Sérail: Mettre Marafa à l’éteignoir

Cameroun/Sérail: Mettre Marafa à l’éteignoir Voici des recettes pour faire oublier Marafa Hamidou Yaya. En dehors des personnalités telles que Ahidjo Mohamadou, Iya Mohammed, Bayero Fadil pour le remplacer, il y a d’autres méthodes ou moyens pour réduire l’influence de l’ancien ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Analyse.

Populaire malgré lui

Comment faire oublier Marafa Hamidou Yaya ? C’est l’équation à plusieurs inconnues que le régime au pouvoir essaie de trouver. Depuis son interpellation le 16 avril 2012, l’ancien Secrétaire général de la présidence de la République et ancien ministre d’Etat de l’Administration territoriale et de la Décentralisation est devenu une vedette. Au Cameroun, il est plus populaire que Paul Biya, Samuel Eto’o Fils et Roger Milla réunis. Il est l’homme le plus cité dans les conversations que ce soit dans la rue, les salons huppés ou les chaumières. Mais sa popularité repose sur du vent, elle n’a pas de bases solides à toutes épreuves si on sort de son fief de Garoua et de quelques villes et villages du Grand Nord et du Sud du pays. Cette popularité lui vient du fait qu’il a fait publier quatre lettres dans les journaux, étalant ainsi au grand jour dans la rue des secrets d’Etat, ce qui est passible de peine de mort sous certains régimes africain et asiatiques.

L’ancien ministre d’Etat n’ignore pas qu’il est interdit à un fonctionnaire, même retraité, qui a exercé certaines fonctions, de divulguer des secrets professionnels sous peine d’être frappé par la loi. En quoi Marafa Hamidou Yaya peut-il être plus important sur l’échiquier national que l’ancien Premier ministre Ephraim Inoni qui a été interpellé le même jour que lui. En quoi peut-il être plus populaire que Titus Edzoa, Polycarpe Abah Abah, Jean-Marie Atangana Mebara, Urbain Olanguena Awono, Pierre-Désiré Engo et autres s’il n’avait pas fait paraître dans la presse des informations que les gens ignoraient. En réalité, c’est ce sont les médias qui ont donné à Marafa Hamidou Yaya une stature qu’il n’avait pas auparavant et qui dépasse aujourd’hui sa modeste personne.

Les personnalités qui peuvent valablement le remplacer

Ahidjo Mohamadou dit Badjika : futur Premier ministre ?

Pour le grand malheur de Paul Biya, le fils de l’ancien président est membre de l’Undp de Bello Bouba Maïgari, ministre d’Etat en charge du Tourisme et des Loisirs. S’il était membre du Rdpc au pouvoir, le chef de l’Etat ne se creuserait pas la tête pour trouver un remplaçant à Marafa Hamidou Yaya. L’oiseau rare serait Ahidjo Mohamadou. Mais en politique tout est possible, car qui savait qu’un jour le fils d’Ahmadou Ahidjo pourrait accepter d’être l’ambassadeur itinérant de Paul Biya.

Demain, il pourrait être ministre d’Etat et pourquoi pas Premier ministre, ce qui pourrait bien arranger les affaires de Paul Biya qui subit les pressions du Grand Nord qui lui a donné un grand nombre de suffrages au scrutin présidentiel du 9 octobre dernier et qui revendique ce poste de Premier ministre. Et ce serait une occasion de se débarrasser de Cavayé Yéguié Djibril, éternel, inamovible président de l’Assemblée nationale (il est en poste depuis 1996) devenu impopulaire chez certains députés et jeunes Turcs du Grand Nord qui aimeraient le voir prendre sa retraite.

Mais seulement, si Ahidjo Mohamadou accepter de grimper dans la hiérarchie gouvernementale, cela ne serait pas sans conséquence pour lui et pourrait ruiner définitivement sa carrière politique. Les gens de tous bords en général et les militants de l’Undp en particulier ne comprendraient pas comment le fils d’Ahmadou Ahidjo se jetterait mains et pieds liés à celui qui a fait que son père aille mourir en terre étrangère au Sénégal où il a été enterré. Quelle sera la position de la veuve de son père, Germaine Ahidjo ?

Iya Mohammed

Le président de la Fécafoot et Directeur général de la Sodecoton est membre suppléant élu du Comité central du Rdpc. Il est riche, parfait bilingue (en fait il est plus à l’aise en anglais qu’en français), beau-frère de la région de l’Extrême Nord dont il a épousé une fille (la fille de l’ancien préfet, ancien gouverneur et ancien ministre délégué à la présidence chargé des Relations avec les Assemblées, Maïdadi Sadou, décédé depuis). Beaucoup de gens ignorent qu’il a été pendant longtemps le grand ami de Marafa Hamidou Yaya. Vers les années fin 1980 c’est lui qui suivait les travaux de construction de la première résidence de Marafa à Garoua.

