Les camerounaises immigrées en Suisses sont célèbres parce qu’elles rapportent beaucoup d’argent dans leur pays. Paul Biya dépense sans compter l’argent public du Cameroun en Suisse.
La rue camerounaise distingue deux catégories de citoyens suisses qui se connaissent mais ne se côtoient pas.
Il y a les « Suissesses », ces Camerounaises installées dans la Confédération helvétique, qui reviennent au pays chaque été et se font remarquer par leur opulente richesse. Elles aiment la Suisse parce que la Confédération où l’argent coule à flot les a adopté sans les juger, et leur a donné l’opportunité de faire fortune. Elles ne sont qu’une poignée, mais ne ménagent pas leurs efforts, pour ne pas passer inaperçues. On les reconnait à leurs belles voitures, 4x4 Rav4 de préférence, leurs tenues onéreuses et sexy, leur accent hybride, entre le parisien et le Yaoundéen. Elles ont les jambes rigoureusement épilées alors qu’au pays, la pilosité féminine fait partie des canons de la beauté. Mais leur terrain de séduction ne se trouve pas ici.
Celles qui ont ressenti quelque frayeur en voyant l’âge venir paraissent parfois plus neuves qu’au jour où elles ont décidé de s’éloigner de la poussière des villes camerounaise qui vous colle à la peau et vous irritent les yeux. Quelque injections de botox par-ci, quelques poches de silicone implantées par-là, un peu de lifting et de liposuccion et elles retrouvent quasiment l’apparence qu’elles avaient à vingt ans. Au centre de Yaoundé et dans sa périphérie, certaines ont bâti des immeubles à la modernité insolente, qui par contraste souligne la laideur du bidonville environnant. Et pour faire bonne mesure, elles n’oublient jamais de faire graver leurs noms bien en évidence, sur le mur d’entrée. « Immeuble Madame X, Madame Y. » Afin que nul n'en ignore.
Au sein de la population, ces femmes qui sont pour la plupart parties du plus bas de l’échèle sociale suscitent des sentiments contrastés. Elles sont à la fois admirées et jalousées, craintes et respectées. Au pays de la rumeur malveillante, les mauvaises langues prêtent à leur fortune une origine douteuse. On raconte qu’elles sont allées se prostituer en Suisse et ont dû subir toutes sortes de pratiques dégradantes pour s’enrichir en un temps record. On susurre qu’elles ont pigeonné de vieux Blancs riches, mais en manque d’affection. On s’interdit évidemment de penser que certaines d’entre-elles sont de redoutables femmes d’affaires qui tiennent des commerces florissants tout en gérant leurs ménages de façon irréprochable. Au pays de la sorcellerie et de la corruption, la recette du succès est forcément douteuse.
Quoi qu’il en soit, les « Suissesses » en vacance ne font du mal à personne au Cameroun. Bien au contraire, la manne qu’elles rapportent de Genève et ses environs profite à plusieurs : amis, employés, parents. Elles ne font qu’apporter au pays même si en retour, elles ne bénéficient que peu ou prou de reconnaissance.
Il y a ensuite le « Suisse », Paul Biya, qui fait le chemin inverse. Depuis plusieurs décennies, le président camerounais a succombé au charme de la Confédération, son climat tempéré, ses hôtels lacustres, ses docteurs, le calme égal de ses villes qui le changent de l’agitation de Yaoundé. Certains de ses concitoyens le soupçonnent même d’avoir acquis des parts de l’Intercontinental, un cinq étoile situé sur les bords du lac Léman, où il aura passé une bonne partie de sa vie de président.
Paul Biya n’agite pas de signes ostentatoires de richesse comme ses
concitoyennes, les fameuses « Suissesses ». Les longs cortèges et le
déploiement massif des forces de sécurité qui paralysent la ville à
chacun de ses déplacements s’attachent à sa fonction et non à sa
personne. Il faut entrer dans sa confidence pour savoir qu’il
n’affectionne pas les moyens modernes de payement comme les cartes
bleues, qui laissent trop de traces. Il leur préfère le cash, qu’il fait
transporter par grosses liasses dans les mallettes et sacs du village à
grande contenance par ses hommes de main. Une anecdote raconte ainsi
qu’un jour, devant faire le plein d’essence de son avion dans quelque
aéroport asiatique, il avait dû recourir à un homme d’affaire présent
dans sa délégation pour régler la note, le vendeur ayant refusé le
payement au comptant.
Le Suisse Paul Biya
La Suisse et Paul Biya, c’est une histoire d’amour fusionnelle, folle passion dans laquelle tout écart se paye chèrement. Il y a cinq ans, le président avait commis une petite incartade, en organisant une petite virée thalasso de trois semaines avec ses potes à la Baule. On avait raconté à l’époque qu’il avait découvert cette ville balnéaire du nord-ouest de la France grâce à une amie qui y possédait un appartement. Dans tous les cas, il avait jeté son dévolu sur L’Hermitage, un cinq étoile en bord de mer avec ses colombages normands et le Royal, quatre étoiles. Comme le président ne se déplace pas sans sa cour, il avait pris 43 chambres dans les deux établissements. Montant de la facture : près d’un million d’euros.
