Prison de Mantoum: La réinsertion par le travail aux champs

Prison de Mantoum: La réinsertion par le travail aux champs

Prison:Camer.beLes pensionnaires de la prison de Mantoum travaillent dans les champs, mangent à leur faim et bénéficient de programmes de réinsertion. Une exception dans l'environnement carcéral du Cameroun.Un vent léger agite le feuillage verdoyant des manguiers aux alentours de la prison de Mantoum. Les 80 détenus de ce pénitencier, le moins peuplé du Cameroun, restent indifférents aux fruits mûrs tombés des arbres. "Ici, nous ne connaissons pas de problème de famine", explique Mathieu Koudjou, un prisonnier.

En compagnie de Jean Kouam, l’un des doyens des détenus, il nettoie à la houe les mauvaises herbes qui ont envahi les billons de maïs semés dans une plantation qui jouxte le mur arrière de la prison. Les deux prisonniers ne sont surveillés par aucun gardien. "Tous les pensionnaires vont en corvée, y compris les condamnés à mort. Nous travaillons principalement dans les plantations. Ce qui fait que chacun de nous dispose de vivres pour se nourrir", explique Mathieu. Il ajoute : "Comme dans toutes les prisons du Cameroun, nous avons droit à une ration alimentaire qui est d’un repas par jour. Elle est principalement constituée de couscous de maïs, de sauce faite à base du soja et de patates".

500 Fcfa la journée

Un groupe de cinq prisonniers corvéables est payé 3500 Fcfa, versés par l’employeur au régisseur de la prison. Ce dernier reverse 500 Fcfa à chaque membre du groupe. Le reste est injecté dans les caisses de la prison pour la prise en charge des détenus. M. Njoya, le régisseur adjoint de la prison de Mantoum se réjouit des bonnes relations entre prisonniers et geôliers. "Nous faisons tout pour ne pas frustrer les pensionnaires placés sous notre responsabilité et les traitons en amis. Nos rapports sont cordiaux. Nous évitons de les frustrer en ne parlant pas de leurs crimes. Nous communiquons avec eux, comme avec n’importe qui. Ce qui contribue à les rassurer", affirme-t-il.

Il rappelle par ailleurs que la triste réputation de Mantoum,  autrefois prison politique et lieu de torture,  est à oublier. "Il n’y a pas plus d’assignés politiques ici depuis 1976 date de la mutation de l’ex centre de rééducation civique et politique en prison principale. Les conditions de détention des 80 condamnés qui séjournent actuellement ici après avoir été transférés des prisons centrales de Douala,  Bafoussam, Nkongsamba, Mbanga ou Yaoundé, sont normales. Ils bénéficient d’un programme de réinsertion sociale financé par l’Union Européenne. Des spécialistes en agronomie forment les gardiens et les condamnés à diverses techniques culturales. Nous exploitons de vastes étendues de terre pour la culture du soja ou du maïs. Plusieurs de nos pensionnaires sont des spécialistes des cultures maraîchères", se vante M Njoya. Une réalité très appréciée à la délégation régionale de l’administration pénitentiaire de l’Ouest à Bafoussam, "Les exploitations agricoles constituent un gisement de richesses pour les prisonniers. Car y travaillant, ils trouvent des moyens de survie et s’initient à un métier pour préparer leur réinsertion sociale", apprécie Dieudonné Kouamen, le délégué régional de cette administration.

Des travailleurs honnêtes

Spécialisés dans l’agriculture, les prisonniers de Mantoum sont souvent sollicités par des particuliers. "C’est une main d’œuvre bon marché. Ce sont des travailleurs infatigables, doués et dévoués. Il faut seulement savoir les motiver. En plus, Ils ne volent pas dans nos plantations", affirme Ibrahim Toumansié, président du comité de développement du quartier Njinga où est située la prison. Cette franche collaboration est saluée par M. Mama, militant de Ridev, une organisation de défense des droits de l’homme basée à Bafoussam. " La corvée permet aux prisonniers de s’occuper et de préparer leur réinsertion sociale. Elle ne doit pas être obligatoire ou se faire dans des conditions extrêmement pénibles", fait-il remarquer. Mantoum respecte jusqu' à présent les règles minima de détention des Nations Unies. Un bel exemple à suivre.

© JADE : Guy Modeste DZUDIE


28/06/2012
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