Tout ce qu’il dépensait en semaine lui était remboursé le week-end par l’ancien ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation quand ce dernier montait à Garoua. Mais la politique a fini par diluer les liens étroits qu’entretenaient les deux hommes. Et c’est Marafa qui avait décoché la flèche le premier contre celui qui était devenu son protégé Iya Mohammed. Parce qu’il était devenu, en sa qualité de président de la Section Rdpc de la Bénoué, à ses yeux un rival qui pouvait le remplacer comme ministre. Toutefois, Iya Mohammed et lui étaient restés très complices. Chacun sachant jusqu’où faire confiance à l’autre.

Marafa Hamidou Yaya avait besoin de Iya Mohammed, l’homme du terrain et en revanche Iya Mohammed avait besoin de Marafa, membre du bureau politique et homme très puissant du sérail pour se prémunir au cas où. Surtout qu’il a traîné avec lui d’énormes casseroles dans ses deux postes de président de la Fécafoot et de directeur général de la Sodecoton où il est en poste depuis plus de 25 ans. Les gens ne comprendraient pas comment Paul Biya consolidererait la position en le nommant ministre, d’un homme qui a de gros investissements au Nigeria voisin dont il serait originaire selon des sources crédibles.

Mohamadou Fadil Bayero

Le président du groupe Fadil dont le siège social est à Douala est membre titulaire élu du Comité central du Rdpc. Il y est en tant que militant du département du Wouri, région du Littoral et non du département de la Bénoué, région du Nord d’où son père était originaire. Le président du conseil d’administration de l’agence nationale de la norme (Anor) est à la tête d’un groupe très puissant et a le soutien du lamido de Rey Bouba, ancien ministre de Paul Biya que le chef de l’Etat consulte ces derniers temps pour trouver un remplaçant à Marafa Hamidou Yaya.

En dépit de ces atouts, il reste que Mohamadou Fadil Bayero est coupé du Nord où il n’y passe guère beaucoup de temps. Son fief n’est pas Garoua mais Douala qu’il connaît comme le fonds de ses poches. Sa promotion pourrait ressembler à un parachutage que les gens auraient du mal à digérer, à accepter. Il y a d’autres candidats pour remplacer Marafa que nous avons présentés dans l’une des nos éditions tels Bello Bouba Maïgari, Issa Tchiroma Bakary, Alim Hayatou Garga, Sadou Hayatou qui pourrait faire l’affaire mais dont la santé n’est pas bonne en ce moment (il est membre d’honneur du Comité central du Rdpc, tandis que son épouse Pierrette est membre suppléante élue), Yao Aïssatou et Mme Youssouf née Adidja Alim, etc.

Le décès, il y a quelques années du docteur vétérinaire Maïkano Abdoulaye, ancien ministre d’Ahidjo et de Biya n’était pas une bonne affaire pour le chef de l’Etat. L’ancien délégué du gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Garoua avait suffisamment d’autorité pour être le candidat idéal pour remplacer Marafa même comme il ne prenait plus goût aux fonctions ministérielles, lui qui avait abandonné son poste de directeur général du Laboratoire national vétérinaire pour se retirer dans son village natal situé à 15 kilomètres de Garoua. Même s’il n’était pas Peulh mais Fali, il aurait pu jouer un rôle important dans cette affaire en présentant des candidats susceptibles de remplacer Marafa à Paul Biya. Il était l’une des rares personnes à être écouté d’Ahidjo Mohamadou qui le considérait comme son père.

Efriter le poids politique de Garoua

C’est la solution finale. Si la fronde persiste à Garoua dans les rangs locaux du parti au pouvoir, Paul Biya est capable de prendre des mesures extraordinaires contre par exemple Garoua et la Bénoué sans pour autant léser ceux des responsables, des militants et des sympathisants du parti qui vont lui rester fidèles. Le déplacement du centre politique du Grand Nord de Garoua à Maroua. C’est un homme, Ahmadou Ahidjo, qui a donné à Garoua cette importance. Il est mort depuis mais la ville a continué à garder son ascendant sur les trois régions septentrionales du pays par la faute de Paul Biya en personne. Il aurait pu détruire cette puissance en déplaçant, en accordant plus d’importance à Maroua qui est le chef-lieu de l’une des régions les plus peuplées du Cameroun. Le Nord donne 9 députés au Rdpc contre 3 à l’Undp, on peut même dire que c’est un fief de l’opposition tandis que l’Extrême Nord en donne 26 au parti au pouvoir contre 3 à l’Undp.

