Marasme économique: Quand un président vieillard plonge dans l’immobilisme
DOUALA - 13 FEV. 2013
© Alain NOAH AWANA | Le Messager
Au moment où le président de la République fête ses 80 ans, il est indéniable que son âge ne lui permet plus de se régénérer. Sur le plan économique, c’est la catastrophe dans de nombreux secteurs.
© Alain NOAH AWANA | Le Messager
Au moment où le président de la République fête ses 80 ans, il est indéniable que son âge ne lui permet plus de se régénérer. Sur le plan économique, c’est la catastrophe dans de nombreux secteurs.
Le 13 février 1933, Mvomeka’a
accueille un nouveau né à qui les parents donnent le nom de Biya bi
Mvondo Paul Barthélémy. Nul ne sait alors, dans cette petite localité du
Sud Cameroun que des décennies plus tard, ce fils de catéchiste sera
l’homme le plus important de la République du Cameroun. 80 ans après,
Paul Biya est président de la République…depuis 30 ans. L’homme aura
traversé toutes les sphères de commandement dans l’administration,
occupé de hauts postes de responsabilités dans le sérail, été au cœur
même de l’évolution socio-politique du pays. Mais, bien plus, il aura
traversé les deux principales périodes économiques de notre pays : sous
l’ère Ahidjo où il a été Secrétaire général à la présidence de la
République et Premier ministre ; et sa propre ère, depuis 1982, comme
chef de l’Etat.
C’est donc dire qu’il a connu la période faste de l’économie, menée de main de fer par son prédécesseur, et la période de déclin dont il est le principal acteur. Car, nul ne l’ignore, l’économie camerounaise est mal en point depuis la fin des années 80, malgré la petite bouffée d’air qu’elle connaît depuis le début du troisième millénaire. Mais, la question est, au regard de l’évolution actuelle des choses, de savoir ce que le président Paul Biya peut encore faire à son âge pour que l’économie camerounaise prenne véritablement son envol, qu’elle sorte de l’immobilisme chronique dans lequel elle est plongée depuis trois décennies ?
Aux yeux de ses portraitistes du sérail et du parti au pouvoir, le Rdpc, le Seigneur d’Etoudi est l’idéal économique auquel devrait aspirer tout prétendant à la magistrature suprême au Cameroun. Pourtant, les arguments tombent parfois comme des mouches face aux réalités vécues par les Camerounais dans leur quotidien. Pourtant, dans tous les secteurs de la vie économique du pays, rien ne va ; et même, la situation est pire que lorsqu’il était encore jeune et débordant d’énergie.
Trois secteurs sans changement
Prenons le secteur de l’agriculture, que Paul Biya a décidé depuis quelques années de présenter comme le pilier du développement économique. Le pouvoir en place estime aujourd’hui que ce secteur, un des principaux pourvoyeurs d’emplois dans le pays, contribue à hauteur de 20% en moyenne du produit intérieur brut. Mais, comment comprendre alors qu’au fil des années, la productivité et même la production n’aient pas progressé. Que ce soit dans les filières cacao et café, coton, maïs, élevage, pêche, etc., les nombreux programmes de relance n’aboutissent pas à une réelle impulsion. Bien au contraire, les politiques mises en place stagnent, les milliards de francs souvent débloqués par les partenaires au développement sont engloutis par des thuriféraires pour d’autres fins, etc.
Quant à l’industrie, qui représenterait environ 17% du Pib selon les chiffres officiels, elle reste de loin embryonnaire. En réalité, l’on ne peut pas véritablement parler d’industrialisation au Cameroun : très peu de sous-secteurs présentent ces critères, en dehors de l’industrie métallurgique dominée par Alucam. Les autres – chimiques, agro-alimentaires, extractives, textiles et cuivre, de matériaux de constructions, etc. – sont représentées par quelques entreprises qui sont toujours presqu’en situation de monopole dans chacun de leur domaine respectif. En fait, comme dans beaucoup de pays africains au Sud du Sahara, l’industrie camerounaise reste tributaire de l’extérieur. Pis encore, la vision des années 70 n’est plus la même : certains analystes pensent même que le pays à nettement reculé, ou tout du moins à fait du surplace ; la plupart des « industries» en place (Alucam, Brasseries, Chococam, Sodécoton, etc.) ayant été créées sous l’ère Ahidjo.
