Sénégal,Procès d’Hissène Habré : Elle pourrait bien marcher, la grosse machine
Cette fois-ci, il risque de ne pas ressortir du tribunal avec le «V» de la victoire, comme du temps d’Abdoulaye Wade. La principale revendication des parents des victimes semble sur le point d’être entendue : le jugement. Après 20 ans d’attente ! Hissène Habré, l’ancien président tchadien, a passé sa première nuit hors de son refuge le dimanche 30 juin 2013. Un funeste jour que ce 30 juin et une douche très froide pour celui qui s’était si bien intégré dans la société sénégalaise, notamment chez les dignitaires religieux de son quartier. Si bien qu’il avait même convolé en justes noces avec une de leurs compatriotes.
Le qualifié de «Pinochet africain» par de méchantes langues n’a même pas eu le temps de se changer, paraît-il. «Pauvre septuagénaire!», pourraient dire en se lamentant ceux qui n’ont pas connu «La piscine», ce sinistre endroit où la noyade était le jeu préféré des maître nageurs. Du temps d’Hissène en effet, celui qui était envoyé au sein de la terrible Direction de la documentation et de la sécurité (DDS) n’avait plus que ses larmes pour signer son acte de décès.
L’effet Obama, qui a récemment séjourné au pays de Léopold Sedar Senghor, est-il pour quelque chose dans ce qui est arrivé le 30 juin dernier ? Ce dernier a-t-il mis la pression lors des ses entrevues avec son homologue sénégalais? Difficile d’être dans les secrets des dieux, mais il est évident que la célérité dans l’interpellation d'Habré ne doit pas déplaire au président américain, encore moins à l’Union européenne, qui n’a pas boudé son plaisir, elle qui en a ouvertement félicité Macky Sall. Pour la petite histoire, dans les années 70, lorsqu’il essaimait dans le Tibesti, le rebelle Hissène Habré était l'un des responsables de la détention de plusieurs ressortissants européens, dont l'ethnologue et archéologue française Françoise Claustre et de l'exécution, le 4 avril 1975 à Zoui, du commandant Pierre Xavier Galopin, envoyé par le gouvernement français pour négocier leur libération.
Certains même se mettent à espérer que l’actuel président tchadien, Idriss Déby, son tombeur, qui fut son commandant militaire avant de prendre lui aussi le maquis, pourra être cité à comparaître. Ne dit-on pas que c’est le dossier qui conduit le juge et non le contraire ? Ça, c’est une autre affaire ! En en attendant l'issue, pour ce qui concerne Hissène Habré, il est évident que ceux qui piaffent d’impatience de voir l’enfant terrible de Faya-Largeau pendu à un croc de boucher risquent d’être déçus. Un long procès l’attend, avec des centaines et des centaines de témoins, et sa tenue même est d'ores et déjà un petit soulagement pour les victimes survivantes et les parents de celles qui ne sont plus de ce monde. Ces derniers pourraient enfin faire le deuil de leurs proches torturés à mort pendant le règne de fer d’Hissène Habré. Une étape très importante, surtout dans cette mystérieuse Afrique.