Operation Epervier: La peur s'empare des barons du régime Biya
DOUALA - 03 DEC. 2010
© THIERRY NYOPE | Dikalo
Ils sont nombreux à avoir perdu le sommeil depuis quelques heures. De nombreux dossiers sont en instance sur la table du chef de l'Etat.
On avait fini par croire que l'Epervier a pris du plomb dans l'aile. Mais depuis la mise en détention provisoire d'Yves Michel Fotso, l'ex Administrateur directeur général de la défunte Camair, le 1er décembre dernier, la psychose s'est une fois de plus installée au sein du sérail. Et apparemment aux dernières nouvelles, le mot ne serait pas assez fort pour traduire ce qui se passe maintenant. Surtout que selon certains analystes, l'année 2011 s'annonce riche en rebondissements sur le plan politique, dans la mesure où elle marque un tournant décisif dans la gestion des affaires du pays. Parce que si on se fie au calendrier électoral, les Camerounais seront appelés à choisir leur président de la République dans quelques mois. Et Paul Biya, président sortant et «candidat naturel» du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc)- parti proche du pouvoir donc candidat à sa propre succession, voudrait certainement marquer les esprits de ses compatriotes qui croupissent par millions sous le poids de la pauvreté.
Au sein de l'appareil gouvernemental et du sérail, cela se sait. Il se susurre même dans les salons feutrés que Paul Biya à travers le coup de mercredi dernier vient, comme a ses habitudes, tente de réactionner sa machine propagandiste. Malheureusement, dans sa logique de sauver un septennat auquel les sceptiques peinent à trouver un relief significatif, il devra sacrifier quelques têtes et non des moindres.
Psychose
On se souvient pour ce faire que plus d'une soixantaine de dossiers de membres du gouvernement, directeurs généraux et hommes d'affaires prospères, font depuis quelques temps l'objet d'une attention particulière de sa part, ainsi que celle des autorités en charge de la gestion de l'opération Epervier. Ce qui fait que ceux dont les noms avaient été avancés indirectement ou directement par Amadou Ali, le vice-Premier ministre, ministre en charge de la Justice et Garde des sceaux, vivent désormais dans l'angoisse, à l'idée de savoir qu'ils peuvent être cueillis d'un moment à l'autre comme les autres victimes de cette opération.
Cette peur est d'ailleurs légitime et cela va de soi. Parce que selon des sources dignes de foi, les dossiers de plusieurs personnalités viennent d'être bouclés après un travail de fourmis abattu par les éléments d'Amadou Ali.
Evalués à 64 suspects au départ, la moisson des arrestations des personnes suspectées de crime économiques à été très maigre jusqu'ici. On parle à peine d'une vingtaine de personnes écrouées dans les différentes cellules du pays. Ce qui a laissé croire au sein de l'opinion nationale que ces quelques arrestations étaient justes une opération d'épuration qui avait pour but de mettre hors d'état de nuire les concurrents potentiels du «candidat naturel» du Rdpc.
Olivier Vallée, économiste, consultant pour le Fmi, soulignait d'ailleurs dans cette lancée, que «l'Opération Epervier ressemble à une opération d'épuration au sein des élites camerounaises. Il y a bel et bien, dans cette opération, à la fois la disparition d'un certain nombre de potentiels concurrents politiques, mais aussi d'alliés politiques.» Pour cet économiste, il s'agit d'«une tactique de pouvoir qui le (Paul Biya) replace d'une certaine façon comme le magistrat suprême de la société camerounaise, c'est-à-dire pas simplement un arbitre politique, mais un décideur du Bien et du Mal dans son pays.»
Et puisqu'on parle du bien, et du mal, nos sources font état de ce que l'ancien ministre délégué auprès du ministre de la Communication et ancien directeur général de la Cameroon radio and télévision (Crtv), est dans de salles draps. Son dossier serait entièrement bouclé. La gestion de celui qui a dirigé pendant 17 ans la radiotélévision d'Etat (1988-2005) au point de faire corps avec ces médias par son omniprésence à l'antenne, serait au centre de cette affaire. Gervais Mendo Ze au cours de son audition par le Contrôle supérieur de l'Etat s'en est tiré avec des amendes spéciales. Tout en se déclarant incompétent, le Consupe a demandé entre autres à l'ancien directeur général de la Crtv de rembourser 2,6 milliards Fcfa au Trésor public, tout en étant mis à la disposition de la Chambre des comptes.
