Ni John Fru Ndi: “Je n’ai rien conclu avec monsieur Biya”

YAOUNDE - 03 MARS 2011
© Honoré Feukouo | Le Jour

A mi-parcours d’une tournée à travers le pays, le Chairman du Sdf s’exprime sur ses rapports avec le chef de l’Etat, le cas Pierre Kwemo, la présidentielle de 2011...


John Fru Ndi et Paul Biya (Decembre 2010)
Photo: © LE CAM


Vous effectuez depuis le 18 février une tournée nationale. Après l’étape de l’Ouest, quel bilan pouvez-vous établir?

Je ne peux présenter qu’un bilan positif. Il était question pour moi de transmettre un message, et j’ai constaté que les gens se sont déplacés pour écouter ce message.

J’étais dans le septentrion du pays, j’ai fait le tour de plusieurs villes et je poursuis cette tournée, après l’étape de l’Ouest, dans d’autres localités du pays.


Quel a été votre message aux militants du Sdf ?

Cela fait 21 ans que nous avons lancé le parti pour changer le Cameroun dans la transparence et par l’élection. Depuis 21 ans, notre message n’a pas changé. Nous, au Sdf, nous prônons la légalité. Vous parlez du bilan du Sdf? La création de ce parti a facilité la liberté d’expression au Cameroun. Aujourd’hui, tout le monde peut s’exprimer grâce à l’action du Sdf. Du temps de Fochivé, qui pouvait parler dans ce pays ? J’ai pris la responsabilité de créer le Sdf. Nous avons lancé ce parti dans la douleur et aujourd’hui, les gens peuvent s’exprimer. C’est grâce à cette action du Sdf que Bello Bouba a pu revenir d’exil du Nigéria ; c’est grâce à cette action du Sdf qu’Issa Tchiroma Bakary a pu recouvrer sa liberté. Le Sdf a ouvert la voie pour tous et continue de lutter pour que cette liberté continue de s’exprimer. Nous combattons maintenant pour que des élections libres et transparentes se déroulent au Cameroun, un Etat de droit. Les Français nous avaient déjà dit, lorsque nous avions boycotté les premières élections, que le système électoral camerounais était pratique. Nous sommes allés à l’élection présidentielle de 1992 et nous avions ainsi pu démontrer au peuple et à tous que la loi était mauvaise. Le Sdf avait gagné cette élection et Dipanda Mouelle de la Cour suprême nous avait indiqué qu’il avait les mains liées par la loi. Qu’il n’était pas en mesure de donner la victoire au Sdf, et encore moins d’annuler cette élection parce que ses mains étaient attachées. Le Sdf a gagné les dernières élections à Yaoundé 2e et à Yaoundé 6e. Deux semaines après la proclamation de ces résultats en faveur du Sdf, on nous dit qu’on a trouvé d’autres urnes ailleurs et le nouveau décompte donne le Sdf perdant, bien évidemment. Qu’est-ce qui nous indique actuellement que cela ne va pas continuer avec Elecam qui est, comme tout le monde le sait une suite logique du Rdpc. Nous voulons dire aux Camerounais que si monsieur Biya ne change pas le système en charge de l’organisation des élections, il n’y aura pas d’élections au Cameroun. Nous voulons un Etat avec un système électoral transparent.


On a constaté ces temps ci des défections au sein du Sdf. Vous avez, par exemple, évoqué le cas de Pierre Kwemo, l’ex-premier vice-président du Sdf qui a quitté le navire…

