Présidentielle 2018/Chief Pierre Mila Assouté : « J’annonce mon retour imminent au Cameroun avant la fin de ce semestre »

 

Source. 237ONLINE.COM 30 05 2017

 

 
 

 

Pierre Milla Assouté  est une grosse pointure du paysage politique Camerounais. Ancien  baron du RDPC entré en dissidence puis exilé en France à la suite de graves dissensions avec le régime de Yaoundé, l’homme cultive toujours, dans la discrétion absolue, loin des intrigues et des regards indiscrets, son intention de briguer la magistrature suprême.

 

 

En lice sous la bannière de son parti, le Rassemblement démocratique pour la modernité du Cameroun et malgré le rejet de sa candidature en 2011, le monarque de Santchou ne cache pas son intention de revenir à la charge.

Bonjour  Professeur Chief Milla Assouté, commençons par l’actualité la plus fraîche, depuis quelques jours, le président Paul Biya a ordonné le déblocage de la rondelette somme d’un milliard de  Fcfa  pour les victimes de l’accident ferroviaire d’Eseka, dites-nous quelques mots à ce sujet…

Je voudrais  d’abord par solidarité et par humanisme, m’associer à la douleur des  familles des victimes et des blessés de l’hécatombe d’Eseka.

En réalité, cette tragédie découle d’une double irresponsabilité: celle de l’État du Cameroun et du concessionnaire  Camrail qui doivent en assumer toutes les conséquences.

Le déblocage de la somme d’un milliard de Franc Cfa par l’État et non pas de la poche de  M. BIYA comme ses chantres veulent bien nous le faire croire, s’apparente donc à un appel d’air en direction des  familles- en cette quasi veille d’élections présidentielles.

A priori, dédommager les victimes n’est pas une mauvaise chose. Mais étant entendu que nous sommes au Cameroun, il faut toujours  rester vigilant. Si jamais cet argent est débloqué, on doit s’assurer qu’il aille effectivement aux ayant-droit et non pas aux vautours qui  rôdent inéluctablement en pareilles circonstances. Aussi, le timing de cette  opération donne à penser qu’il recherche en toile de fond un objectif plutôt cynique d’effets de précampagne. Bien plus, celle-ci ne repose sur aucun critère  statistique chiffré, prédisposant ainsi les malheureuses victimes à des micmacs bien de chez-nous. Au-delà des indemnisations, la justice doit néanmoins faire son travail, les responsabilités méritent d’être clairement établies. C’est  un impératif de morale publique et de justice sociale. Il faut au-delà de l’argent,  restituer les corps aux familles.

 

Le 20 Mai dernier, la présence de l’épouse de l’actuel chef de l’État  à la tribune d’honneur en tenue du Rdpc a fait couler beaucoup d’encre et de salive, quelques-uns pensent que  Paul  Biya serait déjà en campagne…

En politique,  les symboles parlent autant que les actes. En décryptant les signes, il ne fait plus l’ombre d’aucun doute que Biya sera candidat à sa propre succession.

 

Quelques mots en termes de bilan, sur le septennat des grandes réalisations qui touche   à sa fin… De votre point de vue, le candidat naturel du RDPC  a-t-il tenu parole ?

Où sont passés  les 500.000 ordinateurs promis aux étudiants? Où est l’université des sports? Les 25000 jeunes diplômés ont-ils été tous recrutés? S’il fallait inventorier les mensonges produits sous le renouveau, des bibliothèques entières ne tiendraient pas.

 

Les Camerounais doivent résolument et définitivement se tourner vers l’avenir… Parler de bilan sous ce postulat, serait donc quérir une aiguille dans une botte de foin.

Au juste, qu’est ce qui marche au Cameroun, nom de Dieu ! Où en est-on avec le fameux port en eau profonde de Kribi? Où sont les barrages hydroélectriques de Mekin… où est celui de Memvemle ? Où en est-on avec l’autoroute Douala/Yaoundé? Le chômage des jeunes connait-il une décrue dans nos villes et campagnes? Les Camerounais ont-ils des moyens financiers nécessaires pour se procurer des soins de qualité? Je n’invente pas le fil à couper du beurre, même les médecins l’ont récemment dénoncé.

Après les évènements de février 2008 dites « émeutes de la faim » le gouvernement Yang avait pourtant promis de résoudre tous ces problèmes en 6 mois, ont-ils été résolus ? Dommage !

