A la tête d’un empire financier colossal, nul doute que ce natif des Hauts-Plateaux n’hésitera pas à faire cavalier dans la politique pour son propre compte, dans l’optique de s’asseoir sur le siège présidentiel.
La rédaction de cet article nous a préalablement imposé l’obligation de prendre attache avec Paul Fokam Kammogné afin de lui faire une interview. Un protocole d’interview lui sera proposé à cet effet, en date du 20 août 2012. Nous nous proposions de l’interroger sur son parcours, sur les raisons de son attachement à la discrétion, sur ses véritables rapports avec le président Equato-guinéen Obiang Nguema ou encore Maurice Kamto…
Malheureusement, nous ne parviendrons pas à nos fins. Son responsable de la communication, Maurice Simo Djom, nous tiendra informé que son patron ne souhaite pas s’exprimer pour le moment, mais qu’il allait certainement nous relancer dans le cadre de la publication de son prochain ouvrage déjà en préparation.
En attendant, nous avons voulu faire une incursion dans l’univers de Paul Fokam Kammogné, un personnage atypique, une force tranquille qui à lui seul représente un empire financier, mais qui semble évoluer, contrairement à certains, en marge des platesbandes de la politique. Il est loin de ceux-là qui couplent sans se gêner pouvoir économique et appétit du pouvoir politique.
Cet homme connu de la scène publique, semble tout autant auréolé de mystère. Pour de nombreux observateurs, ses activités connues ne seraient que la partie émergée d'un iceberg dont il est difficile de sonder la profondeur de son enracinement. Il faut dire que l'homme est fiché comme fanatique de l'effacement. Si l’argent ouvre inévitablement un appétit pour la reconnaissance politique, Paul Fokam Kammogné serait-il une exception dans un microcosme où l’un, le pouvoir financier, fait inéluctablement la cour à l’autre, le pouvoir politique ?
Fait-il preuve d’une simple discrétion ou s’agit-il d’un repli stratégique ? Et s’il avait choisi de rester tapi dans l’ombre tel un fauve affamé qui, le moment venu, fond impitoyablement sur sa proie ? Ne serait-il pas cette pierre qui ne roule pas mais qui amassera mousse ? Et si c’était lui le prochain sur le trône présidentiel ?
La goute d’eau qui fait l’exception
C’est en effet un personnage qui intrigue à plus d’un titre. A 64 ans bien sonnés, il n’a jamais affiché publiquement quelque ambition politique que ce soit. Pas d’engagement de ce type connu, pas de visée pour un poste électif. Dès lors, il tranche nettement avec les autres cadors du gotha économique de notre pays qui, après leurs milliards, se sont pieds et poings joints, engouffrés dans la faille politique qui leur confère sinon une plus grande aura, mais bien plus, l’immunité, la protection de leurs affaires, le pouvoir que contrôle pour le moment le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (Rdpc).
Les exemples sont pléthoriques dans ce sens. Fotso Victor, autre homme d’affaires et industriel influent, a déposé ses valises au sein du comité central du Rdpc depuis 1990. Depuis 1996, il est élu maire de la commune de Pétè-Bandjoun. Il a été réélu en 2002 puis en 2007, et a toujours rempilé sous les couleurs de son parti le Rdpc. Même les griffes de l’épervier qui tiennent en captivité son fils Yves Michel Fotso impliqué dans l’affaire de l’avion présidentiel, n’a pas refroidi ses ardeurs.
Joseph Kadji Defosso est cet autre qui n’aura pas résisté à l’attrait du monde politique. Homme d’affaires-maire de Bana, il a toujours fait feu de tout bois pour demeurer à la tête de cette mairie. Calvin Foading, un autre industriel bien agrippé au sérail, porte son costume de député du département du Koung-Khi et vice-président de l’assemblée nationale. Mouhammadou Alhadji Abbo, milliardaire et membre du bureau politique du Rdpc, finance les campagnes électorales de son parti à coups de millions.