Je ne suis pas descendu sur le terrain pour parler des individus. Je n’ai aucun souci. Lors de l’escale de l’Ouest, j’ai fait un constat et je l’ai exprimé lors de mon discours. Il y a des gens qui viennent en politique pour avoir de l’argent. Il y en a d’autres qui viennent défendre un idéal. Je dis que les mangues pourries sont toutes tombées et le manguier du Sdf ne porte aujourd’hui que de beaux fruits, des fruits qui sont bien et qui vont faire du bien dans la région de l’Ouest. Dans cette région, depuis quelque temps, et vous êtes bien placé pour constater comme moi, il n’y a plus de litiges entre les militants du parti dans toutes les localités. Les militants travaillent en harmonie, de la base au sommet, sans se tirer dessus, sans se disputer ni pour détruire quelqu’un. J’ai constaté que je parlais là-bas à des militants qui ont le Sdf dans le sang. Les militants véritables qui combattent pour l’idéal du Sdf et non pas des gens qui viennent pour un intérêt particulier. Je ne suis pas là pour insulter quiconque, ni parler d’une personne déterminée. Je suis là pour parler des problèmes du Cameroun et de ce qui concerne l’avenir de ce pays avec des Camerounais.


Vous arrivez à l’Ouest au moment où une grève vient de secouer les principaux marchés de la ville. Le Sdf qui gère toutes les trois mairies de cette ville n’a–t-il pas une part de responsabilité dans ce mouvement d’humeur?

Lors de ma tournée dans le Nord, des gens de la police de monsieur Biya ont laissé entendre que j’étais derrière des tracts. J’ai dit faites attention. A 70 ans, je n’ai plus peur de rien au Cameroun. Si je me tais qui va parler ? Si j’ai à dire, je le dis publiquement, sans utiliser des tracts. Je voudrais ici profiter de l’occasion pour présenter ma compassion et la sympathie du parti à tous les commerçants qui ont vu leurs biens dévastés par l’incendie du marché «A» de Bafoussam. On m’a informé que le délégué du gouvernement a pris la liberté d’augmenter, de manière unilatérale, les prix des comptoirs dans le marché, au grand dam du conseil municipal qui s'y oppose avec des arguments logiques, puisqu’ils défendent l’intérêt de ces commerçants qui sont souvent abandonnés à eux-mêmes par l’Etat. Je voudrais ici rappeler que le délégué du gouvernement, qui est nommé, n’est pas responsable devant le peuple. Ce sont les grands conseillers élus qui ont des comptes à rendre au peuple qui les a élus. Le délégué du gouvernement prend une décision illégale, sans consulter les grands conseillers, et ce sont ceux qui subissent qui expriment leur désapprobation.


Au lendemain de votre rencontre avec le président Paul Biya, beaucoup a été dit mais personne ne vous a entendu parler. Quelle est votre version des faits concernant la rencontre Biya – Fru Ndi ?

Si les gens veulent aller voir Biya et prendre l’argent pour manger, qu’ils le fassent sans passer par le Sdf. Certains m’ont demandé pourquoi je ne me suis pas remarié après le décès de ma femme. Je peux vous assurer que ce n’est pas à 70 ans que je vais recommencer ma vie en me laissant corrompre par quelques billets de banque ou un poste quelconque que va me donner monsieur Biya, comme je l’entends dire. Lorsque je regarde la jeunesse du Cameroun, je comprends tout le sens du combat que nous menons au Sdf. Nous combattons pour la démocratie au Cameroun. J’ai accepté de rencontrer monsieur Biya pour cela. Je n’ai rien conclu avec monsieur Biya. Je redis ce que j’ai dit à M. Biya et que je ne cesse de dire à tout le peuple camerounais : les élections ne peuvent pas se dérouler au Cameroun dans les conditions actuelles, avec Elecam dans cette configuration. Depuis 21 ans, la politique du Sdf est celle des gens qui veulent changer le Cameroun, publiquement dans la légalité, sans passer par le maquis. Ce n’est pas aujourd’hui que je vais trahir le Cameroun et son avenir.


Serez-vous candidat lors de la prochaine élection présidentielle au Cameroun ?

Si des élections se déroulent, c’est le parti qui choisira le candidat du Sdf et non pas moi. Lors de la convention du parti, tous ceux qui ont des ambitions, peuvent se présenter et présenter leur candidature. Celui qui sera désigné à cet instant va être le candidat du Sdf.



09/03/2011
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