 

Depuis quelques mois, les régions du Sud-ouest et du Nord-ouest  sont en proie à un  mouvement contestataire d’une rare violence. Certains compatriotes de cette partie du pays exigent le retour au fédéralisme, d’autres prônent purement et simplement la sécession, cette situation ne serait-elle pas de votre point de vue, consubstantielle à la longévité de Paul Biya au pouvoir ?

Ça coule de source, mais je voudrais toutefois préciser qu’il n’y aura jamais de sécession ni de chaos institutionnel au Cameroun. Nous devons  nous ressaisir. Il faut sauver la république. Les problèmes énumérés par nos concitoyens dits anglophones existent  partout ailleurs, dans le triangle national. Il faut toujours fuir les pièges de l’extrémisme… Le Camerounais doit pouvoir se sentir partout chez lui. Le repli identitaire ne nous conduira nulle part. Bien au contraire, il fera le jeu du régime.

 

La constitution du Cameroun ne devrait-elle pas concéder beaucoup plus d’espaces de pouvoir aux anglophones, avec par exemple la création d’un poste de vice-président de la République ?

La seule institution d’un poste de vice-président dans une constitution d’un pays aussi composite que le nôtre  ne peut pas être une réponse durable. Les Camerounais dans leur grande majorité ont des problèmes existentiels. La misère est palpable  du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest… c’est  un problème global. On peut comprendre que cette situation puisse provoquer une  rupture du pacte républicain. Surtout dans un contexte comme le nôtre où le pouvoir et les postes clefs de l’administration publique se retrouvent entre les mains d’un seul clan. Suivez mon regard ! Les dernières nominations opérées par M. Biya dans la préfectorale sont là pour nous le rappeler, nous ne sommes pas sortis de l’auberge du tribalisme, ça frappe et laisse forcément des stigmates dans quelques   esprits.

La décentralisation reste pourtant une réponse idoine au problème relatif à la marginalisation de certains citoyens,  si elle n’avait pas été confisquée par le pouvoir de Yaoundé depuis 1996. Je pense que nous n’en serons pas là. Ceci étant dit, Paul Biya et les siens ont intérêt  à impliquer le plus grand nombre de  Camerounais à la gestion de la « polis » et d’œuvrer pour la tenue d’élections transparentes au Cameroun. Sinon, les situations comme celles vécues au Nord-ouest et au Sud-ouest s’étendront sur l’ensemble du pays. Jean-Jacques Rousseau ne disait-il pas : « qu’on peut tromper une partie du peuple tout le temps, mais on ne peut pas tromper tout le peuple tout le temps » ? Je voudrais ajouter à cette assertion, une célèbre pensée de Maximilien de Robespierre : «  Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est pour ce peuple, le plus sacré et le plus indispensable devoir ».

 

Dans le sillage de la crise dite anglophone, le chef de l’État  a récemment procédé à la création d’une commission pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme (CNPBM) que beaucoup de nos compatriotes considèrent comme un gadget de plus. Il a également prescrit le recrutement de nombreux magistrats originaires du Nord-ouest et du Sud-ouest, ces mesures sont-elles à même de ramener la paix et la concorde dans ces régions du pays ?

Le CNPBM est un gadget budgétivore  qui ne servira à rien. Il s’ajoute aux multiples autres commissions farfelues que Paul Biya a créées ces dernières décennies, pour étouffer des affaires parfois très graves et endormir ainsi l’opinion publique.

 

En incendiant régulièrement les édifices publics comme ce fut le cas à Buea avec le siège du GCE Board et à Bamenda avec la délégation régionale du Ministère de la promotion de la femme, nos compatriotes anglophones ne traduisent-ils pas par-là, leur intention de tourner définitivement le dos à la république ?

Je suis contre toutes les formes de  destruction  des biens publics et surtout lorsqu’il s’agit    des écoles et des hôpitaux, c’est un patrimoine commun. C’est avec l’argent de nos impôts qu’on construits ces écoles, ces hôpitaux. Nous devons pouvoir exprimer notre dépit et nos frustrations, sans toutefois sombrer dans une pyromanie aveugle. Au demeurant, face à une dictature autiste et féroce comme celle du Cameroun, j’invite mes compatriotes et concitoyens à faire preuve de sagesse. Parce que nous sommes à la fin d’un cycle.

 

Un confrère anglophone interrogé pense que le pouvoir de Yaoundé paie à cause de son impéritie ou sa mauvaise foi à implémenter les lois sur la décentralisation qui datent pourtant de 1996 ?

