Rouleau compresseur : La journée sans repos d’Yves Michel Fotso
MUTATIONS 02 DEC 2010
De son domicile à Douala à la prison centrale de Kondengui, l’ancien Adg de la Camair est passé par toutes les émotions.
Il est 21h 15 minutes à Yaoundé. Devant le centre du tribunal
administratif de la capitale, une vingtaine de véhicules de grand
gabarit sont alignées de chaque côté de la rue. Tantôt au volant, tantôt
adossés sur leur véhicule, des amis, des membres de la famille d’Yves
Michel Fotso attendent là, les mines décomposées, le sort qui sera
réservé à l’homme d’affaires entendu pour l’heure par le juge
d’instruction. Par une porte dérobée, une voiture banalisée transporte
Yves Michel Fotso qui venait d’être extrait discrètement du bureau du
procureur de la République pour celui du juge d’instruction, face au
bâtiment abritant les salles d’audience de la Cour Suprême.
L’attente
parait longue, le temps que le présumé passe devant le juge
d’instruction. Les interrogations fusent parmi les proches du
milliardaire de Douala : pour lequel des dossiers serait-il interpellé,
entre l’affaire de l’avion présidentiel, la gestion de la défunte Camair
ou celle, relancée récemment, de la Cbc ? Rien ne filtre quand
subitement, le procureur de la République Belinga traverse la cour au
pas de course pour rejoindre le bureau du juge d’instruction Pascal
Magnanguemabé. Tout se précipite : deux cars Hiace franchissent le
couloir, feux de détresse actionnés. L’épilogue s’annonce. Tous les
véhicules de sécurité se mettent en position de départ ; à 21h 20 mn, la
troisième voiture transportant Yves Michel Fotso, encarté entre deux
policiers, traverse la cour à vive allure ; le cortège suit avec la même
vitesse.
L’épouse de Yves Michel Fotso est là, calme, l’air digne. Elle
interpelle le procureur de la République qui regagnait son
bureau : «Mais, monsieur le juge d’instruction a refusé que je donne des
objets de toilettes à mon mari, c’est inadmissible !»,
s’exclame-t-elle. Le procureur, apparemment surpris, rassure la
dame : «Allez voir le régisseur de prison à Kondengui, avant votre
arrivée, je lui aurais prescrit de vous recevoir afin de remettre à
votre époux ce qu’il lui faut». Quand elle arrive à la prison, les
massifs battants du pénitencier s’étaient déjà refermés derrière Yves
Michel Fotso, où il a passé sa première nuit privée de liberté.
Tout a
commencé hier en fin de matinée à Douala avec l’interpellation de Yves
Michel Fotso et sa mise en route presque immédiate pour Yaoundé. Sur
l’axe lourd, des passagers à bord de divers bus, reconnaitront une
escorte de deux véhicules du Gso à l’avant, suivis d’une grosse Mercedes
appartenant à l’homme d’affaires, et un autre véhicule du Gso fermant
le cortège.
C’est à 16h30 un cortège de voitures débarque à la direction de la
police judiciaire à Yaoundé. Un pick-up du Groupement spécial des
opérations s’immobilise sur le parking de la Pj. A l’intérieur se
trouvent plusieurs hommes en armes qui descendent aussitôt pour
accueillir une Toyota Corolla immatriculée SN4243 et appartenant à
commissariat spécial de l’aéroport de Douala. Et au bord duquel se
trouvent cinq personnes.
A l’intérieur de la voiture de police, l’on
peut remarquer la présence d’un homme encadré par deux policiers. Il
porte sur tête un châle blanc. Ce qui semble insuffisant pour cacher son
visage que les policiers ne veulent visiblement pas montrer aux badauds
déjà si nombreux à la Pj mais intimidés par le dispositif de sécurité.
Le
temps de sortir Yves Michel Fotso de la voiture et de lui emmitoufler
la tête par le châle et le grand blouson passablement propre, cinq
minutes passe. Le torse baissé, l’ex Adg de la Camair vêtu d’un simple
tee-shirt blanc, d’un pantalon noir et des mocassins de week-end est
conduit à l’intérieur de la Pj. Et où il lui sera signifié, selon des
sources, les faits qui lui sont reprochés.
C’était l’épilogue d’une folle journée qui avait commencé ce mercredi
en fin de matinée. A Douala. Quand aux environs de 10 h 30, des
éléments de la police arrivent au domicile d’Yves Michel Fotso sis à
Bali en face de l’église baptiste.
Discrets, le délégué régional de
la police pour le Littoral qu’accompagne le chef de service provincial
de la police judiciaire du Littoral demandent à rencontrer le maître
des céans. Et dans le souci d’éviter le grabuge qui avait suivi la
tentative de retrait de ses passeports en novembre dernier, retrait qui
aurait échoué du fait de la forte présence de la presse autour du
domicile du fils Fotso lors de la descente des hommes en tenue, ils sont
fort polis.
Le majordome de la maison signifie aux policiers que
l’ex Adg de la Camair est souffrant. Sur insistance des flics, Yves
Michel Fotso se lève et vient à la rencontre de ces hôtes si peu amènes.
Au terme d’une brève discussion, il est conduit sous bonne escorte au
service provincial de Bonanjo. 0ù les policiers se rendent effectivement
qu’il ne se porte pas très bien. N’empêche que les instructions sont
claires : Yves Michel Fotso doit être amené à Yaoundé. Yves Michel Fotso
s’engouffre de nouveau dans une Corolla Toyota réquisitionnée à
l’aéroport de Douala. La voiture est encadrée jusqu’à son arrivée à
Yaoundé par deux équipées du Gso que suit discrètement une Mercedes
noire avec à son bord, l’épouse d’Yves Michel Fotso.
Francky Bertrand Béné