Le maire de la Baule avait honoré le généreux visiteur de la médaille de la ville. Cependant, les Français qui ne sont pas neutres comme les Suisses avaient crié au scandale en apprenant par la presse que le chef d’un Etat pauvre et très endetté, auquel ils octroient l’aide au développement via leurs impôts était ainsi venu flamber l’argent public de son pays sous leur nez. Paul Biya qu’on sait peu bavard n’avait pas failli à sa réputation. Il avait chargé quelques sbires de résoudre le problème par une campagne de communication défendant le droit au repos comme tout un chacun, du président surchargé de travail qu’il est censé être.
Depuis, Paul Biya a retrouvé ses sentiments d’amoureux transi de la Suisse et est revenu se blottir dans les bras tendres et rassurants de Genève. Cette année, même Boko Haram la secte islamiste qui multiplie les incursions meurtrières dans son pays n’a pas réussi à le dissuader d’aller s’y livrer à son rituel estival d’immolation d’argent. Sitôt la Commémoration du 70e anniversaire du débarquement en Provence terminée, il a quitté Toulon pour Genève.
Pour se prémunir contre les islamistes de Boko Haram qui ont récemment visé son vice-Premier ministre mais aussi contre ceux de ses concitoyens de la diaspora qui ont pris l’habitude de manifester bruyamment pour perturber ses séjours récurrents en occident, Paul Biya a fortement renforcé sa garde. Un site a diffusé l’information difficilement vérifiable selon laquelle près de deux cents policiers camerounais en civil ou en tenue, filtreraient l’entrée de l’Intercontinental de Genève, en ciblant particulièrement les Noirs qui s’en approcheraient.
Il ne faut évidemment pas compter sur l’opinion publique suisse pour demander des comptes au président flambeur. Neutralité oblige. Un collectif d’associations de Camerounais vivants en Suisse a cependant écrit au Président de la Confédération, Didier Burkhalter, pour attirer son attention sur la présence ostentatoire des policiers camerounais autour de l’hôtel de Paul Biya. Après lui avoir rappelé l’extrême pauvreté dans laquelle vit plus de la moitié de la population camerounaise pendant que leur président prend du beau temps à l’étranger avec l’argent public, le collectif lui a suggéré de demander à Paul Biya de partir, afin que les concitoyens du président sachent que « vous ne contribuez pas à la ruine du Cameroun et à la clochardisation du peuple camerounais.»
« Que dirait le Peuple Suisse, votre Peuple, si vous passiez plus des trois quarts de l’année installée dans un hôtel de Yaoundé, entourée par un bataillon de courtisans qui vous donnent l’illusion de grandeur, en pillant sans vergogne votre pays ? Que dirait votre Peuple si vous installiez votre famille au Cameroun, et vos enfants dans des écoles camerounaises, loin de la Suisse dont la destinée vous a été confiée? La réponse à ces questions parait évidente : Vous seriez destitué, arrêté, jugé et envoyé en prison », écrit le collectif. Pas de quoi ébranler l’hôte de Paul Biya.
Les populations doivent se cotiser pour financer la lutte contre Boko Haram
Pendant ce temps au Cameroun, les moyens manquent pour lutter contre Boko Haram et on se débrouille comme on peut. Un commissaire de police a expliqué à l’AFP que les islamistes réussissent à s’approvisionner en arme grâce à des trafiquants qui les planquent dans des sacs d’arachides et autres denrées, les forces de sécurité ne disposant pas de scanners aux postes-frontière pour détecter des armes dissimulées entre les marchandises. Il est évidemment inutile de suggérer au président vieillissant de refreiner son désir de parcourir l’occident, pour acheter ce matériel indispensable à la sécurité aux frontières de son pays avec l’argent économisé. Dans le nord du Cameroun où sévit la secte islamiste, l’administration a interdit l’usage des motos, moyen de transport privilégié des assaillants. Les populations qui se déplacent aussi surtout à moto dans cette région où les voitures comme les bonnes routes sont rares trinquent. Pire, elles doivent désormais financer leur sécurité. Un sous-préfet a en effet demandé aux familles et aux commerçants de sa localité de se cotiser, pour payer et équiper les « comités de vigilance villageois », sorte de milices locales chargées de détecter les islamistes.
« C’est juste un effort de guerre que nous demandons aux
populations. Il faut reconnaitre que les comités de vigilance sont très
importants. Ce sont eux qui donnent l’alerte aux forces de défense
lorsqu’il y a des mouvements suspects dans les villages», a expliqué le
haut fonctionnaire, en précisant que l’initiative n’est pas de lui, mais
des chefs traditionnels dont les villages subissent les agressions de
Boko Haram. Il espère réunir suffisamment d’argent pour acheter
machettes, torches, bottes, flèches et bicyclettes pour équiper les
comités de vigilance.
C’est sûr, si cette information touche les « Suissesses » qui terminent
leurs vacances au pays, certaines pourront s’en émouvoir et mettre la
main à la poche. C’est sûr, Paul Biya qui ne craint pas pour sa sécurité
ne se sentira pas concerné.