Rétrospective: Ils ont écrit les pages (noires) du football camerounais en 2011

DOUALA - 05 Janvier 2012
© Christian TCHAPMI | Le Messager

Entre incompréhension, guerre de leadership, incompétence et gabegie, chacun d’eux a participé à faire de l’année écoulée une saison blanche et sèche pour le sport-roi.

1.- Michel Zoah: un saint dans une tanière maudite


Michel Zoah
Photo: © BZ/Cameroon-Info.Net
Il savait peut-être sa chute proche puisque rares sont ceux de ses prédécesseurs qui ont survécu au syndrome Lions indomptables. Débauché des bureaux feutrés de la faculté de Médecine et des Sciences biomédicales (Fmsb) de Yaoundé, ce pédagogue avait pour mission d’appliquer au sport-roi une thérapie qui reposait sur l’urgence de redonner un nouveau souffle à une équipe nationale malade. Après une coupe d’Afrique des nations foireuse (Angola 2010) doublée d’un Mondial des plus décevants en Afrique du Sud, la seule bouée de sauvetage de Michel Zoah restait la qualification de l’équipe nationale à la Can 2012.

Mais là encore, l’homme a essuyé un échec cuisant. 2011 a été l’année de toutes les déconfitures pour cet ancien élève du lycée général Leclerc de Yaoundé. Entre copinage avec la fédération camerounaise de football et plaidoyer pour une tanière plus calme et plus sereine, le pauvre Michel est devenu, sans le vouloir, l’avocat de certains joueurs phares de l’équipe.

N’a-t-il pas devant les élus du peuple, tenter d’apporter un éclairage sur les accusations de Samuel Eto’o qui disait n’avoir jamais perçu ses primes de matches depuis trois ans ? Pis, c’est encore lui qui a plusieurs fois essuyé les tirs nourris des députés qui lui reprochaient à la fois d’être complice du déclin de l’équipe fanion et d’avoir dévoilé sa proximité régulièrement entretenue avec les responsables fédéraux. Du coup, le saint d’hier traînait déjà derrière lui l’odeur d’un démiurge en mal de confiance. Pendant que le peuple attendait impatiemment de voir les Lions renouer avec la victoire, Javier Clémente a plutôt prolongé la chute de ses poulains dans les profondeurs abyssales.


2.- Iya Mohammed: le footoir des fauves


Iya Mohammed
Photo: © Archives
Ce n’est pas un fan des sorties médiatiques. Rares sont les fois où on l’a vu sur des plateaux télévisés ou faisant la tête d’affiche d’un journal pour une interview. Muet comme une carpe depuis la déconfiture des Lions indomptables en Afrique du Sud, d’aucuns mettraient leurs têtes à couper pour soutenir qu’Iya Mohamed ne démissionnera (jamais) de ses fonctions de président de la fécafoot. Connu pour son flegme légendaire, celui qu’on surnomme l’émir de Tsinga a pourtant fait tant de mal au football camerounais.

En particulier en 2011 où l’équipe fanion est passée à côté de la qualification pour la Can 2012 que Co-organisent le Gabon et la Guinée Equatoriale. Les griefs qui lui sont reprochés tournent autour des querelles intestines, les intérêts égoïstes, la corruption, le favoritisme, les trafics d’influence, et la mafia entretenue par ses collaborateurs et ceux du ministère des Sports et de l’éducation physique (Minsep) autour de cette équipe. Certains diraient qu’il n’a fait que ça depuis son avènement en 1998. En fait, depuis qu’il trône à la Fécafoot, l’ex-dg de Selcam et chef d’agence de la Bicic (ancêtre de la Bicec) s’est surtout distingué par ses démêlés récurrents avec sa tutelle, le ministère des Sports où il a été à l’origine d’une demi-dizaine de départs.

En dehors de Etamé Massoma et Michel Zoah, avec qui il a eu des relations apaisées, le président de la Fécafoot a«défié» Mbarga Mboa, Augustin Edjoa et dans une certaine mesure Bidoung Mpkwatt. Ses multiples convocations vraies ou supposées à la direction régionale de la police judiciaire ou encore à la présidence de la République en 2011 n’ont fait qu’attiser le feu du désamour depuis plus de dix ans entre lui et les férus du football camerounais.


