Santé publique: Gabegie à l'hôpital de Ngoumou

Yaoundé, 21 Novembre 2013
© Michel Evongo | La Météo

Le directeur de cette formation hospitalière s'en mettait plein les poches et au diable le serment d'Hippocrate !

L'hôpital de Ngoumou avait déjà inscrit son nom en lettres d'or dans le registre des formations sanitaires du ministre de la Santé, ceci par la qualité de service de son personnel ayant prêté le serment d'Hippocrate. On se souvient encore de certains noms comme: Dieu Beni Ateme, Georges Koumkang, Dr Manga, Dr Essama et le toujours disponible Dr Roger Mepeou. Dès lors que ce centre hospitalier a subi des reformes pour le rendre plus performant, à l'exemple de l'installation d'une morgue, de l'augmentation des médecins et de son changement en district de santé, tout a basculé. Pour le premier venu et au vu de son palmarès d'antan, l'hôpital de Ngoumou semble être une référence. Pourtant la vérité est plutôt décevante. Ceux qui y sont passés n'ont pas caché leur dégoût en le qualifiant tout simplement de «crève nègres»: cela ne semble pas pour autant préoccuper son directeur, Dr Roger Etoa.

L'absence permanente des médecins, la vente parallèle des médicaments, la qualité même de service mettent en danger la vie des patients. Les diagnostics du laboratoire sont souvent des petits sujets de commentaires de certains responsables du laboratoire qui ont jeté dans la poubelle le secret professionnel.

En date du 12 octobre dernier, aucun des quatre médecins n'était en poste, jusqu'à la date du 16 octobre. Même celui qui est sensé suivre le fonctionnement de l'hôpital a également pris la clé des champs. Tous les cas graves nécessitant les interventions des médecins étaient évacués à Yaoundé. Aucun médecin n'était joignable par téléphone. Forts de tous ces comportements sus-évoqués, le directeur de l'hôpital a été approché. Le Dr Roger Etoa déclare être un responsable serein qui gère une structure sanitaire et qui ne se reproche de rien. Quant aux autres déviances constatées, il avoue que redresser certaines mentalités en interne ou en externe est une activité difficile.

Le Dr Roger Etoa a précisé que la vente parallèle des médicaments ne le concerne pas. Bien plus, que certains secteurs exogènes ne dépendent pas de lui, directeur de l'hôpital, et membre de jura-Suisse, il n'a pas la haute main sur le contrôle de la validité et la qualité des produits stockés en pharmacie. Quant aux autres abus, il entend remettre de l'ordre dans ses services dans les tous prochains jours, en y apportant en interne, des solutions.

Morgue. Par contre, un sujet plus brûlant que le directeur de l'hôpital évite d'entretenir avec la presse, est celui de la morgue de l'hôpital de Ngoumou. Sur ce sujet, il n'est en accord avec personne, même pas avec son chef, le Dr Essindi, médecin chef de district de santé de Ngoumou, qu'il refuse d'ailleurs de considérer comme tel. Le Dr Roger Etoa déclare détenir un dossier technique lui permettant de justifier la gestion de cette structure pourtant source de beaucoup de problèmes. Selon le responsable de ce service, André Roger Onana Mvogo, la pomme de discorde est la gestion des sommes provenant de la morgue. Sommes que le Dr Roger Etoa prélève tous les vendredis et qu'il semblerait avoir confondu avec son salaire.

La deuxième raison, déclare le morguier, est une exigence du directeur de l'hôpital. Non seulement qu'il demanderait au morguier de déposer ses frais de manutention au même titre que les frais de morgue, mais il lui exigerait par ailleurs de faire de la surfacturation dans les pro-formats servant à la commande du matériel tel, le formol, les plaquettes servants à identifier les corps, l'essence pour le groupe électrogène, etc.

Face à son refus, le directeur de l'hôpital serait entré dans tous ses états menaçant de le virer. Il sera vite remplacé par Anicet Metsina Mvogo, qui, selon certaines langues, serait un proche du Dr Etoa. Mal lui en prendra car sa nouvelle recrue, repris de justice de son état, sera rattrapée par la brigade de gendarmerie d'Okola. C'est ainsi qu'André Roger Onana Mvogo va reprendre son poste, sur fond de tension, faute de volontaire pour travailler à la morgue.


Scandales à ciel ouvert

Dans la journée du vendredi 27 septembre 2013, lors d'une cérémonie des levées des corps et pour une fois que l'économe est présent à l'hôpital, la rondelette somme de 600.000 Fcfa est enregistrée. Comme il est de coutume, le directeur demande à son morguier que la recette lui soit réservée. Mais Bani Viviane Dufe, infirmière principale de l'hôpital, l'indice de service selon des sources, informe son directeur que cet argent est entrain d'être enregistré par l'économe et le docteur Etoa va rentrer dans une colère noire.

Dans sa tentative de stopper l'économe, il va publiquement et violemment défoncer les serrures du portail, à la stupeur générale. En rappel, dans le décret du premier ministre chef du gouvernement n° 93/229/PM du 15 mars 1993 fixant les modalités de la gestion des recettes affectées aux formations sanitaires publiques pour leur fonctionnement, il est dit en son article 8 alinéa 1 que la gestion comptable des recettes affectées s'effectue dans le cadre d'une régie d'avance spéciale permanente, parmi lesquelles les opérations retracées par un compte spécial ouvert au trésor public. Leurs modalités, en alinéa 2, sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de la Santé et des Finances.

Le texte précise par la suite que le régisseur des recettes nommé auprès de la formation sanitaire publique procède au recouvrement des recettes résultants des prestations fournies à titre onéreux [...] 50% reviennent à l'Etat et 50% à la formation sanitaire. Et comme pour mettre en garde tout gestionnaire véreux, l'article 14 du même décret dit: «les recettes provenant des prestations onéreuses assurées par les formations sanitaires publiques et affectées au financement de leurs charges de fonctionnement sont des deniers publics».

Il est donc établi que les recettes de la morgue de l'hôpital de Ngoumou sont des deniers publics qui depuis près d'un an, prennent des destinations inconnues pendant que le travail pour lequel les professionnels de la santé ont été affectés à Ngoumou est battu en brèche.


21/11/2013
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