Opération Épervier-Affaire Marafa: Pourquoi un procès en vitesse
YAOUNDÉ - 18 Juillet 2012
© Claude Tadjon | Le Jour
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C’est
inédit, depuis le lancement de l’opération Epervier, qui a vu certains
prévenus attendre 18 mois sans rencontrer un juge d’instruction ou
quatre ans pour être fixés sur leur sort.Le procès de Marafa Hamidou
Yaya, Yves Michel Fotso et autres s’ouvre trois mois, jour pour jour,
après l’interpellation du premier
Opération Epervier: Un procès chrono en main pour Marafa
Les audiences se dérouleront tous les jours, dès le 24 juillet prochain, promet le président du tribunal. L’instruction judiciaire est maintenant clôturée, mais les avocats n’ont toujours pas exercé un droit essentiel reconnu à la défense: l’accès aux pièces du dossier. Me Abdoul Bagui, l’un des avocats de Marafa Hamidou Yaya, contacté hier en mi-journée par Le Jour, a confié qu’il se trouvait au palais de Justice, pour essayer d’obtenir les pièces du dossier. Au lendemain de l’ouverture du procès. Lundi, à l’ouverture du procès, Me Patrice Monthé, lui aussi avocat de Marafa Hamidou Yaya, s’est alarmé. Une semaine pour consulter un dossier «aussi volumineux», c’est peu, dit-il. «Ne confondons pas la vitesse à la précipitation. Il n’est pas possible qu’en huit jours, on puisse avoir sereinement accès au dossier». Le minimum, pour son confrère Me Bagui, c’est 15 jours, pour préparer la défense et discuter avec leur client. Les avocats de Yves Michel Fotso, eux, demandaient trois semaines. Mais le juge Gilbert Schlick, président du tribunal, se montrera inflexible: «Il n’est pas possible de renvoyer cette affaire au-delà de 8 jours», tranchera-t-il. Comme raison officielle de ce délai court, le juge évoquera un calendrier serré, avec une succession d’affaires qui doivent débuter, entre autres, l’affaire du bébé volé de Vanessa Tchatchou. Déjà, à l’ouverture du procès, Gilbert Schlick avait donné le ton, indiquant que la procédure allait être accélérée. Dès le 24 juillet, les audiences se tiendront tous les jours. Interrogé sur son appréciation à propos de cette célérité, Me Abdoul Bagui dit qu’il n’a pas de réaction. «Nous sommes sereins», lâche-t-il cependant, l’essentiel étant, pour lui, d’obtenir rapidement les pièces du dossier. Jugement sommaire Le procès de Marafa Hamidou Yaya, Yves Michel Fotso et autres s’ouvre trois mois, jour pour jour, après l’interpellation du premier. C’est inédit, depuis le lancement de l’opération Epervier, qui a vu certains prévenus attendre 18 mois sans rencontrer un juge d’instruction ou quatre ans pour être fixés sur leur sort. Me Hyppolite Meli, avocat au barreau du Cameroun et président de l’assemblée générale de l’Ordre des avocats, affirme qu’il fallait s’y attendre. "Le nouveau texte sur le tribunal criminel spécial a prescrit l’accélération des procédures. En attendant l’implantation effective de ce tribunal, ils [les gouvernants, ndlr] ont étendu ses règles de procédure aux tribunaux ordinaires", analyse l’avocat. Ainsi donc, au cancer de la légendaire lenteur judiciaire, le pouvoir substitue un autre mal, pire, le jugement sommaire. "C’est dangereux, tout le monde l’a décrié. La défense a les mains liées. L’accélération des procédures obéit à la philosophie du texte créant le Tcs", commente Me Meli. Marafa Hamidou Yaya, ex-secrétaire général de la présidence de la République, est donc le premier prévenu de l’opération Epervier à se frotter à cette nouvelle philosophie. Il est le premier dont le procès se déroulera tous les jours ouvrables. Il était déjà, avec Yves Michel Fotso et Polycarpe Abah Abah, le premier pensionnaire de la prison secondaire de Yaoundé VIème, logée dans le camp militaire du secrétariat d’Etat à la Défense. Ceci expliquant probablement cela, il a aussi été le premier, depuis le cachot, à faire des révélations fracassantes sur la corruption et la cupidité d’une fraction de l’élite dirigeante du pays. Un prisonnier bien particulier. |
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