Le lac municipal de Yaoundé fait désormais plus peur que plaisir. En un mois, trois cadavres y ont été repêchés. Certains habitants de la capitale camerounaise demandent à ce que le lac soit vidé. Les autorités ont décidé de le réhabiliter et de le sécuriser.
On a beau être habitant de la capitale camerounaise et passer par le lac municipal tous les jours, il procure toujours un petit frisson. La couleur de l’eau – aussi sombre que sa réputation – oblige toujours des commentaires. En passant par ce lac, dans le taxi qui nous conduit, Alexandre le taximan lance : "Voici le fameux lac ! ". Il est en effet "fameux", ce lac. De triste réputation, il est connu pour avoir englouti plusieurs vies humaines.
Ghislain, jeune fonctionnaire fait remarquer : "Je me demande pourquoi, chaque fois que les gens veulent se suicider, ils viennent ici. Ce lac est maudit", dit-il. "La preuve, il y a plusieurs lacs dans la ville, mais c’est celui-ci que les gens choisissent", argumente Ghislain. Comme lui, beaucoup d’habitants de la capitale camerounaise se posent des questions sur ce lac. Surtout après les terribles mois de février et mars 2012 au cours desquels trois cadavres y ont été repêchés.
Le lac de la mort
Le 28 février 2012, le cadavre d’Alain Abena, 44 ans, fonctionnaire au ministère des Petites et moyennes entreprises a été retiré de ce lac par une équipe de sapeurs pompiers, de policiers, de gendarmes et de piroguiers. Il s’y est visiblement suicidé. Deux jours avant, son véhicule avait été retrouvé au bord du lac avec ses babouches.
La série macabre se poursuit le 20 mars quand le corps sans vie de Marie Mpéllé, une dame de 45 ans, est sorti du lac par des éboueurs. Le 26 mars, un troisième corps, celui d’un jeune d’une vingtaine d’années, est retrouvé l’œil gauche crevé, le visage tuméfié, le corps mutilé et en début de décomposition. Du coup, la psychose s’empare de la ville de Yaoundé.
Réhabiliter le lac
Depuis le 29 mars, des travaux ont commencé dans le but de réhabiliter le lac. Des travaux de terrassement, de forage et enfin de vidage de cette étendue d’eau d’environ huit mètres de profondeur. "Nous allons curer le lac et le renflouer plus tard de manière à évacuer tous les déchets contenus dans le lac et permettre d’accroitre la visibilité de l’eau et du contenu du lac", explique le chef de projet avec un air d’espoir.
En attendant la fin des travaux, le lac continue de faire peur. Et, à Yaoundé, on espère qu’aucun autre Camerounais n’aura eu le temps d’y laisser la vie. "Le délégué du gouvernement (patron des maires de la ville, Ndlr) a demandé au délégué général à la sûreté nationale (patron de la police, ndlr) de renforcer la sécurité autour du lac avec des unités de police pour dissuader les criminels d’y opérer", indique Bessala. De quoi ramener provisoirement la sécurité jusqu’à ce que le lac soit nettoyé et moins invitant pour des suicidaires.