On peut aussi citer Albert Kouinché, promoteur d’Express Union, mais également président de section Rdpc dans le Koung-Khi. Jean-Bernard Ndongo Essomba, homme d’affaires bien établi, qui n’hésitera pas à faire carrière dans la politique au point de devenir président du groupe parlementaire Rdpc de 1992 à 1997, puis de 2002 jusqu’à nos jours. Il est en outre membre du bureau politique de ce parti. Jean-Claude Feuteu, homme d’affaires aguerri, député dans le département du Ndé. C’est aussi le cas d’André Sohaing, qui fait partie des premiers entrepreneurs camerounais. Lui non plus n’aura pas résisté à la pomme politique. Il est actuellement maire de Bayangam sous les couleurs du parti des flammes, depuis 1997…
La liste de ces hommes qui ont établi leur quartier dans les entrailles de la politique est longue comme la main. C’est clair, la politique est l’opium des hommes d’affaires et industriels camerounais.
Paul Fokam Kammogné est ainsi une exception, un référent en la matière. Pourtant, de tous ces hommes ci-dessus cités, il fait office de financier camerounais le plus puissant de l’heure. Il est d’ailleurs considéré comme le Bamiléké le plus liquide. Cet homme ne serait-il pas entrain de nous conduire sur une fausse piste, alors que contrairement à ses congénères qui, en dehors de leur colossale fortune, n’ont pas flirté longtemps avec l’école, il apparaît comme un érudit ? Rien ne l’empêche de viser plus haut. Dans le champ social où s’organisent les relations de pouvoir, il fait partie de ceux-là qui du fait de leur cursus, disposent d’un prestige supérieur face à d’autres non moins dépourvus d’influence, un prestige qui rayonne davantage à cause de la désuétude et le lessivage d’une opposition qui n’est plus que l’ombre d’elle-même, alors que les Camerounais sont en quête de nouveauté.
John Fru Ndi fait, depuis longtemps, figure d’homme politique has-been avide de pouvoir tout autant qu’il est résigné à ne plus y accéder. Maigari Bello Bouba, Issa Tchiroma sont si empêtrés dans leur mariage avec le parti au pouvoir qu’on a du mal à les distinguer. Maurice Kamto, bien qu’étant une valeur en plein essor, pourrait avoir contre lui le manque de liquidités financières. Paul Fokam Kammogné combine à la fois matière grise et pouvoir économique, ce qui depuis des lustres, n’est plus arrivé au Cameroun. Il fait donc figure de précurseur dans le domaine. S’il semble évoluer en marge du système de conflit du pouvoir, l’absence d’une quête de mandats électifs n’est point synonyme d’un manque d’appétit politique.
A court ou à moyen terme, on pourrait être surpris. Il serait ainsi en train de rôder à sa manière autour du contrôle de l’appareilétatique. La preuve, il pénètre les moeurs camerounaises sur les plans matériel et symbolique.
Trop puissant pour demeurer neutre
L’ensemble des entreprises sous son contrôle
s’étend comme une pieuvre dont les tentacules embrassent tous azimuts
les secteurs variés de l'économie.
La banque, l’édition, la télévision, l’enseignement supérieur,
l’immobilier, l’hôtellerie... Ayant établi sa base dans le moule de
l'excellence, il est actuellement l’un des Camerounais les plus
prospères. Sous son aspect débonnaire, Paul Fokam Kammogne a construit
un´empire d’entreprises et peut revendiquer une immense fortune en
milliards de francs cfa. Il a particulièrement trouvé ses marques dans
le secteur de la finance. Depuis 2011, Afriland First Group, son réseau
bancaire, est devenu le premier groupe bancaire camerounais, le deuxième
d’Afrique centrale et le quatrième de la zone CFA.
