Robert Mouthé Ambassa: «Rdpc: il faut neutraliser les ennemis de l'intérieur»
DOUALA - 05 AOUT 2013
© Souley ONOHIOLO | Le Messager
Quelques jours après la publication par Elections Cameroon des listes des candidats aux élections municipales et législatives du 30 septembre prochain ; lesquelles ont laissé diverses blessures rancœurs au sein du Rdpc, Robert Mouthé Ambassa, membre du Comité central, qui s’est beaucoup investi sur le terrain, propose des solutions à l’apaisement des tensions.
26 partis politiques en course pour 180 sièges et 35 formations politiques en lice pour environ 10500 conseillers municipaux. Quelle analyse faites-vous de l’intérêt accordé par les partis politiques à ces élections ?
Il s’agit d’élections de proximité. Tous les partis politiques devraient en principe y prendre part. Je constate pour le déplorer que seules 35 formations politiques sur près de 280 vont y prendre part. A quoi servent les autres ? Sur 360 communes, le Rdpc sera seul dans pas moins de 220, c'est à dire 61%. Le Rdpc part déjà en grand vainqueur aux municipales avant même le scrutin du 30 septembre 2013. Au niveau des législatives, nous avons déjà avant le scrutin 45 députés sur 180 où le Rdpc n'a pas d'adversaires. C’est à dire 25%. En valeur absolue, ces élections sont les plus courues avec 35 partis politiques, par rapport à la présidentielle qui n'avait que 23 partis. En valeur relative, 35 partis sur 280 légalisés représentent 12.5% du taux de participation. Ce qui est très faible et veut dire que les partis dans leur globalité n'accordent pas assez d'intérêt aux élections. Dans cinq ans, le prochain Sénat sera toujours majoritairement Rdpc, dans la mesure où ce sont les conseillers élus le 30 septembre prochain qui seront à la manœuvre.
Pour le Cameroun, ce seront les premières élections à caractère biométriques. Avec les moyens et les infrastructures à peine compétitifs dont dispose Elecam, pensez-vous que cet organe en charge de l’organisation des élections, va faire mieux que lors des précédentes élections au Cameroun ?
Il faudra s'attendre à de nouvelles insuffisances d'Elécam qui manque de personnel dédié. Il devra s'appuyer sur des personnels d'autres structures, avec ce que cela comporte comme interfaces à gérer. Ce sera difficilement contrôlable pour Elécam qui portera au final le chapeau. A cela, il faut ajouter le fait que les populations ne vont pas retirer leurs carte de vote et pour anticiper sur les limites de la biométrie, il sera admis de voter avec les Cartes nationales d'identités. Si vous vous souvenez, j'avais déjà annoncé il y a plus d'un an, que la biométrie ne sera pas prête dans un laps de temps aussi court et qu'il valait mieux laisser voter avec la carte nationale d'identité. Aujourd'hui c'est chose faite et je m'en réjouis. Vous savez que le vote avec la carte d'identité a ses avatars et irrégularités qui vont sûrement refaire surface. Chaque solution a des insuffisances qui s'imposent à tous.
Quelle lecture faites-vous du casting qui a conduit à l’investiture des candidats de votre parti ?
La circulaire du président national du Rdpc interdit de se présenter aux deux
élections du 30 septembre 2013. Je pense que ce type de cas n'existe pas. Vous savez, en matière de casting, dès que les prétendants sont investis, ils deviennent les candidats officiels du parti et en relisant les statistiques faits plus haut, il apparaît clairement que le Rdpc fera un grand coup politique au soir du 30 septembre 2013.
Vous avez été très actif dans le grand Mbam dans l’animation du Rdpc, mais votre point de vue n’a pas été pris en compte dans la sélection des candidats dans ce département. Comment avez-vous pris cela ?
Politiquement, il y a des camarades qui sont un, voire deux crans au dessus de moi. Leurs avis sont prioritaires. Ce feu qui s'observe par des guerres internes, ces batailles souterraines de leadership, ces actes d'antijeu et même ces tacles irréguliers se font partout et dans tous les départements du pays. Le Mbam n'étant pas en reste. Il faut comprendre qu'il y a une logique politique qui est en vigueur depuis longtemps et qui empêche toute forme d'évolution. Les adeptes de cette logique sont encore très nombreux et plus que ceux qui essaient apporter des changements pour s'arrimer aux évolutions et la modernité. Même le président national en souffre souvent. Souvenez-vous quand il demanda aux militants de se préparer à une éventuelle concurrence: Il y en a qui étaient contre et ils ont même marché ! Lors du dernier congrès de septembre 2011, il a demandé aux femmes et aux jeunes d'oser. Combien essaient d'oser, les méchants loups sont là, aux aguets, prêts à bondir sur tous ceux qui auront des velléités d'oser. Les choses évoluent néanmoins, mais très lentement dans la mesure où les caciques sont encore omniprésents.