Question de temps
Le nom de Louis Bapès Bapès, le ministre des Enseignements secondaires (Minesec), est également avancé dans la liste de ces fossoyeurs de la fortune publique dont les dossiers seraient déjà bouclés. On se rappelle que ses plus proches collaborateurs parmi lesquels son ancien secrétaire d'Etat, Catherine Abena, son délégué régional du Centre, Simon Pierre Amougui, Nicodème Akoa Akoa, inspecteur des services, dame Minlo'o, contrôleur financier ont été inquiétés il y a quelques temps et certains sont encore écroués à la prison de Kondengui. On se rappelle qu'ils avaient été entendus plusieurs fois à la direction de la police judiciaire dans des dossiers de malversations financières liés entre autres aux frais d'examen et à la gestion de certains marchés dans son département ministériel. A cette époque deux commissaires de police judiciaire avaient été relevés de leur fonction parce qu'ils auraient vendu la mèche aux deux intéressés contre de fortes espèces sonnantes et trébuchantes. On avait alors souligné que c'est sa casquette de ministre en fonction qui avait certainement empêché son arrestation.
D'autres sources avancent le nom de l'ancien ministre de l'Economie et des Finances, Michel Meva'a m'Eboutou. Il serait impliqué, comme le ministre Engoulou, dans le dossier de liquidation de l'ex-Oncpb. Ils avaient d'ailleurs déjà été entendus sur la question à la Dpj. Il s'agirait d'une créance qui n'a pas été reversée dans les caisses de l'Etat. L'avocat Me Lydienne Eyoum, interpellée également était chargée de recouvrer la créance auprès de la banque débitrice. Il en est de même de Me Célestin Maah qui devait effectuer des saisies sur le compte de liquidation. En tant que ministre de tutelle, Michel Meva'a m'Eboutou a de bonnes raisons de trembler même si les observateurs pensent qu'il serait difficile pour le chef de l'état de coffrer à nouveau l'un des siens.
Les cas Inoni Ephraïm et de Marafa Hamidou Yaya sont également dans le collimateur de la justice. Certains de leurs nombreux complices dans l'affaire Albatros croupissent déjà dans les prisons de Kondengui. Ce ne serait donc plus qu'une question de temps. D'ailleurs, le régisseur de la prison centrale de Yaoundé Kondengui a reçu des instructions fermes pour accueillir dans de bonnes conditions de nouveaux pensionnaires.
ARRESTATION D'YVES MICHEL FOTSO:
Un mauvais cadeau de fin d'année à l'empire Fotso
© PIERRE GOUANEZ | Dikalo Vendredi 03 Décembre 2010
L’arrestation et la mise en détention préventive du fils du milliardaire de Bandjoun a sonné comme le glas au sommet de l’empire Fotso et de la communauté de l'Ouest toute entière.
Le 02 décembre 2010 restera gravé dans la mémoire du peuple Bandjoun et de la population de l'Ouest comme le pire des cauchemars. Devant les kiosques à journaux, les cafés, dans les marchés et les bureaux, un seul commentaire anime les conversations: c'est l'affaire de l'arrestation d'Yves Michel Fotso. Tous les commentaires sont permis. Certains pensent qu'il serait arrêté à cause de l'affaire Albatros et la Camair; d'autres estiment que c'est à cause de l'affaire CBC et la lettre d'Yves M. F qui ont poussé le ministre des Finances à faire des déclarations publiques.
A Bandjoun, de sources proches du père Fotso, on le dit très affecté par la nouvelle. Le richissime homme d'affaires aurait pris la route très tôt ce matin à destination de Yaoundé pour porter secours à son fils, l'arrestation et le transfert expéditif de son fils ne lui ayant pas laissé le temps de réagir. Cette arrestation du fils de Victor Fotso surprend plus d'un observateur quand on sait les relations qui unissent le chef de l'Etat Paul Biya et ce dernier, sans compter la générosité débordante de Fotso quand il faut soutenir les institutions et les personnes qui les incarnent. L'Institution Universitaire de technologie Fotso Victor qui porte son nom, la préfecture du Koung-Khi, l'hôtel de ville de Bandjoun, tous construits à l'aide de ses fonds propres et remis à l'Etat.
A la mairie de Bandjoun, aucun signe de désolation n'est perceptible, par contre au domicile de Fotso Victor, une grande messe d'action de grâce et de supplication est entrain d'être dite et le kyrie est chanté à profusion pour implorer la clémence du ciel.
