Prisons: Le Cameroun a désormais son «Guantanamo»
DOUALA - 29 MAI 2012
© Rodrigue N. TONGUE | Le Messager
Les quartiers généraux de la gendarmerie de Douala et de Yaoundé ont été érigés en prisons secondaires en violation de toutes les conventions et traités internationaux sur la détention des hommes. Démonstration.
Le fonctionnement de l’univers carcéral camerounais va-t-il à rebours ? Alors que sous d’autres cieux la société civile, les intellectuels et même une bonne frange de la classe politique crie haro sur les centres de détention d’exception à l’instar de la prison américaine de "Guantanamo" à Cuba, le régime de Yaoundé juge le moment opportun pour en créer. L’illustration parfaite de cette reculade, est l’arrêté du ministre de la Justice, garde des Sceaux, créant en Yaoundé VIe et Douala Ier « des prisons secondaires ». Ce texte rendu public le vendredi 25 mai 2012, quelques heures avant la déportation de Marafa Hamidou Yaya, Polycarpe Abah Abah et Yves Michel Fotso est accompagné d’un autre arrêté qui fait des régisseurs des prisons centrales de Douala et de Yaoundé les patrons respectifs des nouvelles prisons secondaires. En d’autres termes, que les nouveaux pénitenciers dépendront (du point de vue administratif) des anciens.
Seulement, en dehors de la relation conjoncturelle du timing de la publication des arrêtés de Laurent Esso et le transfèrement brutal de Marafa et de ses compères au secrétariat d’Etat à la défense (Sed) vendredi dernier, la localisation des prisons secondaires montre à suffire que les camps de la gendarmerie nationale de Yaoundé et de Douala sont les nouvelles « prisons Esso ». Car le Sed où sont incarcérés Yves Michel Fotso et Cie depuis vendredi ou encore Ondo Ndong et Titus Edzoa depuis quelques temps déjà ; puis la légion de gendarmerie du Littoral où est détenu Alphonse Siyam Siewé depuis 2006 sont respectivement situés à Yaoundé VIe et Douala Ier. Et donc, par un encadrement judiciaire d’exception que le socio politiste, Mathias Owona Nguini taxe « de maraboutage judiciaire » des prisonniers dits pourtant de droit commun (et non pas des combattants comme les terroristes) seront gardés dans un camp militaire à Yaoundé, 22 ans après la session des libertés qui consacra, au Cameroun, le début de la dynamique du respect des libertés individuelles et collectives.
« Masque de fer »
Un excès que même l’administration américaine sous Georges W. Bush n’a pas atteint, au plus fort de la lutte contre le terrorisme accélérée après les terribles attentats du 11 septembre 2011. Car soucieux de sa Constitution, des Conventions des Nations unies, de la déclaration des Nations unies pour les droits de l’Homme et même des recommandations de la Pastorale des prisons faite par l’Eglise catholique, Georges Bush fils n’avait pas osé, malgré le bilan de 3000 personnes tuées en quelques minutes le 11 septembre 2001, créer sur le sol américain, une prison dont le personnel est issu des rangs de l’armée. Le projet ignoble a pris corps à Cuba reconnu notoirement comme une des plus dures dictatures contemporaines. A contrario, la célèbre prison de ‘Guantamo’ devenue Camp delta pour la détention, dès 2002, de terroristes fait l’objet de vives critiques. Le président Obama a d’ailleurs annoncé sa fermeture décriant « une sauvagerie » humaine.
En revanche, au Cameroun on se fiche certainement mal de cette vision humaniste. Puisque en plein centre urbain à Douala, et en plein quartier résidentiel à Yaoundé se trouvent des centres de détention d’exception peuplés de militaires armés jusqu’aux dents. Pis, si à ‘Guantanamo bay’, le camp de militaire Delta sert de prison pour des terroristes, à Yaoundé et Douala ‘Guantanamo land’ accueille d’ex-collaborateurs du chef de l’Etat camerounais tombés en disgrâce auprès de lui pour des raisons dont l’histoire élucidera certainement un jour, tous les contours.
Les clients de ‘Guantanamo land’ accusés par le discours officiel de détournement de deniers publics et officieusement d’avoir voulu être "calife à la place du calife" seront donc traités comme de dangereux terroristes et jugés par une juridiction d’exception : le tribunal criminel spécial. Le Cameroun a ainsi ses « masques de fer ». Car au Sed, Marafa Hamidou Yaya, Polycarpe Abah Abah et Yves Michel Fotso retrouvent Gilles Roger Belinga, Emmanuel Gérard Ondo Ndong, Joseph Edou, Michel Thierry Atangana et Titus Edzoa, tous d’anciens barrons. Ces détenus gardés à vue en journée par les gendarmes armés de kalachs et enfermés en cellules durant les nuits (quelques uns dans les sous-sols) en toute violation du code de procédure pénale en vigueur au Cameroun et du devoir de respect de la dignité. Ce, par la seule volonté du Prince… pas celui de Machiavel. Non. Mais celui que décrivait Bertrand Téyou dans L’ante Code Biya. Il paraît que ce Prince là est plus perfide.
