Point de vue/Célestin Bedzigui:Le Cameroun, un pays béni des dieux, un peuple haï par ses dirigeants
L’événement
ne devrait pas passer inaperçu ou être éclipsé par les dernières
‘’simagrées sénatoriales’’ qui ne sont qu’une façade du ‘’gouvernement
par la diversion’’ dans lequel le régime de Yaoundé est passé maitre. Il
y a quelques jours, en soixante douze heures, le vrai visage de ce
régime s’est affiché dans toute sa laideur en deux occasions.
La première : Une rencontre avec la presse organisée par l’ONG Tribunal
Article 53 à l’intérieur du siège du Manidem, un parti politique
légalisé, il s’agit bien d’un lieu privé, est interrompue par les
gendarmes conduit par le commandant de compagnie Moutoulou, en exécution
d’une interdiction signée par le Sous-préfet Ekoa Mbarga ; sur quelle
base légale ? Aucune, puisque la dite rencontre ne se tenait pas dans un
lieu public.
La deuxième : Les militants de l’UPC, un parti politique, se regroupent
au rond point de Deido pour une manifestation pacifique, après en avoir
informe le Sous- préfet du ressort. Surgissent les gendarmes qui
dispersent la manifestation, arrêtent Albert Moutoudou et Alexis Ndema,
les deux leaders du mouvement.
Après un interrogatoire par le lieutenant Mbang
Eto et Moussiga, ils sont placés en garde à vue et passent la nuit dans
une cellule par une décision du Lieutenant – Colonel Ze pour réunion
illégale, une raison illégale puisque le Loi de 1990 régissant la
matière fixe que les réunions publiques sont soumises au régime de
déclaration et non comme l’applique abusivement l’administration au
régime d’autorisation.
Ainsi peut se définir la tragédie du Cameroun : un pays qu’on dit à
satiété être béni des dieux, mais dont on voit le peuple subir à chaque
occasion la haine de ses dirigeants, ceux la qui ont le contrôle des
instruments de la violence d’Etat. Car, il n’ ya que la haine, une haine
insensée, une haine inhumaine qui peut expliquer les maltraitances dont
sont victimes au quotidien les citoyens de ce pays.
La repression du peuple camerounais doit en effet cesser d’être une
entreprise sans nom, sans visage, sans responsabilité établie, la
persistance de cet état de fait est un encouragement aux
‘perpetrateurs’’. Désormais, les noms des bourreaux et oppresseurs
doivent être connus, car viendra un jour ou ils devraient répondre de
leurs méfaits, comme cela se voit de nos jours dans d’autres pays.
Ne faut –il pas être habité par l’esprit de la haine pour interdire de
parole l’ ONG ‘’Tribunal Article 53’’ qui voulait évoquer le sort fait à
Paul Eric Kingue, condamné hier sous un fallacieux prétexte à une peine
de prison à …vie avant que celle-ci ne soit ramenée à 10ans, s’
agissant de lui faire payer d’ avoir osé demander qu’ une entreprise
néocoloniale paie les impôts appropriés à sa commune, ou le sort fait à
Enoh Meyomesse, ce pur intellectuel à qui on fait payer son audace et sa
dissidence ?
Y a-t-il plus haineux que de se permettre d’incarcérer les militants de
l’UPC, le plus vieux parti du Cameroun, engagés dans une manifestation
pacifique, alors qu’ on sait que des milliers de ses membres ont depuis
plus de 60 ans payé de leur vie leur lutte pour la jouissance des droits
politiques des Camerounais? Que Ndema et Moutoudou conduisant une
manifestation pacifique en 2013 soient arrêtés et incarcérés dans une
cellule à rats par une clique civile et militaire illustre bien que le
meme esprit qui maintient le Cameroun depuis près de 60 ans sous un joug
d’oppression criminelle reste vivace. Ce constat, triste s’il en est,
doit susciter de tout Camerounais un sursaut d’indignation.
Indignation
Cette indignation doit s’exprimer dans la question
: Où est le Président du Cameroun? Ces actes attentatoires aux Droits
politiques de base et posés par des individus qui se prévalent de le
servir sont- ils connus de lui ? Sont- ils avalisés par lui ? N’est ce
pas lui qui à son arrivée au pouvoir…il y a 31 ans, a déclaré que ‘’nul
n’a plus à prendre les armes et à aller au maquis pour faire entendre sa
voix’’? Ou faut-il comprendre que ‘’ faire entendre sa voix ‘’ signifie
ne pas avoir de voix du tout ? Ou faut–il se faire à l’idée que sous
son régime, ‘’ le maquis’’ est remplacé par les cellules ou pullulent
les cafards et les rats des cellules d’emprisonnement du Cameroun
lorsqu’ on s’avise à exprimer son opinion ?
L’indignation doit également se manifester dans le refus absolu de
laisser qu’une minorité d’individus sans légitimité, se refugiant
derrière la ‘’légalité’’ surfaite du décret, maintiennent le Cameroun
sous leur botte, refusent aux citoyens de ce pays la jouissance des
droits politiques et civiques de base reconnus de nos jours aux citoyens
des pays de par le monde.
L’indignation doit se vivre, pour n’être pas seulement une incantation
vaine, en s’engageant de manière déterminée et visible dans les
organisations en lutte contre ce système inique, nourri de la colère
sainte d’une résistance sans concession à tant d’injustices et
d’humiliations. Rester un spectateur au bord de la route n’est pas une
option.
L’arrogance et la mauvaise foi croissante
qu’affichent les épigones de ce régime ne laissent désormais plus
d’autres options que de rêver de suivre l’exemple de peuples comme celui
d’Egypte et de Tunisie, qui déchirant le voile trompeur de victoire
électorale à 80%, ont mit à bas en un temps record des régimes siamois à
celui qui oppresse les Camerounais.
Cet exemple nous enseigne que l’espoir est permis. L’engagement est un
impératif, car comme il est dit a l’Article 35 Déclaration des Droits de
l’Homme et du Citoyen du 24 Juin de 1793 : ‘’ Quand le Gouvernement
viole les Droits du Peuple, l’insurrection- pacifique, j’ ajoute- est
pour le peuple ou pour une partie du peuple, le plus sacré des droits et
le plus indispensable des devoirs’’.
Célestin Bedzigui
Chairman
CAMDIAC- Cameroon Diaspora for Change
New York, 27 Fevrier 2013