Scandale des avions chinois - MA-60 : Le jeu des joueurs

 

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Bello Bouba Maïgari
Après la visite officielle du chef de l’État à Beijing, en Chine, en 2009, Bello Bouba Maïgari alors ministre d’État ministre des Transports, fait partie de la délégation chargée de conduire les négociations avec les Chinois pour l’acquisition de deux MA-60 qui font aujourd’hui l’objet d’une vive polémique. C’est ainsi que le 27 septembre 2011, il procède à la signature d’un mémorandum d’entente relatif à la fourniture de deux aéronefs avec les responsables d’Avic international holding. C’est à ce moment-là, soutiennent des sources proches du dossier, qu’auraient commencé des tripatouillages sur le prix d’achat de ces avions. Toujours est-il qu’à l’issu d’une mission d’enquête commandé par le chef de l’État en Chine aux fins de voir plus clair dans la mafia ayant entouré l’acquisition de ces MA-60, il reviendra de plus en plus que le désormais ministre du Tourisme et des Loisirs aura joué un rôle assez trouble dans cette affaire. C’est d’ailleurs dans ce cadre qu’il sera entendu par les fins limiers du Tcs.
 

Edgard Alain Mebe Ngo’o   
Les négociations pour l’acquisition des avions chinois sont menées de fond en comble par des civils de 2009 à 2014 alors que Mebe Ngo’o est ministre délégué à la présidence chargé de la Défense. Mais curieusement, en mars 2015, c’est l’État- major de l’armée de l’air qui est chargé d’aller réceptionner les deux avions. Le général Calvin Momha conduit la mission. En effet, les deux MA-60, peints aux couleurs de Camair-co, ont des immatriculations militaires. Le premier  était immatriculé TJX-SD et le second TJX-SE. TJ étant le sigle simplifié «Tango» «Juliet». Le ministère de la Défense est désormais dans le coup. Le 24 mars 2015, l’officier  supérieur atterrit à la base militaire de Douala avec les deux avions. Au moment de présenter les appareils au public et aux journalistes, la tâche a été confiée au chef d’État-major de l’armée de l’air. Alors, comment expliquer que des avions estampillés Camair-Co, une compagnie civile de navigation aérienne, soient plutôt réceptionnés à la base militaire. L’aéroport international de Douala est pourtant tout à côté ? Comment comprendre que le fonctionnement des appareils destinés au transport des civils et pilotés par des civils, soit expliqué par un militaire ?  Un fait est réel, le ministère de la Défense est désormais dans le coup.

 

Le 2 décembre 2015, Mebe Ngo’o est nommé ministre des Transports. Le vol inaugural des MA-60 est programmé pour le 29 décembre. Mais, le directeur général de l’Autorité aéronautique civile du Cameroun (Ccaa), Pierre Tankam, aurait saisi la présidence de la République pour émettre des doutes quant à la fiabilité de ces avions. Suite à cette attitude, le nouveau ministre des Transports signe, le 28 décembre 2015, un communiqué portant report du vol inaugural et souligne que : «les deux avions de type MA60 appartenant à la compagnie nationale Cameroon airlines corporation (Camair-Co), ont bel et bien reçu leur certification de la Cameroon civil aviation authority (CCAA) après satisfaction des exigences réglementaires y relatives. Ils sont de ce fait habilités à entrer en exploitation…». Le  Dg de la Ccaa est limogé par la suite. L’ancien ministre de la Défense semble bien maîtriser le dossier.

 

Emmanuel Nganou Djoumessi
Ci-devant ministre de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire, c’est lui qui signe le 11 novembre 2013, un accord cadre d’un prêt préférentiel d’un montant de 34 milliards 400 millions avec l’ambassadeur de Chine au Cameroun pour l’achat de deux MA-60 pour le compte de Camair-co. Interpelé le 5 décembre 2014 à l’Assemblé nationale par le député Undp de l’Adamaoua, Amadou Tadjia qui critique le coût jugé exorbitant auquel l’État a fait la commande de ces appareils contrairement au Congo Brazzaville qui aurait acquis le même modèle à 4 milliards de Fcfa, l’ancien Minepat avait indiqué que le Cameroun avait acquis trois avions au prix de deux et que les modèles congolais n’étaient pas aussi récents que ceux livrés au pays de Paul Biya.

 

Un mensonge tellement gros que les parlementaires ont failli tomber à la renverse. Surtout que ces derniers avaient entre leurs mains, le tableau récapitulatif  du coût total d’achat de deux MA-60 émis par le Minepat. Il en ressort clairement que le Cameroun a acheté 2 avions. Un  troisième aurait tout simplement été offert à la partie camerounaise par les Chinois. Pourquoi Nganou Djoumessi a-t-il menti devant la représentation nationale ? Cette attitude fait de lui l’un des principaux suspects dans l’affaire.  

