Portrait d’une bête politique qui ne vit plus que par passion pour la fonction suprême.Timide, bosseur et dévoué. Voilà en résumé les principaux caractères de l’homme qui, un certain jour de juin 1975 est nommé premier ministre. Rien ne laisse transparaitre chez lui un certain appétit pour le pouvoir. Il est d’ailleurs tellement soumis qu’il encaisse humiliations, défiances et coups bas de la part des Samuel Eboua et autres puissants barons du régime de son prédécesseur, Ahmadou Ahidjo, qui avouera plus tard qu’il ne savait pas que son homme était aussi « fourbe et hypocrite ».
Et puis, un certain 04 novembre l’histoire s’accélère « le patron », puisqu’il appelle ainsi Ahmadou Ahidjo, décide de lui confier le pouvoir suprême.
De temps à autre il n’hésite pas à consulter « son illustre prédécesseur ». Quitte à subir l’humiliation d’une attente à N’Gaoundéré dans le nord du pays alors qu’Ahidjo est en villégiature dans son ranch à quelques kilomètres de là.
Et puis viennent les assurances de l’animal politique qui commence à sentir peser le poids d’une tutelle trop encombrante.
Celle d’Ahidjo dont il ne prononcera plus le nom depuis la crise ouverte dès le début de l’année 1983.
Pour son pouvoir, rien n’a de prix. Tous ceux qui s’y sont posé comme des potentiels rivaux ont été broyés par la foudre de sa rancune.
Rancunier
Ahmadou Ahidjo, rival de la première heure en a fait la triste expérience. Lui qui fut condamné à mort par une justice manifestement aux ordres. Lui dont même la dépouille continue à subir la foudre vengeresse du prince d’Etoudi.
Il est en effet jaloux de son pouvoir, prêt à en découdre avec tous ceux qui osent convoiter son fauteil. John Fru Ndi en
sait quelque chose ; lui qui fut mis en résidence surveillée au lendemain de l’élection controversée de 1992. Jaloux à
mourir de son pouvoir, très méfiant visà- vis des rivaux, il fit supprimer très vite la disposition constitutionnelle dont
il avait bénéficié et qui stipulait que le Premier ministre succède au président en cas de vacances du pouvoir.
Pour être à l’abri des mauvaises surprises comme
celles de 1997 où son secrétaire général Titus Edzoa démissionnait pour
se porter candidat à la présidentielle. L’histoire est connue de tous.
Il croupis toujours en prison. Rancunier en fin, le
prince d’Etoudi n’a pas hésité à monter une opération dite « épervier »
de lutte contre la corruption où il décapite progressivement tous ces
rivaux convoitant son siège.
Une opération qui lui permet de maintenir le couperet au dessus de la tête des dauphins présumés dont les dossiers compromettants sont déjà ficelés. Marafa Hamidou Yaya , JM Atangana Mebara…en savent quelque chose.
Visser à mort
Le président ne transige pas quand il s’agit de
son pouvoir. Sa première épouse, Jeanne Irène Biya envisagea, raconte
t-on à Yaoundé de quitter le pouvoir pour retrouver une vie normale avec
son époux qu’elle a connu et aimé quelques années plus tôt.
Elle quitta le monde dans des circonstances qui bruissent encore de
soupçons accablant sur la personne même de son époux. Au début des
années 1990, alors que le pays est au bord d’une guerre civile, il
refuse une conférence nationale revendiquée par la majorité des forces
sociales. « La Conférence nationale est sans objet » dira t il.
Au risque et périls de la cohésion sociale du Cameroun par 09 mois de turbulences socio- politique. Il se résoudra
néanmoins à une tripartite dont le principal accord était la limitation
du mandat présidentiel à deux septennat. Il a unilatéralement violé cet
accord en levant les verrous en Avril 2008 sur la limitation des
mandats. Il ne cède jamais.
Malicieux et fourbe comme le qualifia son prédécesseur, il a plus d’une flèche à son arc et n’hésite pas à faire semblant
de céder pour mieux dérouter ses adversaires.
Elecam est une illustration de sa roublardise où il fait semblant de céder par des pressions de la Communauté internationale mais ne bouge pas d’un iota.
D’ailleurs, il a retiré à cette commission électorale le pouvoir de publier les tendances pour en confier la compétence exclusive à la Cour suprême acquise à sa cause.
Défier le maitre si besoin
A la France il doit tout ou presque. Dès le début de la crise avec Ahidjo, il reçoit le soutien de Paris. Guy Penne, conseiller du président Mitterrand propose à Biya de reformer la garde présidentielle, véritable menace pour son pouvoir. Il recevra solennellement le soutien officiel de Mitterrand. Au Palais des verres de Ngoa Ekélé que « La France est avec le président Biya ». Tellement euphorique du soutien français, il se proclama même « meilleur élève de la France »
» Il s’est tourné vers la Chine, pays qui ne se soucie pas des questions d’alternance au sommet ou de transparence électorale.
Question beaucoup trop sensible qui pose l’idée pour le prince d’envisager une vie sans le pouvoir.
Comment en être autrement pour cette homme qui débuta sa carrière par le haut et qui n’a plus quitté le confort et
les ors de la très haute administration. Portrait d’une bête politique qui ne vit plus que par passion pour la fonction suprême.