Notre ami Me Jacques Vergès nous a quitté ce 15 août ...
« Une journaliste danoise m'a demandé : « Comment
pouvez-vous vouloir défendre Milosevic ? » Je lui ai répondu ceci : «
Vous vous croyez démocrate, mais votre réflexion est fasciste ! ». Car
c'est seulement dans les régimes fascistes que certaines causes ne
peuvent pas être défendues » - Jacques Vergès (interview pour Le Soir)
« Je ne crois pas en la justice pénale internationale ! » - Jacques Vergès (Dictionnaire amoureux de la justice)
On
vient d'apprendre le décès de l'avocat Jacques Vergès, à l'âge de de 88
ans. C'est BFM TV qui révèle cette info. Cet homme de loi s'était rendu
célèbre pour avoir défendu notamment le président yougoslave Slobodan
Milosevic ou l’humble jardinier Omar Raddad.
Une vie engagée
Avocat de réputation mondiale, Jacques Vergès fut résistant,
communiste patriote et militant anticolonialiste. Défenseur des causes
radicales, au carrefour du politique et du judiciaire, il a associé son
nom à de nombreux procès sulfureux, acceptant les causes maudites dont
aucun avocat ne voulait (Klaus Barbie, Moussa Traoré, Paul Barril, Omar
Raddad, le tueur en série Charles Sobrhraj, le préfet Bernard Bonnet
...), ou encore les grands procès politiques (Georges Ibrahim Abdallah,
Moussa Traoré, Carlos, Slobodan Milosevic, l'un des by Savings Wave">avocats de la Fraction Armée Rouge Klaus Croissant, Magdalena Kopp, notamment ...) .
Né
en 1925 d'un père réunionnais et d'une mère vietnamienne il est le
frère de Paul Vergès, ancien député communiste de la Réunion, président
du conseil régional et sénateur communiste de La Réunion.
Dans son "carnet d'adresses",
on retrouve également le nom de Pol Pot, au Cambodge, dont il est
soupçonné d'avoir été l'un des conseillers. Le révolutionnaire Carlos et
le président ivoirien Laurent Gbagbo figurent également parmi ses
clients célèbres. Né en 1925 en Thaïlande, Maître Vergès avait obtenu
une certaine notoriété durant la guerre d'Algérie, après avoir défendu
les accusés du FLN. Et inventé sa fameuse « défense en rupture », politisation radicale du procès où l’accusé devient accusateur et le Système coupable.
Il
avait notamment défendu Omar Raddad et attaqué – à nos côtés et ce fut
un des grands honneurs de ma vie militante – le pseudo Tribunal pénal
international, chargé de juger des crimes commis dans l’ex-Yougoslavie,
assimilé par lui fort justement « aux sections spéciales de Vichy ».
Maitre Jacques Vergès, qui assurera aussi la défense de Saddam Hussein, est le « défenseur des causes perdues le plus médiatique et le plus mystérieux du barreau de Paris »,
dira le Nouvel Obs. De petite taille, rond, le visage lisse et
ironique, amateur de havanes et de pêche à la ligne, Me Vergès, 80 ans,
s'est rendu célèbre par les clients "indéfendables" dont il a assuré la défense devant les tribunaux.
Il ne cachait pas « son goût de la déstabilisation et de la provocation » et se flattait non sans raison de son "pouvoir" engendré « par la fréquentation de personnalités politiques du monde entier et de militants de l'ombre ».
Un grand résistant: A 17 ans dans les FFL, puis dans le combat anticolonialiste...
Né
en Thaïlande, de père français et de mère vietnamienne, Me Vergès passe
son enfance à La Réunion. Il s'engage à 17 ans dans les Forces
Françaises Libres du général de Gaulle, puis adhère en 1945 au Parti
communiste. Il réside à Prague de 1951 à 1954 comme cadre du mouvement
communiste international. Fin 1955, le jeune avocat milite pour le FLN
algérien. Il quitte le PCF en 1957 et épouse Djamila Bouhired, auteur de
plusieurs attentats à la bombe en Algérie.
De 1970 à 1978, il disparaît. "Je suis passé de l'autre côté du miroir. C'est ma part d'ombre", dira-t-il. Selon certaines sources, il aurait travaillé clandestinement avec Pol Pot et les Khmers rouges.
