Résolution de la crise post-electorale : Les dangers de l’option militaire
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Résolution de la crise post-electorale : Les dangers de l’option militaire(L'Inter 23/12/2010)
La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) tient un sommet extraordinaire à Abuja, la capitale économique du Nigeria, demain. Selon des indiscrétions, il s’agirait pour la Cedeao d’examiner les modalités de mise en place d’une force africaine en vue d’une intervention militaire en Côte d’Ivoire. A l’instar de l’Ecomog qui a débarqué en Sierra Leone en février 1998 pour chasser du pouvoir le putschiste Johnny Paul Koroma, qui avait renversé le président Ahmad Tejan Kabbah. A moins de 48 heures de ce sommet de la Cedeao, Guillaume Soro a exhorté les futurs hôtes du président nigérian à aller dans le sens d’une opération militaire pour contraindre le président Laurent Gbagbo à céder le pouvoir à son rival Alassane Ouattara. « Après toute la pression internationale et les sanctions qui n’ont pas produit d’effet sur M. Gbagbo, il est évident qu’il n’y a qu’une solution qui reste, celle de la force », a-t-il déclaré hier à la chaîne française i-Télé, au lendemain du message à la nation du président Gbagbo. Pour le Premier ministre d’Alassane Ouattara, le Conseil de sécurité, l’Union africaine et la Cedeao devraient « envisager la force ». Les appels à quitter la Côte d’Ivoire lancés ces temps-ci par les chancelleries occidentales à leurs ressortissants s’inscrivent-ils dans la préparation de cette option militaire ? Ce schéma, il faut le dire tout net, pourrait être lourd de conséquences. « L’option militaire, c’est le scénario catastrophe », avertit à juste titre un expert, cité par l’Afp. Le recours à la force peut en effet se révéler une opération à haut risque, à plus d’un titre.
D’abord, l’intervention militaire peut être préjudiciable aux ressortissants des pays africains devant constituer cette force et qui vivent en Côte d’Ivoire. Ils pourraient subir le retour du bâton si les militaires issus de leurs pays sont déployés en Côte d’Ivoire pour y semer la mort et la désolation. Et la récente attaque de l’ambassade du Nigeria est un signal qui situe sur l’éventualité de représailles en cas d’agression de cette force africaine. Par ailleurs, une offensive militaire va nécessairement occasionner d’importantes pertes en vies humaines. Les populations civiles en seront les plus grandes perdantes. La situation en Côte d’Ivoire est si délicate qu’une intervention militaire pourrait conduire à une implosion générale. Avec son corollaire de morts, de crimes sexuels et autres violations graves des droits de l’homme, dont les populations pourraient être victimes sans distinction d’appartenance politique. Exactions que peuvent commettre également les forces extérieures appelées au secours, comme ce fut le cas au Libéria où l’Ecomog a marqué les esprits par ses dérives à la faveur de son intervention militaire. Pour toutes ces raisons, il serait sage de donner une chance à une résolution pacifique de cette crise.
Assane NIADA
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