence de
téléphonie mobile au Cameroun, en compagnie du ministre des Finances,
Ousmane Mey. Lundi dernier, le Minpostel a en effet annoncé que Viettel
était adjudicataire de cette 3ème licence de mobile GSM (après MTN et
Orange).
Seulement, l'ensemble de la procédure est loin d'avoir été un modèle de clarté et de respects des normes. A commencer par cette annonce du ministre de l'attribution de la licence à Viettel, alors que le règlement du marché prévoit la désignation d'un adjudicataire provisoire, suivie de l'ouverture des discussions avec ce dernier avant l'adjudication définitive éventuelle. D'où vient-il que Viettel ait été directement désigné adjudicataire définitif? C'est vrai que ce marché d'attribution de la troisième licence de téléphonie mobile s'est déroulé de façon spéciale.
Habituellement et avant l'avènement il y a un an d'un ministère des Marchés publics, les offres sont soumises à la commission de passation des marchés du département ministériel concerné qui procède à l'ouverture des offres, en présence de tous les soumissionnaires. Cette fois, c'est le «Comité de pilotage du projet d'ouverture du marché de la téléphonie mobile», présidé par le ministre des PT lui-même, qui a conduit toute la procédure.
Pourtant, le règlement prévoyait que «les offres seront ouvertes par le comité technique de suivi et par le conseil du Gouvernement le cabinet MAAS Telecom». Voilà d'ailleurs une autre curiosité: pour choisir le troisième opérateur de téléphonie mobile, le gouvernement camerounais, dont l'administration s'est peuplée d'ingénieurs et d'experts en tous genres, a sollicité les services d'un cabinet étranger, américain en l'occurrence, dont il est dit qu'il bénéficiera de 3%du montant du prix de la licence. C'est dire que si Viettel, qui va payer 20 milliards de FCFA comme droit d'entrée, est confirmé adjudicataire, le cabinet MAAS Telecom va empocher la rondelette somme de 600 millions de F CFA. Pour avoir fait quoi d’extraordinaire?
La question revient en surface, d'autant que le choix de l'adjudicataire annoncé par le Minpostel est loin de faire l'unanimité, en tout cas ne semble pas être celui de la meilleure offre présentée.
TIS/Korea Telecom, dont les avocats vont faire opposition à ce choix du Minpostel (ils ont pour cela cinq jours après la désignation de l'adjudicataire et devraient être imités par ceux de Airtel), proposait, par exemple, dans son offre financière prés de 46 milliards de F CFA, soit plus du double de que devrait payer l'adjudicataire choisi par le Minpostel, Viettel, qui aura à débourser seulement 20 milliards de F CFA pour jouir de cette très convoitée troisième licence de téléphonie mobile au Cameroun.
Or, la note financière comptait pour 80% (20% étant réservé à la note technique) dans la notation définitive qui devait emporter l'adjudication. Car il s'agissait aussi pour les pouvoirs publics, lancés dans le chantier des »grandes réalisations», de réaliser une bonne opération financière dans ce projet d'attribution de la troisième licence de téléphonie mobile norme GSM 2G/30. Même techniquement, il y avait certainement des candidats plus outillés que Viettel comme Deutsche Telecom (DT), la plus grande entreprise allemande et européenne de téléphonie, ou ses homologues portugais (PT) et sud-coréen (KT).
En termes d'investissements. Korea Telecom proposait ainsi près de 350 milliards de F CFA là où Viettel annonce 200 milliards de F CFA... Les cinq pays que couvre Viettel à ce jour ne peuvent témoigner de sa puissance: Cambodge, Laos, Haïti, Pérou et Mozambique (seul pays africain avant son arrivée au Cameroun).
«Parmi les 30 entreprises de télécommunications internationales, nous sommes la plus petite», reconnaissait le directeur général de Viettel Group, Nguyen Duy Tho, dans une récente interview au journal tanzanien Daily News. «La couverture du réseau national», brandie par le ministre Biyiti-bi-Essam parmi les atouts qui ont milité en faveur de Viettel, était également contenue dans les offres techniques des quatre derniers concurrents restés en lice: Airtel, Maroc Telecom et TIS/Korea Telecom.
Pour rappel, une short-list de sept soumissionnaires pré-qualifiés a été rendue publique et était contenue dans le dossier d'appel d'offres (DM)) lancé en août 2012, après l'échec en 2011 d'une première procédure de consultation des candidats sans appel d'offres. Il s'agissait de: Bharti Airtel, Deutsche Telekom, Maroc Telecom, Monaco Télécom, Portugal Telecom, TIS/Korea Telecom et Viettel Group.
La bataille finale semble avoir opposé le vietnamien Viettel, représenté par sa filiale locale Viettel Cameroun Sarl basée à Yaoundé, au coréen et représenté par sa filiale camerounaise Technologie et système d'information (TSl), une SA basée à Douala. Et la victoire-surprise de l'opérateur public géré par le ministère vietnamien de la Défense, un jeune loup aux dents manifestement longues reste un vrai mystère.