© THIERRY NYOPE | Dikalo
Ils sont nombreux à avoir perdu le sommeil depuis quelques heures. De nombreux dossiers sont en instance sur la table du chef de l'Etat.
On avait fini par croire que l'Epervier a pris du plomb dans l'aile. Mais depuis la mise en détention provisoire d'Yves Michel Fotso, l'ex Administrateur directeur général de la défunte Camair, le 1er décembre dernier, la psychose s'est une fois de plus installée au sein du sérail. Et apparemment aux dernières nouvelles, le mot ne serait pas assez fort pour traduire ce qui se passe maintenant. Surtout que selon certains analystes, l'année 2011 s'annonce riche en rebondissements sur le plan politique, dans la mesure où elle marque un tournant décisif dans la gestion des affaires du pays. Parce que si on se fie au calendrier électoral, les Camerounais seront appelés à choisir leur président de la République dans quelques mois. Et Paul Biya, président sortant et «candidat naturel» du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc)- parti proche du pouvoir donc candidat à sa propre succession, voudrait certainement marquer les esprits de ses compatriotes qui croupissent par millions sous le poids de la pauvreté.
Au sein de l'appareil gouvernemental et du sérail, cela se sait. Il se susurre même dans les salons feutrés que Paul Biya à travers le coup de mercredi dernier vient, comme a ses habitudes, tente de réactionner sa machine propagandiste. Malheureusement, dans sa logique de sauver un septennat auquel les sceptiques peinent à trouver un relief significatif, il devra sacrifier quelques têtes et non des moindres.
Psychose
On se souvient pour ce faire que plus d'une soixantaine de dossiers de membres du gouvernement, directeurs généraux et hommes d'affaires prospères, font depuis quelques temps l'objet d'une attention particulière de sa part, ainsi que celle des autorités en charge de la gestion de l'opération Epervier. Ce qui fait que ceux dont les noms avaient été avancés indirectement ou directement par Amadou Ali, le vice-Premier ministre, ministre en charge de la Justice et Garde des sceaux, vivent désormais dans l'angoisse, à l'idée de savoir qu'ils peuvent être cueillis d'un moment à l'autre comme les autres victimes de cette opération.
Cette peur est d'ailleurs légitime et cela va de soi. Parce que selon des sources dignes de foi, les dossiers de plusieurs personnalités viennent d'être bouclés après un travail de fourmis abattu par les éléments d'Amadou Ali.
Evalués à 64 suspects au départ, la moisson des arrestations des personnes suspectées de crime économiques à été très maigre jusqu'ici. On parle à peine d'une vingtaine de personnes écrouées dans les différentes cellules du pays. Ce qui a laissé croire au sein de l'opinion nationale que ces quelques arrestations étaient justes une opération d'épuration qui avait pour but de mettre hors d'état de nuire les concurrents potentiels du «candidat naturel» du Rdpc.
Olivier Vallée, économiste, consultant pour le Fmi, soulignait d'ailleurs dans cette lancée, que «l'Opération Epervier ressemble à une opération d'épuration au sein des élites camerounaises. Il y a bel et bien, dans cette opération, à la fois la disparition d'un certain nombre de potentiels concurrents politiques, mais aussi d'alliés politiques.» Pour cet économiste, il s'agit d'«une tactique de pouvoir qui le (Paul Biya) replace d'une certaine façon comme le magistrat suprême de la société camerounaise, c'est-à-dire pas simplement un arbitre politique, mais un décideur du Bien et du Mal dans son pays.»
Et puisqu'on parle du bien, et du mal, nos sources font état de ce que l'ancien ministre délégué auprès du ministre de la Communication et ancien directeur général de la Cameroon radio and télévision (Crtv), est dans de salles draps. Son dossier serait entièrement bouclé. La gestion de celui qui a dirigé pendant 17 ans la radiotélévision d'Etat (1988-2005) au point de faire corps avec ces médias par son omniprésence à l'antenne, serait au centre de cette affaire. Gervais Mendo Ze au cours de son audition par le Contrôle supérieur de l'Etat s'en est tiré avec des amendes spéciales. Tout en se déclarant incompétent, le Consupe a demandé entre autres à l'ancien directeur général de la Crtv de rembourser 2,6 milliards Fcfa au Trésor public, tout en étant mis à la disposition de la Chambre des comptes.
