Depuis l’entrée en vigueur du Tribunal criminel spécial (Tcs) le 15 octobre 2012, les responsables du Trésor annonce la restitution de sommes prétendument détournées d’un montant cumulé de près de 3 milliards Fcfa. Suite à cela, des voix s’élèvent pour questionner la destination et l’utilisation des fonds remboursés. Enquête...
On le sait désormais. Yves Michel Fotso co-accusé de Marafa Hamidou Yaya et de quatre autres personnalités dans le cadre de l’achat foireux d’un avion devant servir aux déplacements du chef de l’Etat a remboursé 886. 752. 217 Fcfa qu’il estime être la somme imputable à sa personne à côté de ses cinq compagnons d’infortune.
Une semaine avant la date d’hier, 22 janvier 2013 où cette information a été divulguée par la presse, l’homme d’affaires emprisonné depuis décembre 2010 remboursait 230 000 000 (deux cent trente millions) Fcfa en guise de restitution du corps du délit dans une autre affaire. Celle l’opposant avec Roger Ntongo Onguéné à l’Etat du Cameroun relativement aux détournements des fonds publics à l’Autorité aéronautique civile nationale. L’issue de cette dernière opération sera favorable au milliardaire.
Puisque sur demande du ministre de la Justice, le procureur général du Tcs qui le poursuivait abandonnait les charges contre lui. Synonyme d’élargissement dans le cadre précis de cette affaire. Yves Michel Fotso entend bénéficier de cette jurisprudence dans l’affaire de l’achat d’un avion présidentiel au niveau de la section spécialisée de la Cour suprême. Puisque la haute juridiction a été saisie dès le lendemain de sa condamnation (intervenue le 22 septembre 2012) à la peine de 25 ans de prison et autres amendes et dépens par le tribunal grande instance du Mfoundi.
D’après les déclarations faites au tribunal et les documents dont les journalistes ont pu se procurer copies, il est clair que les premières sommes remboursées par Yves Michel Fotso ont été reversées à l’autorité aéronautique civile, notamment le premier versement de 230 millions Fcfa. Le 13 novembre 2012, il indiquait clairement au Tcs, avoir restitué les fonds querellés ; invoquant ainsi les dispositions de l’article 18 de la loi créant le Tribunal criminel spécial (Tcs).
Onze jours après cette annonce, soit le 22 novembre 2012, le milliardaire de Bandjoun signale avoir réglé en deux tranches, la somme dont il est redevable à l’Autorité aéronautique nationale tout en clamant ne l’avoir pas détournée. En cash flow il versait 135 millions Fcfa dans les caisses de cette entreprise et le reste avait été réglé par chèque… toujours au bénéfice de l’entreprise en charge de réguler l’aéronautique civile au Cameroun. On peut donc penser que c’est cette société d’Etat qui est bénéficiaire du pactole de 230 millions Fcfa. Joint au téléphone, ses principaux responsables n’ont pas voulu dire au Messager si ces fonds seront dépensés pour les besoins budgétisés de l’entreprise ou alors s’ils seront gérés sous l’autorité du ministre des Finances.
Unicité de caisse
Il en est de même des 886. 752. 217 Fcfa restitués au Trésor, via la trésorerie générale de Yaoundé par chèques tirés sur Uba- Cameroun. En l’absence du Trésorier payeur général, aucun responsable en poste n’a souhaité s’adresser à découvert à la presse. Mais des indiscrétions glanées dans ce bâtiment situé en face de la poste centrale de Yaoundé et faisant partie des monuments de la capitale font état de ce que c’est le ministre des Finances, en tant qu’argentier national, qui devrait à priori gérer ces fonds. « Il y a unicité des caisses du trésor. Si des fonds sont versés dans une des trésoreries du pays, ils ne peuvent quitter les caisses de l’Etat sans l’ordre du ministre des Finances », souligne sous anonymat un agent en poste. Le même qui croit savoir que l’argent devrait servir au besoin de l’Etat en fonction des priorités fixés.
C’est peut-être la même fortune qui est réservée à la somme de 1, 738 milliards versée la semaine dernière au trésor public par Afriland First Bank qui ayant reçu des fonds publics déposés chez elle les a transformés en dépôt à terme (Dat) constitué sur la base d’un crédit à personne privée au profit de Serges Kaptué Tagne. L’affaire a été enrôlée au Tcs sous l’action de la Conac qui y a vu un détournement de deniers publics dont sont complices certains cadres de la banque qui a dû rembourser l’argent dilapidé, quitte à poursuivre ses personnels responsables de cette malversation et Serges Kaptué Tagne, porteur du projet « Renforcement des initiatives de gestion des forêts communautaires » (Rigc) ayant englouti ces fonds. L’argent a une fois de plus été versé au trésor public.