Le groupe de Paul Fokam Kammogne est désormais leader devant les françaises Bicec (Banque internationale pour l’épargne et le crédit) et Sgbc, la filiale camerounaise de la Société générale qui faisaient la course en tête au sein du triangle national depuis des lustres. En 2011, Afriland First Group est arrivée en tête dans ce classement avec un total de bilan de $2302 millions, contre $1150 millions pour la Bicec et $972 millions pour la Sgbc. Chaque jour qui passe consolide son empire très diversifié. Dans l’establishment, ce type de personnage, qui possède autant d’argent et une voix aussi audible et capable de porter très loin ne peut être un citoyen ordinaire. Ce, à plus d’un titre.
Il pratiquerait en effet ce que Michel Crozier et François Chazel appellent la mobilisation des ressources qui lui permettraient, le moment venu, de peser sur les comportements. Ce gigantesque pouvoir financier peut lui permettre de manager des activités de tous ordres, en particulier sa communication politique. Ce pouvoir peut susciter des allégeances et assurer la fidélité. Grâce à sa capacité distributive, il a le contrôle de l’attribution des emplois et des prébendes. Des facteurs à la base de la constitution des clientèles politiques. Le natif des Hauts-Plateaux est au fait de tous ces facteurs. Sa discrétion est donc stratégique, car la réussite professionnelle fait automatiquement naître l’opportunisme politique.
Cette expérience professionnelle acquise pourrait favoriser son engagement. Pour mieux le comprendre, il faudrait rentrer dans les raisons pour lesquelles son choix s’était porté sur Alamine Ousmane Mey pour le poste de directeur général d’Afriland First Bank. Etait-ce un hasard ? Bien sûr que non. C’était un choix stratégique. Lorsqu’il met le grappin sur Alamine Ousmane Mey, ingénieur polytechnicien formé en Allemagne qui s’est néanmoins spécialisé en finance des entreprises en Belgique, sans doute, il était question d’attirer une clientèle nordiste dans les filets de cette banque. Toutefois, il était aussi question de préparer une alliance politique qui peut-être dans le futur, allait se révéler payante.
Alamine Ousmane Mey, originaire du Logone et Chari dans l’Extrême Nord, est le fils d’Ousmane Mey qui, en tant qu’ancien gouverneur hyperpuissant du Nord et actuel président du conseil d’administration de la caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps), n’est pas à ranger au placard. Cette figure à elle seule pouvait fédérer les masses nordistes derrière un éventuel projet politique du milliardaire Baham, eut égard à la sympathie qu’il avait engendrée à son égard en désignant à la tête de sa banque un fils du Grand Nord. Ce faisant, le milliardaire réussira à monter un axe Nord-Ouest fiable au sein de cette banque.
De manière subliminale, Fokam Kammogné mettra en avant un leadership transactionnel, en offrant comme pôle d’attraction aux ressortissants du Grand Nord Alamine Ousmane Mey, en échange de leur soutien. C’est ce marketing politique caractérisé par une transaction mutuellement fructueuse, entre Kammogné et son public cible, qui lui permettra d’élaborer cet axe Nord-Ouest. Avec la démission inattendue de Maurice Kamto lui aussi natif des Hauts-Plateaux, Paul Biya va casser cette dynamique stratégique, en proposant à Alamine Ousmane Mey une offre qu’il ne pouvait rejeter, celui de grand argentier national. Un axe brisé qui n’empêche cependant pas que le pouvoir de Yaoundé pose sur ce consul de Malte des yeux suspicieux, car il serait très lié au président Equato-guinéen Obiang Nguema.
Il nous souvient d’ailleurs qu’il avait été rapporté que c’est Paul Fokam Kammogné qui, en 2009, avait pesé de tout son poids auprès du président Obiang Nguema pour que via la Commission bancaire d’Afrique centrale (Cobac) soupçonnée d’être à la botte de la Guinée Equatoriale, la Commercial Bank of Cameroun (Cbc) de Fotso Victor, soit mise sous administration provisoire. Beaucoup parlèrent d’ailleurs de « collusion mafieuse entre Paul Fokam Kammogné d’Afriland First Bank et la famille présidentielle en Guinée Equatoriale ». Un rapprochement entre l’homme d’affaires et le président Equato-guinéen que l’on regarde d’un mauvais oeil du côté d’Etoudi, surtout que ces derniers temps, Yaoundé et Malabo ne filent pas le parfait amour.
