L’opération épervier vient une fois de plus de se propulser sur le devant de la scène, il y a quelques jours avec la condamnation de plusieurs hautes personnalités à des peines d’emprisonnement ferme. A l’issue du procès interminable qui aura tenu en haleine l’opinion publique ainsi que la presse nationale et internationale, l’espace d’un week-end, Marafa Hamidou Yaya, la figure la plus marquante de la bande, écope de 25 ans de prison ferme.
Il est, après Titus Edzoa, le second ex ministre d’Etat secrétaire général à la présidence de la République à être officiellement condamné par une juridiction camerounaise. L’initiative de lutter contre la corruption ne peut qu’être louable, peu importe le pays où on se trouve. Elle est d’autant plus bénéfique et vraie lorsqu’elle n’est ni un concept à nous imposé par la communauté internationale, ni une espèce d’épée de Damoclès prompte à abattre toute personne, qui un jour, a eu l’outrecuidance de lorgner, même l’instant d’un battement de paupières, le trône du Prince.
Au Cameroun,ce n’est malheureusement pas le cas. Le simple fait, pour une personnalité de s’imaginer dans un costume de présidentiable est un délit très préjudiciable pour quiconque s’y aventurerait. Mais aussi, et c’est lamentable, tous ceux des proches de Paul Biya qui ont accepté de faire le deuil sur leurs ambitions présidentielles, bien qu’aucun texte réglementaire ne le leur interdise, peuvent aussi saccager les caisses de l’Etat sans jamais être inquiétés.
C’est pourquoi, vue sous cet angle, nous disons que l’opération épervier est une entreprise biaisée et subjective qui favorise la manifestation d’une justice à deux vitesses sous le regard complice, amusé et cynique du véritable procureur de la République qui n’est autre que Paul Biya en personne.
Comment expliquer que des personnalités telles que Gervais Mendo Ze, Edouard Akamé Mfoumou, et bien d’autres, qui jouissent de fortunes colossales, injustifiables par leurs seuls salaires et avantages de service, puissent encore circuler librement. Entre autres, Edouard Akamé Mfoumou a eu à loger, de manière tout a à fait malsaine, des recettes fiscales relatives à la taxe sur la valeur ajoutée dans des comptes ouverts au sein des banques commerciales, au lieu de les reverser simplement dans les caisses du trésor public du temps où il était ministre des finances en 2008.
Plusieurs proches de l’ex directeur général de la Cameroon Radio Television(Crtv) à l’instar de Patricia Enam, Nadine Patricia Mengue conscientes de leur culpabilité et dans la peur d’éventuelles poursuites judiciaires contre leur mentor, avaient vite fait de fuir vers l’Occident. Mais, Gervais Mendo Ze n’a jamais voulu voir plus loin que la voix du cénacle, sa chorale qu’il a mise sur pied lors de son passage à la Crtv. C’est pourquoi aussi il ne peut être inquiété. C’est tout juste si le conseil de discipline budgétaire et financière (CDBF) l’a égratigné officiellement pour faute de gestion il y a quelque temps en lui demandant de payer une « amende spéciale » de 2 millions de francs Cfa alors que le préjudice causé à la Crtv qu’il a dirigée entre 1988 et 2005 se chiffrait à 2,6 milliards de francs Cfa ! Pendant ce temps, Titus Edzoa git depuis plus de 15 ans dans les cellules du secrétariat d’Etat à la défense pour... détournement de deniers publics ! Ce dernier cas a ceci de particulier que les preuves du délit ont été rassemblées de toute urgence peu après que l’ex Sgpr se soit déclaré candidat à l’élection présidentielle en 1997.
L’annonce de la mise en place du tribunal criminel spécial amendé en juin 2012 illustre la volonté perverse du chef de l’Etat de couvrir les délinquants à col blanc.
La création de cette curieuse institution judiciaire, permettra à tout détourneur de deniers publics de négocier sa libération contre remboursement. D’ici, nous pouvons imaginer le profil des personnalités qui pourront bénéficier de ces dispositions du Tribunal criminel spécial.
Le seul critère qui rendra éligible ou pas c’est :
s’être vu ou pas, une fois dans sa vie, dans la peau d’un éventuel
successeur du « Nnom Ngui ». Jean-Marie Atangana Mebara, et sa nébuleuse
vraie ou supposée du G11 ne pourront pas y aspirer.
Marafa Hamidou Yaya qui a eu le courage en 2004 lors des élections présidentielles, de dire à Biya de ne plus se représenter
en 2011 ne pourra pas non plus négocier avec le tribunal criminel
spécial pour le remboursement des 31 millions de dollars dont il est
accablé avec ses comparses.
Par contre, certaines personnalités au fond du bagne aujourd’hui, pourraient en bénéficier juste parce que leur arrestation certes fondée sur la prévarication était d’abord liée à un souci d’équilibre régional dans les différentes interpellations.
Tant il est vrai qu’au début de l’opération épervier, la totalité des accusés étaient originaires de l’aire culturelle Béti-Boulou-Fang. Ce n’est que bien longtemps après qu’on a commencé à entendre des noms comme Alphonse Siyam Siéwé, Haman Adama, Mforjindam et autres.
condamné à 25 ans de prison au même titre que Marafa et Yves Michel Fotso, est introuvable.
Note de la rédaction de Camer.be
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