Le pouvoir de M.  Biya  paye tout à la fois et ne paye rien du tout, parce  ce qu’il ne gouverne plus. Le Cameroun est sous pilotage automatique depuis fort longtemps, c’est la raison pour laquelle, au détour d’une prouesse sportive, on se perd parfois  dans des obscénités « présidentielles » du genre « mettre dans la sauce »…

 

Si jamais vous êtes élu président, que ferez-vous pour que nos frères anglophones abandonnent définitivement  leurs velléités sécessionnistes ?

Si je suis président, j’irai déjà voir ces populations dans leurs régions respectives,  moi-même.  Au lieu de me calfeutrer  dans mon palais, d’y envoyer les émissaires ou à défaut,  de signer des décrets absolument superfétatoires,  je démilitariserai progressivement ces régions pour faire  la part belle  à la réconciliation et au pardon en libérant la parole, en instituant un dialogue inclusif avec toutes les forces vives, toutes  les élites intérieures et extérieures de ces régions, Voyez-vous ! La parole directe du chef à une population désespérée qui croit qu’elle est détestée  produit toujours des effets bénéfiques. Elle remobilise et ré-booste le moral, calme et rassure.  Mon expérience de chef traditionnel me l’a appris. Un vrai chef n’a pas peur de son peuple,  il doit lui parler, l’écouter, dans le but de combler ses aspirations. Même Nicolas Machiavel affirmait que le prince ne doit pas se mettre à dos son peuple, faute de quoi il sera sans remède dans l’adversité.   Dans notre projet de société,  nous avons inscrit en bonne place, l’audit global du pays,  la révision Constitutionnelle, les réformes politiques et administratives profondes pour sortir définitivement notre pays des carcans  du pacte colonial.

 

Comment avez-vous accueilli l’arrestation des leaders de la crise anglophone, Me Balla et les autres… Ayah Paul Abiné par exemple ?

La fête de l’unité, aurait été une occasion en or  pour le chef de l’État d’amnistier toutes les personnes incarcérées dans le cadre de cette crise, Me Balla Nkongho, Ayah Paul Abiné et les autres  devaient de mon point de vue, célébrer la fête de l’Unité en famille. Ça aurait été un signe évident d’apaisement.  Un geste fort émanant d’Etoudi…

 

Dans une République normale, arrête-on un avocat général de la cour suprême en fonction ? Cette situation ne traduit-elle pas le fait que la justice n’est pas un pouvoir à part entière au Cameroun ?

Les charges qui pèsent contre tout citoyen doivent lui être notifiées au moment de son arrestation. Nous sommes dans une dictature au Cameroun. La séparation des pouvoirs inscrite dans notre loi fondamentale est un vœu pieu.  Le président de la République est bel et bien le premier responsable du Conseil supérieur  de la magistrature, c’est-à-dire le patron des magistrats. Qu’il nomme,  sanctionne voire  révoque. Ce qui est suspect, gênant et inacceptable dans le cas  de Paul Ayah, c’est son antécédent politique avec le pouvoir, alors qu’il siégeait   au parlement,  son refus en 2008 d’avaliser la prorogation du bail de  Paul Biya au sommet de l’État avait été très mal reçu. Il y a donc lieu de publier rapidement les griefs qui sont retenus contre lui, de les lui signifier ou de le libérer dans les brefs délais.

 

La décision du Sdf de boycotter le défilé du 20 Mai en mémoire aux victimes de la crise anglophone est-elle judicieuse ?

Je ne vais pas porter un jugement de valeur sur une décision souveraine d’un autre parti politique. Dans un contexte de corruption et de fraudes électorales généralisés, les résultats des élections ne reflètent toujours pas les choix du peuple.  

 

S’il vous était donné de juger l’opposition camerounaise d’aujourd’hui qu’en direz-vous ? Pourrait-elle en l’état actuel, conduire notre pays vers les cimes de l’alternance ?