Question de temps
Le nom de Louis Bapès Bapès, le ministre des Enseignements secondaires (Minesec), est également avancé dans la liste de ces fossoyeurs de la fortune publique dont les dossiers seraient déjà bouclés. On se rappelle que ses plus proches collaborateurs parmi lesquels son ancien secrétaire d'Etat, Catherine Abena, son délégué régional du Centre, Simon Pierre Amougui, Nicodème Akoa Akoa, inspecteur des services, dame Minlo'o, contrôleur financier ont été inquiétés il y a quelques temps et certains sont encore écroués à la prison de Kondengui. On se rappelle qu'ils avaient été entendus plusieurs fois à la direction de la police judiciaire dans des dossiers de malversations financières liés entre autres aux frais d'examen et à la gestion de certains marchés dans son département ministériel. A cette époque deux commissaires de police judiciaire avaient été relevés de leur fonction parce qu'ils auraient vendu la mèche aux deux intéressés contre de fortes espèces sonnantes et trébuchantes. On avait alors souligné que c'est sa casquette de ministre en fonction qui avait certainement empêché son arrestation.
D'autres sources avancent le nom de l'ancien ministre de l'Economie et des Finances, Michel Meva'a m'Eboutou. Il serait impliqué, comme le ministre Engoulou, dans le dossier de liquidation de l'ex-Oncpb. Ils avaient d'ailleurs déjà été entendus sur la question à la Dpj. Il s'agirait d'une créance qui n'a pas été reversée dans les caisses de l'Etat. L'avocat Me Lydienne Eyoum, interpellée également était chargée de recouvrer la créance auprès de la banque débitrice. Il en est de même de Me Célestin Maah qui devait effectuer des saisies sur le compte de liquidation. En tant que ministre de tutelle, Michel Meva'a m'Eboutou a de bonnes raisons de trembler même si les observateurs pensent qu'il serait difficile pour le chef de l'état de coffrer à nouveau l'un des siens.
Les cas Inoni Ephraïm et de Marafa Hamidou Yaya sont également dans le collimateur de la justice. Certains de leurs nombreux complices dans l'affaire Albatros croupissent déjà dans les prisons de Kondengui. Ce ne serait donc plus qu'une question de temps. D'ailleurs, le régisseur de la prison centrale de Yaoundé Kondengui a reçu des instructions fermes pour accueillir dans de bonnes conditions de nouveaux pensionnaires.
ARRESTATION D'YVES MICHEL FOTSO:
Un mauvais cadeau de fin d'année à l'empire Fotso
© PIERRE GOUANEZ | Dikalo Vendredi 03 Décembre 2010
L’arrestation et la mise en détention préventive du fils du milliardaire de Bandjoun a sonné comme le glas au sommet de l’empire Fotso et de la communauté de l'Ouest toute entière.
Le 02 décembre 2010 restera gravé dans la mémoire du peuple Bandjoun et de la population de l'Ouest comme le pire des cauchemars. Devant les kiosques à journaux, les cafés, dans les marchés et les bureaux, un seul commentaire anime les conversations: c'est l'affaire de l'arrestation d'Yves Michel Fotso. Tous les commentaires sont permis. Certains pensent qu'il serait arrêté à cause de l'affaire Albatros et la Camair; d'autres estiment que c'est à cause de l'affaire CBC et la lettre d'Yves M. F qui ont poussé le ministre des Finances à faire des déclarations publiques.
A Bandjoun, de sources proches du père Fotso, on le dit très affecté par la nouvelle. Le richissime homme d'affaires aurait pris la route très tôt ce matin à destination de Yaoundé pour porter secours à son fils, l'arrestation et le transfert expéditif de son fils ne lui ayant pas laissé le temps de réagir. Cette arrestation du fils de Victor Fotso surprend plus d'un observateur quand on sait les relations qui unissent le chef de l'Etat Paul Biya et ce dernier, sans compter la générosité débordante de Fotso quand il faut soutenir les institutions et les personnes qui les incarnent. L'Institution Universitaire de technologie Fotso Victor qui porte son nom, la préfecture du Koung-Khi, l'hôtel de ville de Bandjoun, tous construits à l'aide de ses fonds propres et remis à l'Etat.
A la mairie de Bandjoun, aucun signe de désolation n'est perceptible, par contre au domicile de Fotso Victor, une grande messe d'action de grâce et de supplication est entrain d'être dite et le kyrie est chanté à profusion pour implorer la clémence du ciel.