Condamné
à mort pour complicité d’assassinat, vol aggravé et port d’armes et
enfermé à la prison de Nkongsamba, Daniel Besong a porté plainte contre
l’ancien ministre d’Etat Marafa Hamidou Yaya. Un fait rare au Cameroun
où les personnes privées de liberté se résignent généralement face aux
violations de leurs droits.
Etes-vous véritablement l’auteur de la plainte contre l’ancien
ministre d’Etat en charge de l’administration territoriale et de la
décentralisation, Marafa Hamidou Yaya?
Il semble que de nombreuses personnes se posent
cette question. Elles doivent donc croire que parce que je suis
incarcéré, je n’ai plus les qualités intellectuelles requises pour
défendre mes droits. Ces gens se trompent. C’est bien moi qui ai porté
plainte contre Marafa Hamidou Yaya pour diffamation et dénonciation
calomnieuse.
Que reprochez-vous précisément à l’ancien Ministre Marafa ?
Ce détenu m’a expliqué par la suite qu’il avait donné mon nom, car, convaincu qu’une fois qu’ils apprendraient ce nom, ils le conduiraient à la prison de Douala. S’il avait donné son propre nom, on l’aurait détenu à Bamenda. Saisi, le régisseur de la prison de Douala m’avait convoqué pour s’assurer que j’étais bel et bien en prison et non dehors. Quelque temps après, des missions venues de Yaoundé ont constaté que j’étais effectivement incarcéré au quartier des condamnés à mort et que je n’avais pas bougé.
Grande a été ma surprise d’apprendre, un jour, que
j’avais été surpris dans la voiture du président du Sdf, le chairman
John Fru Ndi en sa compagnie. Bref, que j’étais son garde du corps et
que nous étions impliqués dans les émeutes de février 2008. Ces
accusations non fondées contre ma personne étaient l’œuvre du ministre
Marafa Hamidou Yaya. C’est du mensonge, c’est de la diffamation, c’est
de la calomnie à l’endroit de ma personne.
Vous êtes incarcéré à la prison de Nkongsamba, alors que dans la
plainte, vous avez saisi les juridictions de Yaoundé. Comment cela
a-t-il été possible ?
J’ai rédigé la plainte depuis ma cellule et l’ai conservée dans
l’attente qu’un visiteur puisse m’aider à l’acheminer et à la faire
enregistrer dans un tribunal de Yaoundé. L’occasion s’est prêtée au
moment où une de mes connaissances m’a rendu visite. Je lui ai alors
transmis la plainte avec toutes les instructions. J’ai d’ailleurs avec
moi tous les journaux qui ont parlé de cette plainte. J’attends d’être
extrait de ma prison pour aller affronter Marafa au tribunal.
Mais pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant de porter plainte ?
Monsieur Marafa était ministre. Je ne pouvais rien contre lui. J’ai
gardé le silence. Quand j’ai appris qu’il n’était plus ministre, j’ai
sauté sur l’occasion et j’ai rédigé ma plainte depuis la prison.
N’êtes-vous pas manipulé par le pouvoir en place ou par des ennemis du ministre Marafa ?
Je n’ai été conseillé et ne suis manipulé par personne. Je n’ai même pas
d’avocat dans cette affaire, mais certains se proposent de
m’accompagner. J’ai par ailleurs beaucoup de griefs envers le
gouvernement concernant mes conditions de détention. Je ne saurais donc
être son allié. J’ai par ailleurs appris qu’il y a un ancien ministre,
aujourd’hui en prison, qui promet de me soutenir dans ce procès contre
Marafa. Il serait prêt à financer mes déplacements avec les gardiens qui
vont m’accompagner aux audiences du tribunal. Des avocats aussi.
Pourquoi toute cette mobilisation, êtes-vous devenu subitement l’objet de toutes les sollicitudes ?
C’est l’issue du procès qui intéresse les gens. Il ne faut pas oublier
que je pourrais me tirer avec au moins 300 millions Fcfa pour le
préjudice subi. C’est l’argent qui les fait courir. Pour cet ancien
ministre qui souhaite me soutenir, il doit sûrement avoir des comptes à
régler avec Marafa et veut s’appuyer sur mon procès. Dans tous les cas,
je suis serein. Ma seule crainte, c’est qu’on refuse de m’extraire de ma
prison pour aller affronter Marafa.