La nébuleuse secte djihadiste Boko Haram a frappé très fort dimanche matin à Kolofata, dans la région de l’Extrême-Nord.
Kolofata, c’est le fief de l’un des hommes forts du Renouveau : Amadou
Ali, actuel vice premier ministre, chargé des relations avec le
parlement. Un ancien ministre qui, par le passé a coiffé la défense, la
justice. Celui-là même qui déclenche l’Opération Epervier en 2008 avec
toute la froideur et la rigueur qui caractérisait cette opération à ses
débuts. C’est sa concession qui a été visée dimanche matin à Kolofata,
tuant une quinzaine de personnes, dont des gendarmes de faction ;
enlevant d’autres dont…son épouse, sa belle-sœur, le lamido-maire de la
localité.
Boko Haram a choisi la veille de la fête de fin de Ramadam pour frapper les esprits et rappeler à la conscience collective que les mesures guerrières prises au Cameroun ne sont pas de nature à intimider ses éléments convaincus de la « justesse » de leur lutte. Laquelle ? Même si Mme Ali et les autres personnes qui ont connu ce raid terroriste ont été remises en libertés quelques heures plus tard ce qui reste à confirmer il n’en demeure pas moins que l’histoire retiendra bien ce qui s’est passé dimanche matin à Kolofata.
Un raid advenu quelques jours après un autre perpétré à Mora, fief du président de l’Assemblée nationale, Cavaye Yéguié Djibril. Là, parmi les personnes kidnappées figure un filleul du Pan qui porte d’ailleurs son nom. Ce dernier et ses compagnons demeurent en captivité comme du reste la dizaine d’ouvriers chinois enlevés dans un chantier public dans la même région il y a quelques semaines.
Qu’est-ce qui fait donc la force de Boko Haram dans un pays de près de 150 millions d’habitants comme le Nigeria pour qu’il puisse enlever plus de 200 lycéennes de leur internat et de les garder loin de la vigilance des services de renseignement de la police et de l’armée nigérianes ? Boko Haram arrive ainsi à garder ses otages pendant des jours, des semaines et des mois jusqu’à présent sans susciter le moindre soupçon des voisins. Sauf à nous convaincre que Boko Haram dispose d’un territoire à lui, qui demeure inaccessible aux « intrus ». On peut comprendre que cette secte islamiste puisse dissimuler à la vigilance du voisinage quelques personnes comme cela s’est passé avec les membres de la famille Moulin-Fournier, des missionnaires en poste dans la région. Mais plus de 200 lycéennes, on vit là une vraie légende.
Du culot, ces djihadistes en ont sans doute, comme tous les « fous de Dieu » motivés par le fait que, même s’ils meurent au combat, ils entrent droit dans les jardins célestes. Aussi, rien ne les arrête. Illettrés pour la plupart, élevé dans l’indigence et sans éducation, mais bien entraînés par leurs mentors, ils sont capables de tout pour atteindre les objectifs qui leur sont assignés.
Sans suivre le ministre camerounais de la Communication dans ses forfanteries habituelles, il y a lieu de souligner que Boko Haram est aujourd’hui, pour tout Camerounais épris de paix, l’ennemi public N°1, qui nous interpelle tous. Où que nous nous trouvons car, dans les folies meurtrières de ses éléments nous pouvons perdre un parent qui travaille dans cette région pour quelque raison que ce soit. Nous pouvons perdre un ami. Au-delà de ces considérations, la perte d’un être humain, même éloigné doit susciter de la compassion. Car rien ne vaut la vie.
Maintenant, il faut questionner la baraka avec laquelle, malgré les mesures mises sur pied, ces djihadistes réussissent encore leurs coups. Certes, il y a la loi du nombre des assaillants par rapport à la poignée de gendarmes ou militaires sur lesquels ils foncent comme des essaims d’abeilles. Mais ils disposent sans doute des renseignements qui leur permettent de prendre au dépourvu nos forces de défense.
Ils ont aussi la maîtrise du terrain, puisqu’ils arrivent à s’infiltrer dans les différentes localités où ils opèrent par surprise. Ce qui n’est possible qu’avec des complicités locales avérées. Il se dit qu’un sorcier n’accède dans une maison qu’avec des complicités internes. Quels sont donc ces « Juda » qui renseignent et guident l’ennemi ? A qui profiterait la déstabilisation du pays ? On connaît les méthodes des terroristes. C’est souvent des voisins qui partagent notre quotidien et font semblant de partager la douleur des autres alors qu’ils en sont les auteurs.
Autant ils frappent aveuglement, autant ils sont susceptibles d’entraîner l’armée régulière dans le théâtre d’une sale guerre avec tout ce que cela comporte comme confusion et règlements de comptes. Ce qui pourrait conduire au chaos. On sait comment démarre une guerre. Mais sa poursuite demeure une grande inconnue. Alors, tous du côté du devoir pour sauvegarder la paix et l’unité de notre pays.