Projet Politique: Marafa H. Yaya veut être Mandela

DOUALA - 09 OCT. 2012
© Rodrigue N. TONGUE | Le Messager

Dans sa dernière lettre ouverte aux Camerounais, l'ex-secrétaire général à la Présidence de la République (Sgpr), ex-Minatd annonce son vœu de quitter un jour les cellules du secrétariat d'Etat à la Défense (Sed) pour le palais d'Etoudi.


Marafa H. Yaya (Archives)
Photo: © Le Jour


On connait l'histoire qui est rentrée dans toutes les anthologies politiques des temps contemporains. Le 11 février 1990, un homme, Nelson Rolihlahia Mandela quitte la prison de Pollsmoor située dans la ville du Cap pour une nouvelle vie: la Liberté. Il y sort porteur d'un discours reposant sur la réconciliation nationale, opposée aux atrocités qu'il a subies consécutivement dans les prisons de Robben Island et de Pollsmoor. Le peuple adhère. A 76 ans Mandela est élu en 1994 président de la République Sud-africaine.

C'est exactement le même dessein que se fait Marafa Hamidou Yaya. Car même si l'ex-Sgpr ne calque pas clairement son projet sur celui de Madiba, on pourrait à la lecture de sa dernière attitude épistolaire soupçonner que l'idée de futur ex-prisonnier (politique) devenu chef de l'Etat l'habite. Du moins le «Prince» de Garoua ne passe pas par quatre chemins pour le dire. «Je m'engage devant vous solennellement à poursuivre mon combat pour qu'advienne au Cameroun la société de confiance porteuse de la paix, de la sécurité de la justice et de la prospérité, à laquelle nous aspirons tous », écrit-il.

Plus loin, il demande le changement immédiat, la rupture avec l'immobilisme et d'avec celui qui incarne maintenant, le Renouveau, non pas dans sept ans ou bien (...) quelle autre échéance mais maintenant. Comme quoi, Marafa Hamidou Yaya se dit prêt à rallier le Palais d'Etoudi à tout moment à condition que les Camerounais lui accordent un soutien. Un simple soutien moral qui «ne favorise ni la violence, ni le trouble a l'ordre public». Plus de place pour des révélations, plus de scandale réveillé. Dans l'une de ses plus courtes sorties épistolaires après son incarcération le 16 avril 2012 et sa première déclaration après sa condamnation à 25 ans de prison par le tribunal de grande instance du Mfoundi, celui que ses supporters appellent «président» se contente d'épingler Paul Biya pour n'avoir pas su ou pu «engager les reformes promises depuis des lustres». Et fort de cela appelle les Camerounais à le conduire au Palais de l'Unité. Seulement, Marafa reste peu loquace sur sa stratégie. Il ne dit pas si le mouvement qui devra le conduire au sommet de l'Etat après un séjour en prison interviendra au bout d'une révolte populaire, d'un raid militaire ou alors s'il attend un coup du sort.


«Combattant»

Tout juste apprend-on qu'il ne souhaite pas d'actes de violence ou de trouble à l'ordre public. Seulement, même le plus malin de ses fidèles aurait du mal à comprendre qu'il invite le peuple à agir maintenant et non en 2018, date de la prochaine élection et qu'il veuille prendre le pouvoir sans violence. Cet appel rejoint les autres déjà faits dans des lettres ouvertes précédentes. Une énième lettre qui permet à l'ex-Minatd de garder la posture de «combattant» et de maintenir son bastion en éveil. Comme le faisait de sa prison, le président Mandela. Sauf que, si le combat de Madiba reposait sur la protection d'une des valeurs les plus promues par l'humanité à savoir l'égalité de tous, de toutes les races, de toutes les ethnies, laquelle lui avait valu une condamnation à vie, celle de Marafa repose sur la volonté de s'approprier le pouvoir que détient celui qu'il désigne comme «actuel Chef d'Etat» (indiquant qu'il n'en a plus pour longtemps) et qui l'a prétendument jeté en prison pour avoir lorgné son fauteuil. Ses supporters diront, certes, volontiers que la finalité de cette quête du pouvoir vise dans le contexte camerounais et des années 2010 à juguler les mêmes tares et avatars d'un système inique vieux de 30 ans que celle de Mandela (les inégalités) au plus fort de l'Apartheid mais le «Prince de Garoua» aura peine à convaincre que sa posture choisie de mouton noire n'est pas une réaction, une réplique consécutive à ses ennuis judiciaires.

Sauf que le «Cameroun étant le Cameroun» comme le disait son plus farouche adversaire politique d'aujourd'hui et patron d'hier, Marafa sait que son pays qui n'a de religion que pour des tours de passe-passe, des pouvoirs «remis cadeaux», des ascensions fulgurantes n'a besoin que d'un petit déclencheur pour changer son visage. Alors lui qui faisait partie des apparatchiks détient-il les codes nucléaires à la base de la bourrasque annoncée? Sait-il exactement où presser pour obtenir l'onde de choc qu'il souhaite? Seul l'avenir nous le dira. Mais l'histoire elle, enseigne que Mandela aura usé de 28 ans de prison, d'ardeur dans la patience, de tolérance, sans ressentiment pour parvenir à ses fins.




09/10/2012
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