Ce n’est pas à l’ordre du jour puisque le locataire du palais de l’Unité a décidé de mourir au pouvoir.
«Paul Biya n’ira nulle part, il ne quittera pas le pouvoir, il ne
démissionnera pas de son fauteuil présidentiel, il n’y a que la mort qui
va l’enlever de là… car il sait ce qui l’attend… » Cette déclaration
est de quelqu’un qui connaît bien Paul Biya pour l’avoir côtoyé pendant
de longues années et qui a l’avantage d’être originaire de la région du
Sud comme le chef de l’Etat.
Comme Houphouët-Boigny, Bongo et Eyadema
Félix Houphouët Boigny est mort le 7 décembre 1993 après un règne de 33
ans à la tête de la Côte d’Ivoire. Il n’avait jamais envisagé de quitter
le pouvoir un jour tout comme Omar Bongo Ondimba du Gabon qui est allé
mourir le 8 juin 2009 en Espagne et Eyadema du Togo qui est mort dans
l’avion qui le transportait vers l’Etat d’Israël pour des soins
médicaux. Paul Biya a donc décidé de faire comme ces trois chefs d’Etat
c’est-à-dire mourir au pouvoir. En vérité Paul Biya, volontairement, si
ses forces lui permettent d’y rester, de s’y maintenir. Tout ce que nous
journalistes et autres analystes disent sur sa succession le font rire.
Nous avons déjà dit dans ces colonnes qui va lui succéder, il en a.
Pas de dauphin présumé
René Sadi, Laurent Esso, un anglophone, pour prendre la relève ? Tout
cela n’est que de la poudre aux yeux car Paul Biya ne pense pas à un
quelconque dauphin pour le remplacer. Ce jeu lui permet de connaître ses
proches collaborateurs, leurs ambitions présidentielles et de les
contrer. On sait aujourd’hui pourquoi Atangana Mebara, Polycarpe Abah
Abah et Olanguena Awono sont en prison. Ce n’est point pour
détournements de deniers publics, même s’il est vrai qu’ils se sont
permis quelque liberté avec l’argent public mais c’est surtout parce
qu’ils ont lorgné le fauteuil de Paul Biya qui en est très jaloux.
Ce n’est donc pas une bonne chose pour tous ceux qui gravitent autour de
Paul Biya d’être désignés comme de potentiels dauphins. L’ancien
ministre d’Etat à l’Administration territoriale et à la Décentralisation
Marafa Hamidou Yaya en sait quelque chose lui qui affichait ouvertement
ses ambitions présidentielles. Et le voilà donc en prison pour 25 ans
alors que d’autres qui ont fait pire que lui en matière de détournement
des deniers publics comme le professeur Gervais Mendo Ze sont en
liberté.
Paul Biya n’a donc prévu personne pour sa succession. Et comme il a
prévu de mourir au pouvoir, il se dit que les gens vont se battre,
s’entretuer après sa mort.
Cette situation arrange son entourage et d’autres profiteurs du régime
Cette situation arrange un grand nombre de personnes autour de Paul Biya
qui lui souhaitent très longue vie oubliant qu’il n’est pas éternel.
Ceux-là ne tiennent pas compte du fait que le chef de l’Etat est déjà
âgé de 80 ans. Ce sont des profiteurs du régime qui souhaitent que Paul
Biya reste indéfiniment en poste, pour un nouveau mandat après la fin de
ce quinquennat en 2018.
Tant que Biya est là, eux, ils tirent profit de sa présence en
conservant leurs postes avec les privilèges qui s’y rattachent. Mêmes
ceux qui ne sont plus aux affaires continuent à profiter de certains
avantages du système. Le système, c’est un réseau, un ensemble de
connections qui fait en sorte que sur un simples coup de fil, on peut
trouver un by Savings Wave">emploi
à un enfant dans une société d’Etat, à la Fonction publique ou une
place dans une grande école, faire partir un rejeton pour l’étranger où
il va poursuivre ses études supérieures.
Voir la réalisation des projets structurants
Même s’il est parfois insensible aux critiques et autres moqueries dont
il est l’objet, Paul Biya en souffre surtout quand on dit qu’il a fait
30 ans à la tête de l’Etat sans développer l’économie, les
infrastructures. Pour mettre un terme à tout cela, il a donc mis en
place les projets structurants. Mais quand on regarde de près, il a
favorisé le Sud sa région d’origine qui est appelé à terme de devenir un
pool important de développement après Douala et qui pourrait même avant
elle quand toutes ces infrastructures seront mises en place. N’oublions
pas que le Sud a à lui tout seul :
Le port en eau profonde de Kribi
La centrale à gaz de Kribi à Mpolongo
Les barrages de Memvelé et de Mekin
La route Ouesso (Congo Brazzaville-Kribi)
Le chemin de fer régional de l’Est-Kribi pour évacuer le minerai de fer
Les usines de transformation de minerais à Kribi
Les usines de montage de tracteurs à Ebolowa, etc.
A terme, le Sud sera la région la plus industrialisée du pays grâce à
toutes ces infrastructures. Si Paul Biya le fait, c’est qu’il sait
qu’après son départ, son successeur pourrait ne rien faire pour le Sud
arguant que Paul Biya était là et n’avait rien fait pour sa région
d’origine.
La peur des poursuites et représailles
Paul Biya n’est pas dupe, il sait que ceux qui l’acclament aujourd’hui
vont le couvrir d’injures, le vomir dès qu’il ne sera plus aux affaires.
Il connaît l’homme surtout le politicien pour l’avoir pratiqué depuis
des décennies. Quelque soit la personne qui va remplacer Paul Biya à la
tête de l’Etat, elle aura tendance à fouiller dans son passé et
probablement à lui créer des ennuis, du genre poursuites judiciaires par
exemple.
En dehors de son successeur, beaucoup de gens vont demander des comptes à
Biya : pour les morts de leurs familles depuis qu’il est au pouvoir :
putsch manqué du 6 avril 1984, opération épervier, etc. Peut-être même
des gens chercheront à l’attaquer physiquement ou à s’en prendre à des
membres de sa famille. Devra-t-il aller vivre en exil comme son
prédécesseur Ahmadou Ahidjo après avoir quitté le pouvoir ?
Ayant donc pris tout cela en compte, Paul Biya a donc décidé de mourir
au pouvoir comme Bongo, Houphouët-Boigny, Eyadéma et bien d’autres.