© Rodrigue N. TONGUE | Le Messager
Les quartiers généraux de la gendarmerie de Douala et de Yaoundé ont été érigés en prisons secondaires en violation de toutes les conventions et traités internationaux sur la détention des hommes. Démonstration.
Le fonctionnement de l’univers carcéral camerounais va-t-il à rebours ? Alors que sous d’autres cieux la société civile, les intellectuels et même une bonne frange de la classe politique crie haro sur les centres de détention d’exception à l’instar de la prison américaine de "Guantanamo" à Cuba, le régime de Yaoundé juge le moment opportun pour en créer. L’illustration parfaite de cette reculade, est l’arrêté du ministre de la Justice, garde des Sceaux, créant en Yaoundé VIe et Douala Ier « des prisons secondaires ». Ce texte rendu public le vendredi 25 mai 2012, quelques heures avant la déportation de Marafa Hamidou Yaya, Polycarpe Abah Abah et Yves Michel Fotso est accompagné d’un autre arrêté qui fait des régisseurs des prisons centrales de Douala et de Yaoundé les patrons respectifs des nouvelles prisons secondaires. En d’autres termes, que les nouveaux pénitenciers dépendront (du point de vue administratif) des anciens.
Seulement, en dehors de la relation conjoncturelle du timing de la publication des arrêtés de Laurent Esso et le transfèrement brutal de Marafa et de ses compères au secrétariat d’Etat à la défense (Sed) vendredi dernier, la localisation des prisons secondaires montre à suffire que les camps de la gendarmerie nationale de Yaoundé et de Douala sont les nouvelles « prisons Esso ». Car le Sed où sont incarcérés Yves Michel Fotso et Cie depuis vendredi ou encore Ondo Ndong et Titus Edzoa depuis quelques temps déjà ; puis la légion de gendarmerie du Littoral où est détenu Alphonse Siyam Siewé depuis 2006 sont respectivement situés à Yaoundé VIe et Douala Ier. Et donc, par un encadrement judiciaire d’exception que le socio politiste, Mathias Owona Nguini taxe « de maraboutage judiciaire » des prisonniers dits pourtant de droit commun (et non pas des combattants comme les terroristes) seront gardés dans un camp militaire à Yaoundé, 22 ans après la session des libertés qui consacra, au Cameroun, le début de la dynamique du respect des libertés individuelles et collectives.
« Masque de fer »
Un excès que même l’administration américaine sous Georges W. Bush n’a pas atteint, au plus fort de la lutte contre le terrorisme accélérée après les terribles attentats du 11 septembre 2011. Car soucieux de sa Constitution, des Conventions des Nations unies, de la déclaration des Nations unies pour les droits de l’Homme et même des recommandations de la Pastorale des prisons faite par l’Eglise catholique, Georges Bush fils n’avait pas osé, malgré le bilan de 3000 personnes tuées en quelques minutes le 11 septembre 2001, créer sur le sol américain, une prison dont le personnel est issu des rangs de l’armée. Le projet ignoble a pris corps à Cuba reconnu notoirement comme une des plus dures dictatures contemporaines. A contrario, la célèbre prison de ‘Guantamo’ devenue Camp delta pour la détention, dès 2002, de terroristes fait l’objet de vives critiques. Le président Obama a d’ailleurs annoncé sa fermeture décriant « une sauvagerie » humaine.
En revanche, au Cameroun on se fiche certainement mal de cette vision humaniste. Puisque en plein centre urbain à Douala, et en plein quartier résidentiel à Yaoundé se trouvent des centres de détention d’exception peuplés de militaires armés jusqu’aux dents. Pis, si à ‘Guantanamo bay’, le camp de militaire Delta sert de prison pour des terroristes, à Yaoundé et Douala ‘Guantanamo land’ accueille d’ex-collaborateurs du chef de l’Etat camerounais tombés en disgrâce auprès de lui pour des raisons dont l’histoire élucidera certainement un jour, tous les contours.
Les clients de ‘Guantanamo land’ accusés par le discours officiel de détournement de deniers publics et officieusement d’avoir voulu être "calife à la place du calife" seront donc traités comme de dangereux terroristes et jugés par une juridiction d’exception : le tribunal criminel spécial. Le Cameroun a ainsi ses « masques de fer ». Car au Sed, Marafa Hamidou Yaya, Polycarpe Abah Abah et Yves Michel Fotso retrouvent Gilles Roger Belinga, Emmanuel Gérard Ondo Ndong, Joseph Edou, Michel Thierry Atangana et Titus Edzoa, tous d’anciens barrons. Ces détenus gardés à vue en journée par les gendarmes armés de kalachs et enfermés en cellules durant les nuits (quelques uns dans les sous-sols) en toute violation du code de procédure pénale en vigueur au Cameroun et du devoir de respect de la dignité. Ce, par la seule volonté du Prince… pas celui de Machiavel. Non. Mais celui que décrivait Bertrand Téyou dans L’ante Code Biya. Il paraît que ce Prince là est plus perfide.