 

Louis Paul Motaze
Ministre de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire de décembre 2007 à 2011, il a redynamisé plusieurs dossiers en dormance dans les tiroirs de ce département ministériel. À cet effet, scrutant l’environnement financier et économique international, il a constaté une tendance baissière de l’aide publique au développement et s’est lancé dans la recherche de financements innovants pour diversifier les ressources de l’État afin d’accroître le financement des projets. Il a négocié plusieurs accords de financement avec les bailleurs internationaux, et organisé la faisabilité de grands projets comme le deuxième pont sur le Wouri, le port de Kribi, le Barrage de Lom-Pangar et de Memve'ele.

 

C’est également dans ce contexte qu’il a été fortement impliqué aux premières heures des négociations pour l’acquisition de deux MA-60. Un dossier qu’il va continuer à piloter jusqu’à sa nomination à la tête du secrétariat général de la Primature. Selon plusieurs sources proches du dossier, il va continuer à suivre ce dossier à partir de la Primature.  Si sa responsabilité dans les faits de concussions qui entourent l’achat de ces deux aéronefs n’est jusqu’à présent pas toujours démontrée, il apparait néanmoins que de tels incuries ne pouvaient se passer sans qu’il ne soit au courant.

 

Robert Nkili
Ministre des Transports de décembre 2011 à décembre 2015, il a toujours rejeté la responsabilité sur les autres. Pourtant, c’est lui qui a piloté l’acquisition des deux avions sur le plan technique. Il a d’ailleurs effectué plusieurs voyages en Chine pour poursuivre et finaliser les modalités techniques d'acquisition des avions MA-60. De ce fait, il se murmure que c’est lui qui aurait  provoqué le report de la livraison des avions en 2012, pour reprendre le montage du dossier technique.

 

De sources proches du dossier, c’est dès cet instant que plusieurs chiffres ont été modifiés. Le 4 juillet 2012, faisant fi du scepticisme et des interrogations des experts camerounais en aéronautique civile sur la qualité même des avions, Robert Nkili s’est montré euphorique aux côtés de Xue BO, vice-président d’Avic International Holding, au sujet de l’acquisition de ces avions MA60, au point où il a souligné à grands traits la générosité des Chinois qui promettaient de livrer à l’Etat du Cameroun 3 avions pour le prix de 2, le 3è ayant été mis à la disposition de l’armée de l’air camerounaise.

 

Une attitude qui trahit mal la forte implication de l’ancien Mintransport dans ce qui apparait désormais comme l’un des gros scandales financiers de ces 5 dernières années. D’ailleurs, c’est lui qui est chargé de réceptionner les deux avions à la base aérienne de Douala, même s’il choisit de se faire représenter par le ministre délégué, Mefiro Oumarou. Mais lui-même sera sur le tarmac de l’aéroport international de Nsimalen à l’arrivée de ces coucous à Yaoundé et au nom du Premier ministre chef du gouvernement, il les a rétrocédés à la Camair-co. Ce jour-là, le ministre des Transports avait rappelé le processus d’acquisition de ces avions.

 

 
A ceux qui estiment que cela avait été long, Robert Nkili indiquait que le gouvernement avait voulu s’assurer que tout était parfait, conformément aux normes internationales en la matière, et satisfaisant par rapport aux clauses des accords conclus à ce sujet. La cérémonie de Yaoundé, considérée comme «l’ultime étape de l’acquisition de ces avions», avait été ponctuée par la signature des documents de livraison et de réception entre le Cameroun représenté par Robert Nkili et la République populaire de Chine.
 

Jules Doret Ndongo
Secrétaire général des services du Premier ministre jusqu’au 9 décembre 2011, il est chargé de la coordination de plusieurs dossiers dont celui sur  l’achat des avions chinois MA-60. Ce rôle de coordonnateur des actions du gouvernement aux côtés du Premier ministre lui confère une sphère d’influence plus large. De ce fait, affirment des sources introduites, son témoignage serait très important et pourrait dévoiler la mafia qui aura orienté l’acquisition de ces avions refusés dans plusieurs pays.

Par ailleurs, une certaine opinion pense que de par la position stratégique qu’il occupait, Jules Doret Ndongo aurait pu jouer un rôle primordial dans cette affaire. Il pourrait de ce fait être appelé à répondre de certaines questions devant le Tribunal criminel spécial dans les prochains jours.

 



09/06/2016
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