L’opposition camerounaise est atomisée,  atone, amorphe et n’a pas de perspectives politiques lisibles. Elle n’a pas de ressource, elle vit aux crochets du régime avec une forte propension à l’auto-neutralisation. Plusieurs partis  n’ont même pas de projets de société. Notre opposition est en partie corrompue et désespérée, infiltrée même. Il ne faut pourtant pas perdre espoir. Après avoir été aux côtés de M. Biya, je pourrai vous affirmer qu’elle a donné du fil à retordre, des sueurs froides à ce régime, même si  je reste  à 100% convaincu qu’elle ne peut pas en l’état actuel  évincer le régime Biya par les urnes,  sans les réformes électorales appropriées.  Je suis amusé par l’optimisme béat affiché par certains chefs de partis qui font fraichement leur entrée en politique,  ils rêvent les yeux ouverts au point de penser que l’opposition gagnera les élections en 2018 sans ces réformes. C’est de l’utopie. La moitié de la population camerounaise étant jeune, il faut encourager  nos compatriotes et concitoyens à s’inscrire massivement sur les listes électorales. Imposer par la pression au travers des actions politiques comme les meetings populaires et autres marches, le pouvoir à implémenter des réformes irréversibles comme la tenue d’un second tour à la présidentielle. Faute de cela, tous ceux qui se bombent le torse aujourd’hui, ne feront qu’accompagner Paul Biya vers une énième victoire usurpée. Synonyme de son maintien  au pouvoir ad vitam æternam.

 

Au regard de la floraison de candidatures qui afflue de jour en jour, ne serait-on pas tenté de penser que notre opposition n’a véritablement pas tiré les leçons du passé ? Comme partout ailleurs, ne pensez-vous pas que seule  une coalition de partis politiques et d’organisations de la société civile pourrait définitivement tourner la page du régime du Renouveau ?

Lorsque le pouvoir est presque au ras des pâquerettes,  chacun croit être à mesure de  se courber et de le ramasser. Il est très naïf de penser ainsi.  La multitude de  candidatures à laquelle vous faites allusion ne repose en réalité sur aucun socle granitique ni substrat idéologique. Ajouté à cela, il faut dénoncer vivement le taux élevé des cautions. Pour participer à la présidentielle de 2018, les candidats doivent déposer un cautionnement  de 30 millions de FCFA.  Après le fameux vote censitaire, nous sommes de plain-pied dans les candidatures  censitaires.  Cette situation génère bien évidemment beaucoup d’appétits, quelques-uns s’invitent à la course  pour recevoir de l’argent de campagne. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, nous assistons depuis un certain temps au phénomène  des « Macron » tropicaux », ces personnages loufoques et  affamés sont en réalité des faire-valoir du régime en place.

 

Dites-nous quelques mots sur le code électoral camerounais…

Je l’ai déjà dit, je le réitère, le  code électoral actuel est un passeport pour la reconduction ad vitam æternam de M. Biya  au pouvoir. Il est taillé sur mesure pour bloquer  définitivement toutes les perspectives d’alternance dans notre pays. Le corps électoral étant biaisé à cause du faux recensement, Elecam procède à des épurations   d’électeurs et de candidats  considérés  comme foncièrement dangereux ou hostiles au pouvoir. Avec la fameuse réalité des fiefs électoraux, il est évident que le parti de Biya et son pouvoir ne verraient jamais d’un bon œil, qu’une candidature dissidente prospère dans un terroir considéré à tort ou à raison comme un potentiel bassin électoral du Rdpc.  Ceci étant dit, les lois comme l’obligation de résider sur le territoire pendant 01 an et le maintien de la loi sur la double nationalité sont en réalité un artifice pour battre la voie à certains camerounais de la diaspora jugés dangereux.

 

Devrait-on donc conclure  sous ce postulat que toutes les lois électorales de notre pays  sont taillées à la mesure du candidat naturel du Rdpc…

Je ne vous le fais pas dire, c’est une vérité de Lapalisse.

 

Revenons sur le cas du RDMC-DMMC, votre dossier de candidature à la présidentielle de 2011 avait été recalé… Un universitaire interrogé sur la question  à l’époque dans une chaine urbaine de Yaoundé, avait estimé  que les raisons évoquées étaient fallacieuses, celui-ci était même allé jusqu’à pointé un doigt accusateur sur Paul Biya lui-même… Qu’est-ce qui vous était justement reproché ?

Oui c’est M. Biya lui-même qui ne pas veut pas de ma candidature.  Il en a  peur. Ils disent pourtant que nous ne pesons d’aucun poids politique. Chose curieuse, ce sont les mêmes qui sont les premiers à refuser de le vérifier par les urnes. Le rejet de 2011 n’était qu’un précédent ; en 2004 les pièces avaient déjà été soustraites de mon dossier de candidature.