Réduire le nombre des ministres de la Bénoué. Paul Biya a entretenu cette illusion chez les originaires du département de la Bénoué en général et de la ville de Garoua en particulier qu’ils sont les plus forts, les plus beaux, les plus importants, les plus intelligents. Ils ont pris goût à cela et cela leur est monté à la tête. Et c’est ce qui est monté à la tête d’un enfant du coin ci-devant Marafa Hamidou Yaya qui pense, qui croit dur comme fer que c’est un droit naturel qu’il prenne la place de Paul Biya, pas par les urnes mais par des moyens détournés. A quoi pensait Paul Biya quand il donne quatre ou cinq ministres à une ville comme Garoua ou à un département comme la Bénoué au détriment des autres départements et villes de la région du Nord. Faisons un peu de statistiques : avant le 9 décembre 2011, date du remaniement ministériel, la Bénoué avait cinq ministres et pas des moindres : - Marafa Hamidou Yaya, - Maïgari Bello Bouba, - Issa Tchiroma Bakary - Mme Youssouf née Adidja Alim, - Alim Garga Hayatou.

Après le remaniement, Marafa Hamidou Yaya a été limogé mais le département de la Bénoué a conservé quatre ministres, plus que le département du Dja et Lobo natal de Paul Biya qui n’en compte que trois : - Martin Belinga Eboutou, - Louis Paul Motaze, - Alain Edgar Mebe Ngo’o. Plus que le département du Diamaré qui a pour chef-lieu Maroua qui n’a que des broutilles : - Hamadou Moustapha, ministre chargé de mission à la présidence de la République. - Yaouba Abdoulaye, ministre délégué auprès du ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire chargé de la planification.

Dans la région du Nord les autres départements que sont le Faro, le Mayo Louti et le Mayo Rey ont a eux trois un seul secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Défense chargé des Anciens Combattants. Une sinécure qui est revenu à Koumpa Issa, ancien gouverneur de région, originaire du département du Faro. Mais seulement en réduisant le nombre de ministre de la Bénoué, cela peut renforcer la popularité de Marafa et l’impopularité de Biya. Et même s’il faut élaguer, qui va partir et qui va rester. On suppose que Issa Tchiroma Bakary peut sauter lors du prochain gouvernement, tout comme Alim Hayatou Garga ou Mme Youssouf née Adidja Alim, Maïgari Bello Bouba étant intouchable.

La Bénoué pourrait donc garder deux ministres : un du Rdpc et un de l’Undp, les deux ministres dégagés pouvant aller aux deux départements du Nord qui n’en ont pas : le Mayo Louti et le Mayo Rey du lamido Aboubakary Abdoulaye. Ou alors donner un poste à un département du Nord et un autre au département du Diamaré, de l’Extrême Nord, qui a donné plus de voix à Paul Biya que la Bénoué lors du scrutin présidentiel du 09 octobre 2011. Deux départements ont occupé respectivement les 4è et 5è rang. En définitive, Paul Biya doit revoir sa copie et cesser de faire aveuglement confiance à des gens qui n’hésitent pas à lui planter un couteau dans le dos quand il y a un petit problème.

Un aveu de faiblesse du Rdpc

Ce sont les gesticulations au sein du parti au pouvoir qui donnent la force à Marafa, qui renforcent sa popularité, son aura. Pourquoi n’y a-t-il pas tant de bruits, de l’agitation autour de l’ancien Premier ministre Ephraim Inoni et d’autres personnalités. Cela veut dire qu’on a peur de l‘ancien ministre au plus haut du pouvoir de l’Etat, du parti. Comment un seul homme peut-il faire peur à des gens qui ne sont pas du tout des enfants de chœur, des mauviettes ? C’est à ne rien comprendre.

Si comme on le dit que des négociations se déroulent entre le régime et le clan ou les partisans de Marafa, ce serait affaiblir la justice camerounaise qu’on doit laisser faire son travail. Si le régime se met à négocier, autant négocier avec toutes les personnalités qui sont en taule dans le cadre de l’opération Epervier car nul n’est au-dessus de la loi. Ceux qui soutiennent aveuglement Marafa oublient-ils que les Olanguena Awono, Abah Abah, Atangana Mebara, Ephraim Inoni qui est même chef traditionnel ont aussi des partisans dans tous les coins du pays ? Il y a plusieurs solutions pour détruire l’influence politique de Marafa à Garoua comme nous l’avons signalé plus haut. Comme par exemple, déplacer ou transférer le centre du pouvoir du Grand Nord de Garoua à Maroua.

Le séjour de Jean Nkuete à Garoua ne servira à rien

Depuis mardi dernier, le secrétaire général du Comité central du Rdpc est à Garoua pour y voir clair. Pour ceux des militants et des sympathisants du Rdpc qui soutiennent l’ancien secrétaire général de la présidence de la République la visite du Sg du Comité central du Rdpc est sans objet. Pour ces jusqu’aux-boutistes, il n’y a aucune négociation à faire tant que leur idole reste en prison. Ils considèrent le séjour à Garoua comme pur séjour touristique et non une tournée de travail. Les soutiens de Marafa feront semblant d’écouter les propos du Sg du Comité central de leur parti, ils le feront par pure politesse.

© Aurore Plus : Michel Michaut Moussala


20/07/2012
4 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 299 autres membres