Emergence en 2035 ?
Enfin, il y a le secteur des services. Relevons d’abord que, par rapport aux deux premiers mentionnés ci-dessus, il représenterait presque les deux tiers du Pib camerounais. Mais, là encore, il ne faut pas s’arrêter aux chiffres pour montrer le dynamisme de ce secteur. Prenons juste quelques exemples. Le secteur bancaire, où trois banques se partagent 86% des parts de marchés et où les microfinances prolifèrent dans le désordre (près de 500 répertoriées), se porte plutôt mal. La réforme fiscalo-douanière, qui se borne au guichet unique, est un réel créneau pour un circuit parallèle qui alimente une corruption déjà endémique et institutionnelle. Par ailleurs, le secteur des services est miné par une situation informelle importante : même les petites et moyennes entreprises « répertoriées »par l’Etat ne répondent pas aux normes d’une économie réglementée. Et pour finir avec les clichés – non exhaustifs – il faut noter que c’est un secteur où l’informel a aujourd’hui gagné ses lettres de noblesses ; l’Etat étant incapable de réglementer le secteur.
Comment donc concevoir que le président de la République parle de 2035 comme l’année de l’émergence du Cameroun ? Il serait difficile en effet de croire que le pays pourra attirer véritablement les investisseurs ; ce d’autant plus que le climat des investissements n’est pas encore à même d’attirer les capitaux privés internes et étrangers. On se souvient encore de la visite de travail de Paul Biya en France il ya une dizaine de jours où, toute honte bue, il promettait aux membres du Medef une prochaine loi au Cameroun pouvant attirer davantage les investisseurs.
On le voit bien, Paul Biya, à 80 ans, est loin d’avoir contribué de manière efficace au développement économique du pays, malgré toutes les hautes fonctions qu’il a occupées. Alors qu’il prend en charge les destinées d’un pays en marche vers l’émergence économique, il a multiplié les gaffes au point de n’en faire qu’une loque qui doit tout le temps demander de l’aide aux pays « amis » pour répondre à certains besoins. Le Cameroun aura donc passé son temps dans l’immobilisme économique, et le Prince d’Etoudi aura créé le désarroi dans plusieurs secteurs d’activité. A ce jour, il se base sur les « grands projets structurants » que ce sont, par exemple le port en eau profonde de Kribi et le barrage de retenue d’eau de Lom Pangar, pour faire croire aux Camerounais que la croissance va nécessairement passer par là. De l’immobilisme en fait…
C’est donc dire qu’il a connu la période faste de l’économie, menée de main de fer par son prédécesseur, et la période de déclin dont il est le principal acteur. Car, nul ne l’ignore, l’économie camerounaise est mal en point depuis la fin des années 80, malgré la petite bouffée d’air qu’elle connaît depuis le début du troisième millénaire. Mais, la question est, au regard de l’évolution actuelle des choses, de savoir ce que le président Paul Biya peut encore faire à son âge pour que l’économie camerounaise prenne véritablement son envol, qu’elle sorte de l’immobilisme chronique dans lequel elle est plongée depuis trois décennies ?
Aux yeux de ses portraitistes du sérail et du parti au pouvoir, le Rdpc, le Seigneur d’Etoudi est l’idéal économique auquel devrait aspirer tout prétendant à la magistrature suprême au Cameroun. Pourtant, les arguments tombent parfois comme des mouches face aux réalités vécues par les Camerounais dans leur quotidien. Pourtant, dans tous les secteurs de la vie économique du pays, rien ne va ; et même, la situation est pire que lorsqu’il était encore jeune et débordant d’énergie.