Dans une optique prospective, Fokam Kammogné, aurait bâti autour de lui des forteresses qui lui octroient un maximum de pare-chocs. Et si le soutien du milliardaire venait aussi de Malabo au cas où il viserait la cime présidentielle ?
L’intellectuel
L’homme, à qui la banque a particulièrement souri, a ce que nombre d’hommes d’affaires camerounais puissants n’ont pas : la matière grise acquise sur les bancs. Diplômé de gestion économique du Centre national des arts et métiers (Cnam) de Paris et docteur en sciences de gestion (Université de Bordeaux, 1989). Il devient dès 1993, maître de conférences à l'Institut technique de banque du Conservatoire national des arts et métiers de Paris. Paul Fokam Kammogné, s’érige en élément attractif à travers ses diverses publications qui mettent en exergue les questions de développement en Afrique. Pour lui, au moment où s'opèrent de profondes mutations socioéconomiques à travers le monde, l'Afrique, malgré quelques timides velléités observées ça et là, semble être confinée dans un immobilisme volontaire et entretenu.
Il trouve en effet le temps de produire une véritable pensée sur les solutions endogènes aux difficultés des économies africaines. C’est sans doute la raison pour laquelle, après avoir publié chez l’Harmattan et Jaguar, il a lancé la maison d’édition Afredit et garde un oeil sur les éditions Maisonneuve Larose. De nombreux ouvrages sont à mettre à son actif : « Et si l’Afrique se réveillait ? », « L'entrepreneur africain face au défi d'exister », « Misère galopante du Sud, complicité du Nord. Jeux, enjeux, solutions »… On annonce même dans les prochains jours une nouvelle parution. Ces ouvrages démontrent qu’il est un expert spécialisé, détenteur d’un savoir pointu.
Lui-même se définit comme « un chercheur en développement ». Sa compétence technique basée sur son savoir-faire spécialisé et productif pourrait faciliter l’exercice des tâches politiques. Même s’il n’existe pas un grand tapage autour de ses parutions, ses capacités intellectuelles ne souffrent d’aucun doute. Pour de nombreux Camerounais, sa force financière mêlée à sa force intellectuelle pourrait faire pencher la balance. Est-il donc si insensible à ses atouts, alors qu’une analyse plus poussée démontre qu’il est un fin tacticien ? Nous pensons que non.
Le fin tacticien
Paul Fokam Kammogné est l’initiateur d’une chaîne de télévision : Vox Africa, actuellement dirigée par sa fille Rolande Kammogné. Lancée début 2008, la chaîne Vox Africa a installé son quartier général dans la banlieue sud de Londres, à quelques encablures du quartier chic de Chelsea. Pour ce qui est de sa représentation camerounaise, la chaîne de ce financier a récemment procédé à un recrutement massif, argent en main, versant dans un débauchage à grande échelle de certains journalistes capés de la sphère télévisuelle, au grand dam des chaînes qui jusqu’alors les employaient. Jules Domché, Camus Mimb, Paul Mahel, Philippe Boni, Paulin Mballa… Tous débauchés au prix fort. Canal 2, Stv et bien d’autres, en ont fait les frais.
Est-ce un investissement anodin non saupoudré par un calcul politique ? On en doute car, en s’offrant les services de cette crème, le milliardaire Baham le sait, la communication est une arme redoutable en politique. Il affuterait donc ses armes, puisque le moment du grand combat est entrain d’arriver. Le fait qu’il s’intéresse autant à la télévision par la mise en place d’une chaîne panafricaine, si c’est légitime, n’est pas dénué de sens. Cela pourrait jouer en sa faveur le moment venu. En particulier, la force de la télévision dans la communication politique n’est pas négligeable, surtout que les politiciens ont appris à s’en servir, qui plus est un homme qui en possède une. Elle pourrait servir à maîtriser son image, à contrôler son apparence, à le rendre vendable auprès du public.
