Présentés au Président de la République au dernier comice agropastoral d’Ebolowa, les tracteurs montés par les Indiens ont pris une trajectoire nébuleuse. Entre inertie administrative et sabotage gouvernemental. Révélations autour des tracteurs abandonnés à Ebolowa !L’affaire des tracteurs d’Ebolowa est un véritable serpent de mer entretenu par le gouvernement camerounais, notamment l’ancien Vice-Premier Ministre, Ministre de l’Agriculture et du développement rural, devenu le 10 décembre 2011, le Secrétaire général du parti au pouvoir.
En effet, c’est depuis 2009 que l’implantation effective de l’usine de montage des tracteurs au Cameroun avait démarré, notamment sur un financement d’Eximbank de la république indienne, sous la négociation soutenue du Ministère de l’économie, de la planification et de l’aménagement du territoire (MINEPAT) et la supervision du Premier Ministre du Cameroun. Et c’est d’ailleurs ce dernier, Chief Thomas Ephraïm Inoni, qui choisira le site d’Ebolowa pour abriter cette usine, située non loin de l’héliport de cette même ville.
Aussi, à la faveur du comice agropastoral d’Ebolowa tenu en mi-janvier 2011, des tracteurs avaient-ils été mis en exergue à l’attention, non seulement du Chef de l’Etat qui suivait l’évolution de ce projet, mais également de tous les visiteurs présents au village du comice. Toutefois, aussitôt le comice achevé, Louis-Paul Motazé, alors Ministre de l’économie, de la planification et de l’aménagement du territoire saisira par lettre N°1249/MINEPAT/SG/DGPAT du 13 septembre 2011 le Vice-Premier Ministre, Ministre de l’Agriculture et du développement rural en ces termes : « Dans le cadre de la densification du Comice agropastoral d’Ebolowa, des tracteurs et équipements ont été montés par la partie indienne et déclarés en bon état de fonctionnement par le CENEEMA.
Actuellement, 291 tracteurs, 25 moissonneuses-batteuses, 100 semoirs, 150 charrues à disque, 20 motopompes et autres outils sont disponibles en attendant l’assemblage du reliquat dès le démarrage de la chaîne de montage. A cet effet, j’ai l’honneur de vous informer que ces tracteurs sont à rétrocéder à votre département ministériel en vue de leur affectation aux producteurs susceptibles de booster la production de riz et de maïs conformément aux termes de la Convention signée entre les Gouvernements Camerounais et Indien. Il me plait toutefois de vous rappeler que cette cession devrait tenir compte des critères d’éligibilité définis dans le document du Projet d’Amélioration de la Production de maïs et de riz à travers la Mécanisation Agricole (PAPMA) élaboré par le Secrétariat Technique placé sous la coordination du Directeur des Etudes, des programmes et de la coopération de votre département ministériel… ». Et de conclure : « Aussi solliciterais-je que vous me communiquiez votre disponibilité, de préférence courant septembre pour que nous procédions à la rétrocession solennelle desdits équipements ». La réaction du Vice-Premier Ministre, Ministre de l’Agriculture et du développement rural se fera attendre. Mieux, ce dernier ne saisira pas cette doléance signifiant expressément la réappropriation par son ministère des équipements cités, car le Ministère de l’économie, de la planification et de l’aménagement du territoire était jusque-là considéré comme le gardien des effets d’autrui. D’où cette réaction tardive du Vice-Premier Ministre, Ministre de l’Agriculture et du développement rural qui n’interviendra que le 20 octobre 2011, c’est-à-dire un peu plus d’un mois après avoir été saisi en ces termes : « Dans le cadre de l’accélération de la mise en œuvre du projet d’amélioration de la production de maïs et de riz par une plus rapide mécanisation agricole conformément aux hautes directives du Premier Ministre, Chef du gouvernement, j’ai l’honneur de vous faire tenir ci-joint copie de la Décision portant création d’un Comité interministériel de suivi de la gestion des tracteurs montés par la partie indienne dans l’usine d’Ebolowa ». Une sorte de fuite en avant, sans faire face à la question principale, notamment celle de la réappropriation par son département ministériel des tracteurs en souffrance à Ebolowa. Toutefois, par décision N°1100/MINADER/CAB du 2 novembre 2011 le Vice-Premier Ministre, Ministre de l’Agriculture et du développement rural va alors créer un comité de sélection et de suivi de la gestion des tracteurs Indiens ; un comité notamment chargé de la coordination des activités de réception des tracteurs et équipements indiens, de la sélection des bénéficiaires, et du suivi de la gestion de ces équipements. Mais au-delà de cette décision, ce comité n’avancera nullement pas dans les travaux de réappropriation des tracteurs indiens en souffrance à Ebolowa jusqu’au remaniement ministériel du 10 décembre 2011 ayant vu le départ du Vice-Premier Ministre, Ministre de l’Agriculture et du développement rural, Jean Nkueté, au Secrétariat général du RDPC, laissant le dossier des tracteurs entre les mains d’Essimi Menyé, un autre « artiste » à la tête de ce ministère.
Au total, les tracteurs de Kribi ont été expressément délaissés par le Vice-Premier Ministre, Ministre de l’Agriculture et du développement rural, qui les voulait certainement pour un autre site. Un site qu’il n’a malheureusement pas rendu public, mettant au goût du jour des rivalités internes au sein du gouvernement. Sur fond d’inertie et de sabotage gouvernemental. Comme quoi, le Cameroun c’est le Cameroun !