Prison de New-Bell - Douala: Des détenus ont des «Call-box» !

YAOUNDE - 28 SEPT. 2012
© Blaise Djouokep (JADE) | L'Actu

Malgré son interdiction au sein du pénitencier, le téléphone portable est fréquemment utilisé par les prisonniers.

Assis dans un coin de la prison, Ibrahim cache avec soin son téléphone portable qu'il détient par devers lui. De temps à autre, des détenus s'approchent de lui et après quelques secondes de causerie, les deux hommes se retirent dans un endroit calme de la prison où le premier donne au second son téléphone portable afin qu'il puisse passer un appel. Le prix de la minute d'appel est connu 100Fcfa. La communication dure près de trois minutes et Ibrahim perçoit 300Fcfa. Cinq minutes plus tard, les deux hommes sont de retour. La scène se répète plusieurs fois dans la journée avec d'autres détenus.
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Bien que cela soit interdit au sein de la prison centrale de Douala, nombreux sont les bagnards qui ont en leur possession des téléphones portables. Certains ont choisi de commercialiser les appels. Alors que les détenteurs des téléphones portables sont attirés par l'argent, les autres détenus sont motivés parle désir de communiquer avec leurs proches, ou avocats. «J'appelle souvent mes parents pour leur demander soit un médicament si je suis malade; ou encore de l'argent quand je n'en n'ai plus», informe Pascal, qui vient de passer un appel. D'autres détenus soutiennent qu'ils appellent souvent leur avocat pour qu'ils travaillent sur leur dossier et sur la stratégie à adopter le jour du procès. Pour d'autres encore, «il faut appeler l'extérieur pour qu'on m'aide à payer mes dépense afin que je sois libéré», informe Bruno.


Cellule disciplinaire comme sanction

Cependant, les détenus s'accordent a dire que le téléphone portable est beaucoup plus utilisé pour ceux des détenus qui ne bénéficient pas des sorties. A en croire Me Madeleine Nsali Mbebi, défenseur des droits de l'homme, «la communication des détenus est permise et les détenus utilisent souvent le téléphone pour communiquer avec leurs avocats ou leur familles et connaissances». Pourtant, l'activité est risquée. Car, «l'usage du téléphone portable par les prisonniers est interdit au sein de la prison centrale de Douala», rappelle un gardien de prison. A en croire ce dernier «tout détenu saisi en possession d'un téléphone portable est interpellé et conduit en cellule disciplinaire. Son téléphone est également confisqué». La cellule disciplinaire (CD) est une cellule très obscure. Elle possède juste un tout petit trou d'aération que les détenus se disputent pour voir la lumière du jour. C'est dans cette cellule que le détenu est gardé trois ou cinq jours en guise de sanction.
Un risque qui ne décourage pas pour autant les prisonniers. Car, «lorsqu'un garde prisonnier nous saisit, si on peut négocier, on n’hésite pas à le faire. Lorsque ce n'est pas possible, nous sommes sanctionnés», explique Pascal. Mais, après leur sortie de la CD, les prisonniers ne s'arrêtent pas là. Ils recommencent de plus belle. Car, pour eux, «si nous devons arrêter de le faire cela veut dire que nous signons notre arrêt de mort. Et si on le fait comment ferons-nous pour survivre pendant notre incarcération?».

D'autres détenus sont plutôt attirés par l'argent. «Je vends la minute à 100Ff quel que soit l'opérateur; que ce soit MTN ou Orange La minute d MTN me revient à 60 FCFA et celle d'Orange, à 69Fcfa. Donc, je gagne 40FCfa au 31Fcfa par minute d'appel en fonction de l'opérateur choisi», informe Honoré, un autre détenu qui fait du «call box». Ce dernier affirme réaliser un bénéfice journalier qui peut aller jusqu'à 2000Fcfa. Pascal, qui n'a qu'un seul opérateur, affirme réaliser un bénéfice journalier qui varie entre 600Fcfa et 1000Fcfa.

Pourtant, il n'y a pas que les appels téléphoniques qui soient payants. Les réceptions d'appels également ne sont pas gratuites. «Si tu n'a pas assez d'argent pour appeler, tu ?? un numéro Et si la personne que tu ?? appelle, après la causerie, tu paies le propriétaire du téléphone», explique un détenu. Dans ce cas, le propriétaire du téléphone perçoit la somme de 1OOFcfa. Toute chose qui accroit les gains journaliers des propriétaires des «call box» et leur permet d'améliorer leurs conditions de détention. «Cela nous permet de nous offrir des repas copieux, de nous vêtir décemment», se réjouit Ibrahim.



28/09/2012
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