SÉRAIL: Les causes du malaise qui a failli emporter le Premier Ministre Philemon Yang
Yaoundé, 10 Décembre 2012
© Nadine Bella | La Météo
Le Premier ministre aurait été alerté, par un de ses fidèles très introduit à la présidence, que le chef de l'Etat cherche à le remplacer. Dur à encaisser pour un homme, rassuré quelques heures plus tôt par Paul Biya, qu'il sera reconduit à son poste.
© Nadine Bella | La Météo
Le Premier ministre aurait été alerté, par un de ses fidèles très introduit à la présidence, que le chef de l'Etat cherche à le remplacer. Dur à encaisser pour un homme, rassuré quelques heures plus tôt par Paul Biya, qu'il sera reconduit à son poste.
Où se trouve Philémon Yang? Bien malin celui qui répondra à cette question en l'absence d'information officielle. Vraisemblablement, le Premier ministre, au moment où nous mettions sous presse, n'est pas au Cameroun. D'aucuns le disent sous soins intensifs au Canada, pays où pendant près de deux décennies il fut la voix et le visage du Cameroun. Le Pm y a été évacué peu après un malaise survenu le 30 novembre 2012 alors qu'il était attendu à l'aéroport avec son gouvernement à l'occasion de la visite officielle du couple présidentiel équato-guinéen, selon une source réputée fiable. Grand absent à Nsimalen, Philémon Yang n'en fut pas moins présent dans les conversations, interrogation et inquiétude. Comme à l'aéroport, il n'y eut point de Pm à la réception du soir au palais de l'Unité. Cela eut le don d'en rajouter à l'inquiétude. Samedi dernier, La Météo a appris d'un informateur généralement crédible que Philémon Yang a été pris d'un malaise après avoir été renseigné sur son limogeage à venir. Une information qu'il a prise très au sérieux, parce que sortant de la bouche d'un de ses plus fidèles lieutenants resté au secrétariat général de la présidence de la République. Avant d'être nommé à la primature, en juin 2009, l'ancien plénipotentiaire du Cameroun au Canada fut, pendant un temps assez long pour se constituer un réseau d'obligés, secrétaire général adjoint de la présidence de la République. Alors qu'on le tuyautait sur les consultations secrètes en vue de son remplacement, Philémon Yang s'est souvenu qu'en marge du conseil ministériel du 27 novembre dernier, Paul Biya l'aurait, indique-t-on, reçu pour lui dire de préparer ses propositions dans le cadre de la formation prochaine d'un gouvernement dont il assurerait les rênes. De cœur fragile, le fils du Nord-Ouest fut secoué par la révélation. Blessé dans son orgueil de Pm, affligé par le double langage présidentiel, humilié en tant qu'homme, Yang pour qui c'en était trop aurait flippé. La Météo, malgré ses efforts, n'a pu obtenir de nouvelles fraîches sur l'état de santé du successeur d'Inoni Ephraim. Polémique de démission. Dans sa publication du 22 août 2012, le journal l’Épervier N° 138 faisait paraître un article intitulé «Philémon Yang donne sa démission à Paul Biya». D'après ce journal, «le Premier ministre aurait, le mois dernier, demandé par écrit au président de la République de le décharger de ses fonctions. Seul hic, la «fatigue» qu'il avance comme motif ne convainc pas Etoudi, qui a ouvert une enquête pour voir clair». Le Premier ministre, Philémon Yang, va démentir, le 27 août 2012, cette information. Son directeur de cabinet, Paul Ghogomu Mingo, publiera un communiqué à Cameroon Tribune pour réaffirmer la loyauté et le dévouement de son patron au président de la République, Paul Biya. «S.E. Philémon Yang, Premier ministre, chef du gouvernement de la République du Cameroun tient à faire connaître à l'opinion publique camerounaise que les allégations contenues dans ce journal sont et demeurent fausses», écrit-il. Dans les faits, Philémon Yang avait, soutiennent des sources aussi crédibles que convergentes, fait directement parvenir au prince une lettre dans laquelle il souhaitait, «pour des raisons de santé» être déchargé de ses fondions. Biya ne donna pas suite à cette missive particulière. Pis, il n'en toucha mot à son auteur des mois durant La publication sus évoquée du journal l’Épervier fit paniquer Etoudi qui crut à un coup fourré du Pm. Celui-ci sera soupçonné d'avoir fait fuiter son projet de démission. Il faut dire que l'entourage présidentiel est convaincu que Yang a demandé son départ à cause du conflit de pouvoir qui l'opposait à Louis Paul Motaze, secrétaire général des services du Pm, mais dans la réalité véritable patron de «l'Immeuble étoile», eu égard à ce qu'il ne rendrait compte qu'au seul président de la République de qui il recevrait, pour traitement, des dossiers importants à l'instar de ceux ayant trait au suivi des projets dits structurants. Sous la pression de Paul Biya, Yang n'eut pas d'autre choix que de montrer sa loyauté en endossant la paternité d'un démenti écrit ailleurs et outrageusement fard d'allégeance envers la personne du chef de l'Etat. On le sait, le prince nomme et révoque. Le priver du pouvoir de vous défaire est une arme de lèse-majesté. Yang (qui est aux hautes fonctions depuis 1975) serait donc en train d'en faire l'amère expérience. Alors que logiquement une retraite en ce qui le concerne ne serait pas volée. Potins. Lors du récent conseil ministériel, il se dit que le chef de l’Etat aurait dans le style simple et détaché qu'on lui cannait, pris à partie Ama Tutu Muna en ces termes: «Madame le ministre de la Culture, c'est vous qui piétinez les décisions de justice?». Silence de mort dans la salle. Grosse humiliation chez la concernée. Au moment où un remaniement flotte dans l'air, des non initiés de la méthode Biya peuvent penser que les jours de la «sœur de Yang» sont comptés au gouvernement. Or, l'expérience a montré que Biya limoge les ministres qu'il a publiquement félicités et confirme ceux qu'il a eu à blâmer. De quoi brouiller les cartes sur les noms des sortants, entrants et reconduits. Ne dit-on pas que Biya est un pas du contre-pied? Demain, mardi, 11 décembre, la session budgétaire arrive, en principe, à son terme. Les Camerounais redoutent un tsunami ministériel dans un environnement où l'on parle de mécontentement présidentiel au sujet des résultats médiocres des deux tiers des membres du premier gouvernement des Grandes réalisations. |
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