3.- Javier Clémente: l’incarnation de l’impuissance


Javier Clemente
Photo: © Archives
Il a connu le même destin que son employeur, Michel Zoah. Le technicien basque, qui a débarqué au Cameroun le 28 août 2010 pour la signature de son contrat de travail, avait été choisi par les pouvoirs publics précisait-on, «à la suite des propositions de la fédération camerounaise de football relatives au recrutement de l’encadrement technique des Lions indomptables». Avec au palmarès un titre de champion d’Espagne décroché en 1969, le successeur de Paul Le Guen avait comme argument en béton sa notoriété dans les milieux du football, notamment sa carrière d’entraîneur et même celle de joueur. Pour couronner le tout, on disait de lui qu’il était rigoureux et charismatique dans le travail, malgré cette réputation de«raciste» outre-Atlantique qu’il traînait partout où il passait. Il fallait donc prouver que ce chapelet d’éloges et cette longue expérience servirait véritablement d’antidote aux maux des Lions.

Le premier test du coach basque fut concluant: une victoire (3-1) face à l’île Maurice à l’issue du premier match comptant pour les éliminatoires de la Can 2012. Ce coup de maître lui valut tous les surnoms «l’homme de la situation», «le chantre de la reconstruction de l’équipe nationale»… Mais le match nul (1-1) et insipide enregistré face à la Rd Congo lors de la deuxième journée à Garoua a laissé le doute et la confusion dans les esprits des fans. Pire, la défaite concédée le 26 mars 2011 face au Sénégal à Dakar est venue jeter le discrédit sur cet avenir qu’on disait déjà radieux pour les Lions. La goutte d’eau qui vient déborder le vase est ce match nul (0-0) face au Sénégal à Yaoundé. Une contre performance qui a malheureusement consacré l’élimination du Cameroun à la Can 2012, puisqu’en dépit de la déculottée (5-0) administrée à l’Ile Maurice et la laborieuse victoire (3-2) face au Congo vendredi dernier, les Lions étaient déjà déclarés hors course pour le rendez-vous de 2012. Le sorcier blanc que l’on présentait comme le messie ne savait donc pas faire de miracle. Inefficace et impuissant devant la superstar Samuel Eto’o, il a conduit l’équipe du Cameroun vers le précipice. Il est remercié en novembre 2011.


4.- Samuel: overdose d’Eto’o dépendance?


Samuel Eto'o
Photo: © Archives
Le 06 juin 2011 à Mfandena, il a tué les espoirs des Lions indomptables en manquant un penalty. Les Lions sont contraints au partage 0-0. Comble de malheur, l'ancien attaquant de l'Inter de Milan s'oppose au remplacement d’Eric Maxime Choupo Moting et défie ainsi l'autorité de Javier Clémente. Certains politiques réclament qu’on lui retire le brassard de capitaine pour le remettre à l’ordre. Pour se défendre, le Eto’o va répondre à une interview sur le plateau de STV2 le 12 juin 2011. Et là, il va révéler qu’il ne touche plus ses primes de match, ni ses remboursements de frais de transports depuis trois ans. Une déclaration qui va faire des vagues, non sans emporter le directeur administratif des équipes nationales (Daenf), soupçonné de toucher à sa place lesdites primes. Entre temps, Eto'o a refait parler de lui. Le goléador s'engage pour trois saisons avec Anzhi Makachkala, un club russe jusque là inconnu du grand public. Malgré le niveau relativement bas du football dans cette province du Daguestan, Eto'o décroche au passage le plus gros salaire jamais payé à un footballeur: 26 millions d'euros. Le jackpot.

Novembre 2011. Les Lions sont au Maroc à la faveur de la LG Cup. Les joueurs présents réclament le paiement de la prime de présence et conditionnent leur départ pour Alger par l'émargement des 1500 euros par personne. La fécafoot joue les petits dieux et balaie les revendications d’Eto'o et ses coéquipiers du revers de la main. Mais au final, le boycott est confirmé et le match est annulé. La cible est toute trouvée: Samuel Eto'o. Le capitaine des Lions est accusé d'avoir incité ses paires au boycott.

Après sa comparution devant la commission de discipline de la fécafoot, Eto'o est lourdement sanctionné. 15 matches de suspension. La rue gronde, les fans sont aux abois, la presse crie au scandale. Les anciennes gloires montent au créneau et prennent fait et cause pour le meilleur footballeur camerounais en activité. Les politiques s'en mêlent. Outré, Eto'o va étaler en mondovision l’incompétence de la Fécafoot. Sans état d’âme, il jette Iya Mohamed en pâture. La guerre est ouverte.





06/01/2012
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