Est-ce à dire que dans le Mbam, ils ont eu raison de vous ?
Vous avez parcouru la circulaire du président national qui imposait des critères de sélection justes pour les militants, mais les états-majors et noyaux durs l'ont contournée en mettant sur le terrain un dispositif qui a neutralisé cette circulaire. Les présidents départementaux étaient originaires d'autres départements, mais les présidents communaux, les coordonnateurs et surtout les chargés de missions étant originaires du département, ont permis aux noyaux durs d'atteindre leurs objectifs en mettant en place leurs listes préétablies. Il faut noter que chaque ministre en fonction est le "chef politique" de son département et quand ils sont plusieurs, ils se partagent le département en arrondissements. Le secrétariat du Comité central va difficilement contre l'avis de ces personnalités. Les militants qui s'entendent bien avec leurs ministres respectifs évoluent à l'aise. Ceux qui ont des quiproquos avec eux attendront le jour où ces derniers ne seront plus en place pour émerger ou faire évoluer les choses. Voyez par exemple le patriarche J.B. Beleoken. Quand il était aux affaires, il avait sponsorisé son ami Batibonak pour être député. Maintenant qu'il n'est plus aux affaires, ce dernier a été viré comme un malpropre alors qu'il avait un bilan identique à ses deux ex-colistiers maintenus. Après les ministres, il y a les deuxièmes couteaux, qui sont d'anciens ministres et responsables politiques à un niveau élevé du parti qui ont aussi leur mot à dire. La guéguerre de leadership et autres font partie du quotidien en politique. Pour moi, c'est plutôt l'appréciation de ce que je fais par la hiérarchie du parti qui est importante.
Comment baisser les tensions actuelles au Rdpc ? Existe-t-il des pistes permettant de rallumer la flamme de l’entente ? Quel type de discours de campagne doit être élaboré pour consolider le bétail électoral aujourd’hui éparpillé ?
C'est une question difficile. Le président national seul peut calmer les militants. Comment, je ne sais vraiment pas. Nous attendons de voir les orientations qui seront données. Toutefois comme je l’ai dit, le parti s'est approprié les listes. Les militants disciplinés doivent aussi se les approprier et privilégier l'intérêt du parti. Les militants non investis doivent comprendre que tout le monde ne peut pas être investi. Ceux qui iront à l'Assemblée Nationale et dans les Communes ne pourront plus postuler pour les prochaines Régionales par exemple.
Entretien avec Souley ONOHIOLO
© Souley ONOHIOLO | Le Messager
Quelques jours après la publication par Elections Cameroon des listes des candidats aux élections municipales et législatives du 30 septembre prochain ; lesquelles ont laissé diverses blessures rancœurs au sein du Rdpc, Robert Mouthé Ambassa, membre du Comité central, qui s’est beaucoup investi sur le terrain, propose des solutions à l’apaisement des tensions.
26 partis politiques en course pour 180 sièges et 35 formations politiques en lice pour environ 10500 conseillers municipaux. Quelle analyse faites-vous de l’intérêt accordé par les partis politiques à ces élections ?
Il s’agit d’élections de proximité. Tous les partis politiques devraient en principe y prendre part. Je constate pour le déplorer que seules 35 formations politiques sur près de 280 vont y prendre part. A quoi servent les autres ? Sur 360 communes, le Rdpc sera seul dans pas moins de 220, c'est à dire 61%. Le Rdpc part déjà en grand vainqueur aux municipales avant même le scrutin du 30 septembre 2013. Au niveau des législatives, nous avons déjà avant le scrutin 45 députés sur 180 où le Rdpc n'a pas d'adversaires. C’est à dire 25%. En valeur absolue, ces élections sont les plus courues avec 35 partis politiques, par rapport à la présidentielle qui n'avait que 23 partis. En valeur relative, 35 partis sur 280 légalisés représentent 12.5% du taux de participation. Ce qui est très faible et veut dire que les partis dans leur globalité n'accordent pas assez d'intérêt aux élections. Dans cinq ans, le prochain Sénat sera toujours majoritairement Rdpc, dans la mesure où ce sont les conseillers élus le 30 septembre prochain qui seront à la manœuvre.
Pour le Cameroun, ce seront les premières élections à caractère biométriques. Avec les moyens et les infrastructures à peine compétitifs dont dispose Elecam, pensez-vous que cet organe en charge de l’organisation des élections, va faire mieux que lors des précédentes élections au Cameroun ?
