L’annonce de son décès au sortir de la célébration du cinquantenaire de la réunification a laissé un goût amer. Mais scrutant les raisons de celui-ci, on en vient à conclure qu’il paie en réalité un lourd tribut à son engagement pour le renforcement de la liberté individuelle et collective .
Sa verve et sa détermination à étaler au grand jour la préséance préjudiciable des cercles ésotériques, auront fait de feu Charles Ateba Eyene un iconoclaste honni par les profiteurs du régime et de ceux qui y gravitent. Aussi l’annonce de son décès officiellement suite à un malaise le 21 février dernier, a-t-elle donné lieu à toutes les supputations, notamment celle de son exécution mystique par ses nombreux adversaires.
Une assertion fondée en ce que l’indisponibilité des experts pouvant assurer son suivi sanitaire est révélatrice, d’une volonté de rétorsion morbide à son encontre. Surtout que les affidés du pouvoir disposaient à l’occasion d’une opportunité unique pour lui faire payer sa présumée insolence doublée d’une défiance permanente articulée sur la dénonciation tous azimuts des tares du régime en place. En effet, bien qu’appartenant au parti au pouvoir, Charles Atéba Eyene n’aura pas quitté ses convictions profondes, selon lesquelles l’on ne saurait envisager l’excellence, en institutionnalisant le népotisme et ce, dans ses formes les plus abjectes tenant de l’appartenance à des sectes.
Une préoccupation dont il aura fait sienne au point de lui inspirer de nombreux ouvrages, les uns plus virulents que les autres. Des ouvrages qui ne lui valurent pas que des fans, eu égard aux menaces qui s’en suivirent, mais aussi et surtout du drame perpétuel qui aura été le sien, avec la perte de son épouse, visiblement sacrifiée par ceux qu’il aura combattus au prix de sa vie.
Sauf-conduit malveillant. C’est le cas de le penser, tant il est vrai qu’en homme averti qu’il était devenu, le défunt Charles Atéba Eyene, ne pouvait négliger son état sanitaire, sachant surtout qu’il souffrait, aux dires des officiels, d’une insuffisance rénale depuis quelques années. Cette assertion nous est dictée par l’hygiène de vie qui aura été désormais la sienne, suite au décès de son épouse, dans des conditions aussi troubles que celles qui l’emporta au final. Mais aussi et surtout au su des menaces dont il faisait l’objet de son engagement citoyen que ses adversaires assimilèrent à tort à quelque détermination à faire échec à la préséance indue des cercles mystico ésotériques sur l’échiquier sociopolitique national et même au-delà.
Plus grave, son indépendance et sa liberté d’esprit en avaient par ailleurs fait, un opposant au sein du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais dont il n’avait de cesse de décrier les insuffisances mais davantage, la propension à user du trafic d’influence pour bénéficier de l’adhésion factice d’opportunistes de tous bords. Suffisant pour le qualifier d’indiscipliné et pire, de militant voguant à contrecourant alors qu’il pensait qu’au travers desdites dénonciations, il oeuvrait à sa manière à recentrer le discours politique de Paul Biya, afin de le rendre conforme à la philosophie qui le sous tend : susciter une culture de l’intégrité, elle-même assise sur la quête permanente de l’excellence.
Mais ignorant très certainement qu’en lieu et place on avait substitué un clientélisme institutionnel, Charles Atéba Eyene était devenu par la force des choses, l’homme à abattre, au propre comme au figuré. Et menant ainsi de front deux combats ayant pourtant les mêmes adversaires, Charles Atéba Eyene, savait ne pouvoir compter que très peu de partisans, aussi ne s’offusque t-il guère de déclarer en son vivant qu’il aura balisé le chemin en dotant l’opinion nationale, d’armes à même de faire reculer la préséance préjudiciable des cercles magico ésotériques dans notre environnement sociopolitique.
Du coup, son influence grandissante au sein de la l’opinion mais aussi et surtout une prise de conscience tardive de quelques cadres du Rdpc s’est muée en menace réelle pour ceux qui, par tous les moyens veulent perpétuer l’arbitraire et surtout sauvegarder des positions dominantes indues.
Aussi ces derniers sont-ils indexés à raison par ceux des adeptes qu’aura réussis à se faire le défunt au travers d’un discours pragmatique et plutôt novateur à bien d’égards.