En 2011,  alors que je bénéficiais d’un statut onusien de la loi de 1951 sur l’asile politique, lequel  m’autorisait à être candidat eu égard au principe de  l’extraterritorialité, on a attendu minuit pour éteindre l’électricité et rejeter à la Hussarde mon dossier à la Cour suprême. Ma caution de candidat  s’est aussi vue confisquée abusivement jusqu’à ce jour. Pour affronter ce régime de front et ne plus jamais laisser passer de telles atteintes graves. J’annonce mon retour imminent au Cameroun, ce sera si je ne m’abuse avant la fin de ce semestre.

 

En félicitant le « vainqueur » de la présidentielle de 2011, l’ancien chef de l’État Français Nicolas Sarkozy avait suggéré à Paul Biya d’implémenter dans les brefs délais toutes les institutions prescrites par la constitution, jusqu’à présent, le conseil constitutionnel reste un serpent de mer…

Biya a répondu à son successeur François Hollande en visite à Yaoundé que :  » ne dure pas au pouvoir qui veut mais qui peut ». Il se fiche complètement des recommandations qui critiquent ses « brillantes » élections.

Biya et son régime sont en réalité, des fervents partisans de la conception de la force de Cicéron. Pour eux,  l’offense n’est humiliante que s’il soutient la force qui les maintient au pouvoir.

 

La cour suprême officiant comme conseil constitutionnel a-t-elle véritablement les coudées franches pour dire le droit dans un contexte comme le nôtre où la totalité de ses membres  sont nommés par le président de la République, c’est-à-dire inféodés au régime en place ?

Il ne faut pas trop attendre d’une cour suprême inféodée et subordonnée au président de la République.

 

Chief Mila Assouté est-il disposé à travailler avec les autres leaders de l’opposition camerounaise ?

Je le suis véritablement.

 

Comment avez-vous vécu l’histoire de l’enlèvement et de la mise à mort présumés de Guérandi Mbara révélé par Jeune Afrique il y a quelques années ?

Évidemment je l’ai très mal vécu. Je dirai même que « Jeune Afrique » ne racontait pas des histoires, la suite des évènements lui a donné raison. Contrairement à ce qu’avait laissé penser certains thuriféraires du pouvoir, les révélations faites par le magazine de Béchir Ben Yamed émanaient  d’un colonel portugais, du nom de José Alberto Fernandes Abrantes qui a décidé de vendre la mèche parce qu’il n’avait pas été payé par le régime.

Tout ceci ne me surprend pas venant d’un régime sanguinaire et foncièrement violent.  J’ai  moi-même, maintes fois, été mis en garde par plusieurs services secrets de certains  pays étrangers, que des opérations de ce type étaient fomenter contre ma personne.

 

Professeur, pour refermer notre entretien, dites-nous quelques mots sur la situation socio politique du Cameroun à moins de 16 mois de la prochaine présidentielle

Le Cameroun aborde la peur dans le ventre, les 16 prochains mois qui déboucheront- si Biya en a convenance, puisqu’il est l’unique détenteur du calendrier  électoral- sur le scrutin présidentiel de 2018. Je n’en dirai pas plus.

 

Que pensez-vous de l’opération épervier ? Le groupe de travail de l’ONU s’est prononcé en faveur de la libération de certains détenus, à l’instar de Marafa Hamidou Yaya…  Paul Biya utilise t-il la justice pour régler des comptes ?

Epervier est une arme politique. Pour preuve, la corruption et les détournements des deniers publics ne se sont jamais aussi bien portés au Cameroun.

Pour les cas  Marafa Hamidou Yaya et  Jean-Marie Atangana Mebara, pourquoi les maintiens t’on en prison ? J’ai cru pourtant  comprendre qu’ils avaient été élargis par la justice… Après on le régime a fabriqué d’autres histoires…

 

A l’issue  d’une radioscopie de notre paysage politique,  pensez-vous que le successeur de Paul Biya viendra  de l’opposition ou de  l’establishment actuel ?

Il existe de nombreux compatriotes intrinsèquement compétents, dans un camp comme dans l’autre. Il ne m’appartient pourtant pas de lire dans les boules de cristal. Seul l’avenir nous le dira… Néanmoins, J’aurais préféré que ce soit-moi. 

En tout cas,  le moment est arrivé de rassembler et de capitaliser toutes les énergies positives pour conduire le Cameroun vers les sentiers ô combien abrupts et difficiles du changement. C’est un combat qui interpelle tous les Camerounais qui subissent au quotidien et ce depuis 35 ans, les souffrances infligées par ce régime.

 

Propos recueillis par Yves Junior Ngangue, pour l’Opinion.



30/05/2017
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