Il a notamment défendu devant les tribunaux des militants du FLN pendant la guerre d'Algérie
Partisan de la justice populaire
Il s’était toujours opposé à la justice bourgeoise et prônait une justice populaire (une des bases de la Démocratie Directe).
« Etes-vous un inconditionnel du jury populaire ? » interrogeait Le Soir (Bruxelles). Vergès de répondre :
« Tout ce qui est humain est susceptible d'erreur. Mais la justice
populaire donne la garantie d'une indépendance que la magistrature n'a
pas. Parce que vous trouvez aussi, dans la magistrature, l'esprit
corporatiste. La Cour ne va pas désavouer le juge d'instruction. Et le
juge ne va pas désavouer le policier - qui, souvent, a fait le travail à
sa place ! »
Le Soir, hostile, interrogeait à nouveau : « Le
jury populaire, c'est un maillon de la démocratie. Or, on a souvent
l'impression que vous êtes en délicatesse avec les démocraties, en
défendant des dictateurs, des terroristes, des « collabos ». »
Et Vergès, cinglant : « Une journaliste danoise m'a demandé : «
Comment pouvez-vous vouloir défendre Milosevic ? » Je lui ai répondu
ceci : « Vous vous croyez démocrate, mais votre réflexion est fasciste !
». Car c'est seulement dans les régimes fascistes que certaines causes
ne peuvent pas être défendues ».
UNE ETHIQUE MILITANTE. L’HONNEUR CONTRE LE FRIC-ROI …
Vergès
était surtout un homme droit, dirigé par une éthique révolutionnaire –
que je partage totalement et qui guide aussi ma vie – , où l’honneur
s’oppose au fric-roi de la Société bourgeoise.
Vergès affirmait dans « L'apartheid judiciaire » (et il n’y a rien a y ajouter) : « Dans
un passé pas si lointain, le courage à la guerre était une valeur
sacrée. Rappelons-nous Léonidas et ses trois cents Spartiates mourant à
Thermopyles pour obéir aux lois de Sparte. Le sacrifice de la vieille
garde à Waterloo. Le sacrifice du roi Lazare face aux Ottomans. Ou
encore le courage des défenseurs de Stalingrad. C'est ce que l'on
appelait l'honneur. Le mot figure sur les drapeaux de la République en
France. ... Hitler a mis fin à tout cela. Pour lui, ses adversaires ne
pouvaient être que des sous-hommes. »
Et il concluait, rappelant les affinités idéologiques occultées entre Nazisme et Américanisme : « Aujourd'hui
les disciples de l'OTAN professent le même mépris, chargé de peur et de
haine, contre ceux qui contestent leur droit à l'hégémonie. Le racisme
est simplement remplacé par l'idéologie des Droits de l'Homme, dans la
version exclusive des généraux Westmoreland, Powell et Clark, bourreaux
des peuples du Viêt-nam, d'Irak et de Serbie. Le procédé n'est pas
nouveau. C'est toujours au nom d'un idéal détourné que les conquérants
justifient leurs agressions et leur sauvagerie. ...
Aujourd'hui
c'est au nom des Droits de l'Homme qu'on tue les civils dans les
Balkans, qu'on affame les enfants en Irak et qu'on fait refleurir le
pavot en Afghanistan. »
Un auteur prolixe
Me Vergès est l'auteur d'un grand nombre d'ouvrages, notamment :
- De la stratégie judiciaire, Editions de Minuit, Paris 1981 ;
- Beauté du crime, Plon, Paris 1988 ;
- Je défends Barbie (avec une préface de Jean-Edern Hallier), Jean Picollec, Paris 1988 ;
- J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans, J'ai lu, Paris 1999 ;
- avec Pierre Marie Gallois, L'apartheid judiciaire, L'age d'Homme, Lausanne 2002.
Nos combats communs
Nous avions combattu ensemble au sein du "COMITE INTERNATIONAL POUR LA DEFENSE DE SLOBODAN MILOSEVIC" (ICDSM)
(*) – dont il était le Conseil et moi le président -, étroitement de
2002 à 2006, organisant entre La Haye et Paris, la défense du Président
Milosevic détenu dans les geôles de l’OTAN – dont le pseudo TPI n’est
qu’un appendice honteux – à La Haye.