C’est une plateforme de séduction, un réseau d’informations lui offrant de disposer d’informations utiles et stratégiques. Ce, d’autant plus que le milliardaire n’est en rien dupe de ce qui se passe. Il n’est pas ignorant du fait qu’il alimente les conversations tout autant dans les salons feutrés de l’étendue du territoire national que parmi les citoyens lambda. Beaucoup de personnes avec lesquelles on a échangé, et même parmi les dignitaires bamilékés, estiment qu’il est l’homme qui sauvera les Bamilékés. Donc, nombreux sont ceux-là qui sous cape, espèrent qu’il va se décider à prendre d’assaut le palais d’Etoudi.
D’après certains de ses proches, c’est quelqu’un doté d’une grande vision. On a du mal à croire que cette grande vision n’inclut pas de visées politiques, pour quelqu’un qui est décrit comme prospecteur. Pourrait-il se donner le mal de céder à ces appels? Ou alors est-il déjà entrain de préparer son coup ? Nous croyons bien que oui. Un coup se prépare dans l’ombre D’abord, s’il semble ne courir vers aucun siège politique, c’est la marque de ceux qui veulent échapper aux griffes du régime en place, notamment à son pouvoir d’influence authentique. Il n’a visiblement besoin ni de ses avantages matériels, ni de ses gratifications symboliques ou psychosociales. Il n’a pas besoin de ses contreparties. Maurice Kamto avait pensé qu’il fallait mettre les pieds dans le panier à crabes que constitue le sérail, ceci afin de mieux le cerner et mieux le combattre une fois son départ consommé.
Aujourd’hui, il se retrouve éclaboussé par une
affaire de détournement de deniers publics. En effet, le pouvoir ne
devrait pas hésiter à sortir un dossier noir pour tenter de neutraliser
les ambitions politiques du ministre délégué démissionnaire qui se pose
en véritable poids lourd contre le
Sphinx. En poste auprès de l’ex garde des sceaux Amadou Ali aujourd’hui
vicepremier ministre chargé des relations avec les assemblées, Maurice
Kamto avait été, ces dernières années, l’artisan de la réforme de
l’appareil judiciaire camerounais. Or, cette dernière dotée d’un budget
de quelque 60 millions d’euros soit 39 milliards de f cfa, a été pilotée
de bout en bout par le cabinet Brain Trust consulting Inc dont le
directeur général
n’est autre que Maurice Kamto. Un conflit d’intérêt que le palais
d’Etoudi pourrait agiter pour mettre le holà aux appétits croissants du
pouvoir que nourrit l’agrégé de droit.
Une procédure serait même en préparation par l’actuel ministre de la justice Laurent Esso et son ministre délégué Jean-Pierre Fogui. Le milliardaire Baham quant à lui préfère abattre ses cartes en marge du sérail. Tout cela pour rien ? En tout cas, cette posture approfondit les craintes d’Etoundi à son égard. Est-ce à tort ? Il est économiquement trop puissant pour échapper à son giron. Pourtant, il est clair que le Rdpc, qui fait souvent miroiter tous types d’avantages à ceux qu’il veut mettre dans son escarcelle, semble ne pas avoir d’emprise sur lui. Les aspirations de Fokam Kammogné seraient en porte-à-faux avec celles du parti au pouvoir. Il battrait pavillon pour luimême, et cette discrétion légendaire qui le suit comme son ombre s’analyse beaucoup plus comme une manipulation stratégique que comme un fait sans importance.