Trois secteurs sans changement
Prenons le secteur de l’agriculture, que Paul Biya a décidé depuis quelques années de présenter comme le pilier du développement économique. Le pouvoir en place estime aujourd’hui que ce secteur, un des principaux pourvoyeurs d’emplois dans le pays, contribue à hauteur de 20% en moyenne du produit intérieur brut. Mais, comment comprendre alors qu’au fil des années, la productivité et même la production n’aient pas progressé. Que ce soit dans les filières cacao et café, coton, maïs, élevage, pêche, etc., les nombreux programmes de relance n’aboutissent pas à une réelle impulsion. Bien au contraire, les politiques mises en place stagnent, les milliards de francs souvent débloqués par les partenaires au développement sont engloutis par des thuriféraires pour d’autres fins, etc.
Quant à l’industrie, qui représenterait environ 17% du Pib selon les chiffres officiels, elle reste de loin embryonnaire. En réalité, l’on ne peut pas véritablement parler d’industrialisation au Cameroun : très peu de sous-secteurs présentent ces critères, en dehors de l’industrie métallurgique dominée par Alucam. Les autres – chimiques, agro-alimentaires, extractives, textiles et cuivre, de matériaux de constructions, etc. – sont représentées par quelques entreprises qui sont toujours presqu’en situation de monopole dans chacun de leur domaine respectif. En fait, comme dans beaucoup de pays africains au Sud du Sahara, l’industrie camerounaise reste tributaire de l’extérieur. Pis encore, la vision des années 70 n’est plus la même : certains analystes pensent même que le pays à nettement reculé, ou tout du moins à fait du surplace ; la plupart des « industries» en place (Alucam, Brasseries, Chococam, Sodécoton, etc.) ayant été créées sous l’ère Ahidjo.
Emergence en 2035 ?
Enfin, il y a le secteur des services. Relevons d’abord que, par rapport aux deux premiers mentionnés ci-dessus, il représenterait presque les deux tiers du Pib camerounais. Mais, là encore, il ne faut pas s’arrêter aux chiffres pour montrer le dynamisme de ce secteur. Prenons juste quelques exemples. Le secteur bancaire, où trois banques se partagent 86% des parts de marchés et où les microfinances prolifèrent dans le désordre (près de 500 répertoriées), se porte plutôt mal. La réforme fiscalo-douanière, qui se borne au guichet unique, est un réel créneau pour un circuit parallèle qui alimente une corruption déjà endémique et institutionnelle. Par ailleurs, le secteur des services est miné par une situation informelle importante : même les petites et moyennes entreprises « répertoriées »par l’Etat ne répondent pas aux normes d’une économie réglementée. Et pour finir avec les clichés – non exhaustifs – il faut noter que c’est un secteur où l’informel a aujourd’hui gagné ses lettres de noblesses ; l’Etat étant incapable de réglementer le secteur.
Comment donc concevoir que le président de la République parle de 2035 comme l’année de l’émergence du Cameroun ? Il serait difficile en effet de croire que le pays pourra attirer véritablement les investisseurs ; ce d’autant plus que le climat des investissements n’est pas encore à même d’attirer les capitaux privés internes et étrangers. On se souvient encore de la visite de travail de Paul Biya en France il ya une dizaine de jours où, toute honte bue, il promettait aux membres du Medef une prochaine loi au Cameroun pouvant attirer davantage les investisseurs.
On le voit bien, Paul Biya, à 80 ans, est loin d’avoir contribué de manière efficace au développement économique du pays, malgré toutes les hautes fonctions qu’il a occupées. Alors qu’il prend en charge les destinées d’un pays en marche vers l’émergence économique, il a multiplié les gaffes au point de n’en faire qu’une loque qui doit tout le temps demander de l’aide aux pays « amis » pour répondre à certains besoins. Le Cameroun aura donc passé son temps dans l’immobilisme économique, et le Prince d’Etoudi aura créé le désarroi dans plusieurs secteurs d’activité. A ce jour, il se base sur les « grands projets structurants » que ce sont, par exemple le port en eau profonde de Kribi et le barrage de retenue d’eau de Lom Pangar, pour faire croire aux Camerounais que la croissance va nécessairement passer par là. De l’immobilisme en fait…