Le combat pour Milosevic
fut long et difficile. Parce que nous devions combattre sur tous les
fronts : contre les médias de l’OTAN, la machine du TPI, les
médiamensonges. Mais aussi contre un ennemi intérieur, des militants
trotskistes et sionistes, à New-York et aux Pays-Bas, infiltrés dans nos
rangs et qui sabotaient sans cesse notre action, semant la zizanie …
Moent
fort de notre combat, le seul débat public ayant jamais opposé les
porte-paroles du TPI et Vergès et moi-même sur la chaîne de télévision « LCP-PUBLIC SENAT » (Paris) et qui tourna à la défaite des domestiques de l’OTAN (**).
Nous
nous étions encore retrouvé lors de la défense de Saddam Hussein, de la
Jamahiriya libyenne de Moammar Kadhafi – il avait comme moi été un des
rares à aller apporter son soutien à Tripoli sous les bombes de l’OTAN
au triste printemps 2011 -, et celle du président ivoirien Gbagbo …
La
mort de Jacques Vergès laissera un grand vide. Irremplaçable. Il était
de ceux dont la compagnie illuminait une rencontre. Simple et
sympathique aussi. Je me souviendrai toujours de sa gentillesse lors
d’un dîner dans un chinois à La Haye avec des militants ouvriers
liégeois du PCN. J’avais un camarade …
Luc MICHEL
avec PCN-SPO / 2013 08 16 /
http://www.lucmichel.net/
https://www.facebook.com/Pcn.luc.Michel
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(*) Le "Comite International pour la Défense de Slobodan Milosevic" (ICDSM en anglais) est né en mai 2001.
L'arrestation
du Président Milosevic avait suscité un vaste mouvement international
de soutien à l'ancien président yougoslave, mais aussi aux autres
patriotes yougoslaves pourchassés par le soi-disant "Tribunal Pénal International"
ou détenus dans les geôles de La Haye, et le lancement de plusieurs
initiatives internationales et pétitions. Notamment celle du PCN, alors
très engagé dans la défense de la Yougoslavie. Pour de nombreux
militants progressistes, Slobodan Milosevic est alors le symbôle de la
Résistance aux diktats du Nouvel Ordre Mondial et de ses maîtres de
Washinton et de l'OTAN.
Début mai 2011 est créé le "International Committee to Defend Slobodan Milosevic" (ICDSM), qui diffuse une pétition internationale largement soutenue et qui a recueilli plusieurs centaines de milliers de signatures, dont celle de 92 députés (sur 130) de la Chambre haute (conseil de la Fédération) du Parlement russe.
L'ICDSM a reçu l'adhésion de nombreuses personnalités
internationales, notamment Ramsey Clark (ancien procureur général des
USA), Harold Pinter, ou encore Guenady Ziouganov, le président du PCFR.
Il est présidé à ses débuts par le Professor Velko Vlkanov, Député au
Parlement de Sofia et Président de l'"Union Antifasciste Bulgare". En
mai 2011, la première, est fondée sous la présidence de Luc MICHEL sa
« section francophone » (Belgique, France, Suisse, Québec). Qui sera la
seule à se structurer solidement : personnalité juridique, websites,
newsletter, bulletin imprimé « Solidarité Milosevic », affiches et
autocollants … Et la seule aussi à accéder aux grands médias français et
suisses.
(**) Emission « Paroles d’Europe » sur LCP SENAT. Une émission présentée par Caroline de Camaret et « destinée
à mieux faire connaître les enjeux européens et l'impact de la
construction européenne sur la vie quotidienne des Français. En direct le lundi 8 avril 2002, sur le thème « FAUT-IL JUGER MILOSEVIC ? ».
Avec
Luc MICHEL(ICDSM), Christian CHARTIER, porte-parole officiel du TPI,
Maître Jacques VERGES, avocat de Slobodan Milosevic, Patrick BAUDOIN,
président d’honneur de la Fédération
Internationale des Droits de l’Homme.
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Photo
: La défense du Président Milosevic contre le pseudo TPI. Me Jacques
VERGES et Luc MICHEL, lors du débat sur Milosevic de la TV française LCP
SENAT, Paris (Sénat), avril 2002.