Les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire sont heureux d’être rattachés au ministère de la Justice depuis 2005. Mais, malgré quelques améliorations, leurs conditions de travail restent pénibles.Ce vendredi matin, une quinzaine de gardiens vont et viennent sur un rayon de dix mètres carrés devant la prison de New Bell. Ils discutent en observant les passants. Ils ont derrière eux une nuit sans sommeil. « J'ai pris le service à mon poste, hier à 17h. Je ne vais en repartir qu’à la même heure ce jour, c'est-à-dire à 17h encore", confie Paul. Il travaille vingt quatre heures d'affilée avant de prendre un repos équivalent. C’est le même régime pour les 215 gardiens de New Bell qui ont la charge de surveiller 2 600 pensionnaires au moins, et, souvent un millier de plus.
Plus d’effectifs
Nono, le délégué régional de l'administration pénitentiaire pour la région du Littoral à Douala apprécie les efforts consentis depuis bientôt dix ans par les pouvoirs publics. Depuis le rattachement de l’administration pénitentiaire au ministère de la Justice en 2005, l’effectif national des gardiens de prison a été renforcé de 1 500 nouvelles recrues, tous grades confondus, permettant de réduire le temps de vigilance des troupes. «Elles sont venues combler le vide laissé dans la période 2000 – 2005 où il n’y a pas eu de recrutement», se réjouit-il.
Dans le chapitre améliorations, «les gardiens de prison bénéficient d’une dotation d’uniforme chaque année notamment, à l’occasion du défilé du 20 mai», explique encore Nono. Des propos confirmés, mais avec réserve, par un surveillant. «Je reçois de temps à autres, soit une paire de bottes, soit un pantalon ou un ceinturon. Mais jamais un kit complet d’uniforme», dénonce-t-il.
Certaines prisons ont par ailleurs été dotées de véhicules mieux adaptés pour le transfèrement des détenus de la prison vers les différentes juridictions. «Avant, les gardiens conduisaient les détenus au tribunal à pied, ou devaient emprunter les voitures de particuliers. Toute chose qui favorisait les évasions», explique le délégué régional.
Mais plus de détenus
Cependant, ces mesures sont loin d'avoir diminué la pénibilité du travail des gardiens. «Les gens peuvent penser que nous nous reposons quand ils ne nous voient pas en train de faire la ronde au mirador ou autour de la clôture. Mais nous sommes toujours sur nos gardes, prêts à intervenir à tout moment lorsqu’un problème survient», fait remarquer Paul.
Selon lui, son travail est encore plus éreintant, à
cause de la surpopulation carcérale. «Les détenus flânent dans la cour
parce qu’ils n’ont pas de cellules pour dormir. Comme on ne peut pas
leur interdire d’y rester, on fait face, chaque jour, à des tentatives
d’évasion», explique t-il. Conséquence, les responsables de la prison
ont décidé d’affecter une équipe à la surveillance des clôtures, pour
mâter les velléités des prisonniers de se faire la belle. Une contrainte
de plus pour les gardiens.
Surtout pour les hommes, les gardiennes étant dispensées de surveillance
dans les miradors ou autour des clôtures à partir de 23 heures jusqu’à 5
heures. «C’est une décision de l’administration à cause de la
vulnérabilité des femmes qui sont peu enclines à tirer pour empêcher les
tentatives d’évasion», justifie un geôlier.
Le salaire des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire a aussi été revu à la hausse par un décret présidentiel du 29 novembre 2010. Un gardien de prison pourra percevoir plus de 110.000 Fcfa par mois en fonction de son ancienneté, bien plus que les 90 000 Fcfa d'aujourd'hui.
« Certaines dispositions du décret, notamment les sanctions infligées aux gardiens pour fautes, commencent à être appliquées.», note un surveillant. Quatre de ses collègues sont écroués, depuis bientôt un mois à la prison de Yaoundé, pour avoir manqué de vigilance pendant l'escorte du détenu Abah Abah, l'ancien ministre des Finances. Une peine qui a suscité le mécontentement de toute la profession. D’autant plus que les revalorisations salariales promises ne sont toujours pas versées, elles.