De part cela même, il acquiert une certaine légitimité basée sur sa capacité d’influence qui se fonde sur des qualités socioprofessionnelles, plus précisément sur son statut de financier, industriel, auteur… dans notre pays. Il sait qu’il cumule à la fois une autorité fondée sur le charisme du fait de ses qualités exceptionnelles, et une autorité basée sur sa compétence, car il maîtrise et contrôle le savoir économique réputé efficace et valorisant. N’est-il pas en ce moment même l’un des Camerounais les plus prospères ? N’est-il pas un exemple de réussite sociale ? Cette réussite sociale-là, ne pourrait-elle pas lui ouvrir grandement les voies d’une ambition politique propre ? Il n’en est pas dupe.
Souvenez-vous, la politique est l’opium des hommes d’affaires. Ses entreprises vivent un âge d’or, subjuguées par une courbe croissante. De là à embrasser le domaine politique, il n’y a qu’un pas à faire. On le sait, dans la culture politique, l’autorité du financier se prend avec des pincettes. Il est en outre une autorité qui prend attache dans les valeurs, ces valeurs partagées auxquelles la société s’identifie. Cela lui confie de facto un pouvoir d’influence spécifique, dont Paul Fokam Kammogné a sans doute connaissance. Et quand certains se demandent sous quelle bannière il pourrait s’inscrire, la réponse est qu’il n’est jamais trop tard pour créer un parti et remporter les élections.
Le social democratic front (Sdf), créé le 26 mai 1990, avait bel et bien raflé la mise lors de l’élection présidentielle de 1992, coupant l’herbe sous les pays d’un parti datant de 1985. N’eut été une fraude massive, John Fru Ndi aurait certainement eu à présider aux destinées de notre pays. De plus, les Camerounais savent pertinemment qu’il y a un fort vent du changement qui souffle actuellement sur le triangle national. Un vent de perestroïka dont pourrait profiter Paul Fokam Kammogné.
Son parcours
Paul Fokam Kammogné est né en 1948 à Boukué
département des Hauts-Plateaux, région de l’Ouest. L’ancien adjoint au
chef d’agence de la Cameroon
Bank (1976-1979) a déjà gravi tous les échelons de la vie et bâtit à
présent un véritable empire qui étend chaque jour ses tentacules comme
une pieuvre boulimique. Le président du groupe Afriland First Bank est
un personnage atypique dans le milieu de la finance. En 1987, il fonde
la caisse commune d'épargne et d'investissement (Ccei- Bank). En se
lançant depuis 1991 dans la micro finance, il est devenu le "banquier
humaniste" dont le réseau de coopératives d'épargne et de crédit accorde
des emprunts à des taux inférieurs à ceux pratiqués par les banques
classiques.
(Ccp). L'homme, qui aime à se présenter comme "chercheur en développement", a lancé en 2007, à Yaoundé, une université privée, le PKFokam Institute of Excellence, qui dispense des formations exclusivement en anglais, sur les standards des universités américaines, pour "répondre aux besoins de l'Afrique en leaders capables de favoriser la création de richesses, de défendre la culture africaine et de promouvoir l'Afrique". Lauréat du « Prix allemand de l’excellence africaine », l'homme est promoteur de la télévision Vox Africa, qui émet à partir de Londres depuis janvier 2008. Il est également à la tête de plusieurs autres entreprises.
Quelques entreprises de Paul Fokam Kammogné
Jully Voyages
Vox Africa
Société industrielle pour la transformation de la cellulose (Sitracel)
Cenainvest
Afriland First Bank Cameroun
Afriland First Bank Guinée Equatoriale
Afriland First Bank Paris
Afriland First Bank Sao Tome et Principe
Afriland First Bank Rdc
Afriland First Bank Congo
Afriland Firsst Bank Chine
Sapa (qui compte dans son portefeuille
Afrédit, Sapi, Saar, Ages, Alc,
Afrimar, Cfp, Esg, Geodis Cameroon,
Ervedit–Maisonneuve et Larose)