Il faudra s'attendre à de nouvelles insuffisances d'Elécam qui manque de personnel dédié. Il devra s'appuyer sur des personnels d'autres structures, avec ce que cela comporte comme interfaces à gérer. Ce sera difficilement contrôlable pour Elécam qui portera au final le chapeau. A cela, il faut ajouter le fait que les populations ne vont pas retirer leurs carte de vote et pour anticiper sur les limites de la biométrie, il sera admis de voter avec les Cartes nationales d'identités. Si vous vous souvenez, j'avais déjà annoncé il y a plus d'un an, que la biométrie ne sera pas prête dans un laps de temps aussi court et qu'il valait mieux laisser voter avec la carte nationale d'identité. Aujourd'hui c'est chose faite et je m'en réjouis. Vous savez que le vote avec la carte d'identité a ses avatars et irrégularités qui vont sûrement refaire surface. Chaque solution a des insuffisances qui s'imposent à tous.
Quelle lecture faites-vous du casting qui a conduit à l’investiture des candidats de votre parti ?
La circulaire du président national du Rdpc interdit de se présenter aux deux
élections du 30 septembre 2013. Je pense que ce type de cas n'existe pas. Vous savez, en matière de casting, dès que les prétendants sont investis, ils deviennent les candidats officiels du parti et en relisant les statistiques faits plus haut, il apparaît clairement que le Rdpc fera un grand coup politique au soir du 30 septembre 2013.
Vous avez été très actif dans le grand Mbam dans l’animation du Rdpc, mais votre point de vue n’a pas été pris en compte dans la sélection des candidats dans ce département. Comment avez-vous pris cela ?
Politiquement, il y a des camarades qui sont un, voire deux crans au dessus de moi. Leurs avis sont prioritaires. Ce feu qui s'observe par des guerres internes, ces batailles souterraines de leadership, ces actes d'antijeu et même ces tacles irréguliers se font partout et dans tous les départements du pays. Le Mbam n'étant pas en reste. Il faut comprendre qu'il y a une logique politique qui est en vigueur depuis longtemps et qui empêche toute forme d'évolution. Les adeptes de cette logique sont encore très nombreux et plus que ceux qui essaient apporter des changements pour s'arrimer aux évolutions et la modernité. Même le président national en souffre souvent. Souvenez-vous quand il demanda aux militants de se préparer à une éventuelle concurrence: Il y en a qui étaient contre et ils ont même marché ! Lors du dernier congrès de septembre 2011, il a demandé aux femmes et aux jeunes d'oser. Combien essaient d'oser, les méchants loups sont là, aux aguets, prêts à bondir sur tous ceux qui auront des velléités d'oser. Les choses évoluent néanmoins, mais très lentement dans la mesure où les caciques sont encore omniprésents.
Est-ce à dire que dans le Mbam, ils ont eu raison de vous ?
Vous avez parcouru la circulaire du président national qui imposait des critères de sélection justes pour les militants, mais les états-majors et noyaux durs l'ont contournée en mettant sur le terrain un dispositif qui a neutralisé cette circulaire. Les présidents départementaux étaient originaires d'autres départements, mais les présidents communaux, les coordonnateurs et surtout les chargés de missions étant originaires du département, ont permis aux noyaux durs d'atteindre leurs objectifs en mettant en place leurs listes préétablies. Il faut noter que chaque ministre en fonction est le "chef politique" de son département et quand ils sont plusieurs, ils se partagent le département en arrondissements. Le secrétariat du Comité central va difficilement contre l'avis de ces personnalités. Les militants qui s'entendent bien avec leurs ministres respectifs évoluent à l'aise. Ceux qui ont des quiproquos avec eux attendront le jour où ces derniers ne seront plus en place pour émerger ou faire évoluer les choses. Voyez par exemple le patriarche J.B. Beleoken. Quand il était aux affaires, il avait sponsorisé son ami Batibonak pour être député. Maintenant qu'il n'est plus aux affaires, ce dernier a été viré comme un malpropre alors qu'il avait un bilan identique à ses deux ex-colistiers maintenus. Après les ministres, il y a les deuxièmes couteaux, qui sont d'anciens ministres et responsables politiques à un niveau élevé du parti qui ont aussi leur mot à dire. La guéguerre de leadership et autres font partie du quotidien en politique. Pour moi, c'est plutôt l'appréciation de ce que je fais par la hiérarchie du parti qui est importante.
Comment baisser les tensions actuelles au Rdpc ? Existe-t-il des pistes permettant de rallumer la flamme de l’entente ? Quel type de discours de campagne doit être élaboré pour consolider le bétail électoral aujourd’hui éparpillé ?
C'est une question difficile. Le président national seul peut calmer les militants. Comment, je ne sais vraiment pas. Nous attendons de voir les orientations qui seront données. Toutefois comme je l’ai dit, le parti s'est approprié les listes. Les militants disciplinés doivent aussi se les approprier et privilégier l'intérêt du parti. Les militants non investis doivent comprendre que tout le monde ne peut pas être investi. Ceux qui iront à l'Assemblée Nationale et dans les Communes ne pourront plus postuler pour les prochaines Régionales par exemple.
Entretien avec Souley ONOHIOLO