La première sortie de l’ex-ministre de l’administration territoriale et de la décentralisation (Minatd) aujourd’hui interpellé dans l’affaire de l’acquisition d’un aéronef présidentiel a donné quelques clichés sur son niveau de popularité. Dans la cour du Tgi du Mfoundi ce lundi 16 juillet, Marafa a été accueilli sous des salves d’applaudissements par une énorme foule, rapporte des confrères qui ont couvert cette audience à Yaoundé. Les mêmes sources rapportent également que l’accueil s’est fait sous les cris de « Président !». Au sortir de son audience, l’accusé s’est même offert un bain de foule digne de ce nom, rapporte encore nos sources. Des faits, moins anodins, qui conforteraient cet accusé dans la posture d’un présidentiel.
En effet, depuis son interpellation le 16 avril dernier, l’ex-ministre Marafa a décidé de faire parler de lui, à travers une intense activité épistolaire. Des lettres, tantôt adressées au Président de la République ou à des citoyens camerounais, il en est déjà à la quatrième. Dans celles-ci, l’ex-haut commis de l’Etat étale sur la place publique ses rapports avec le Président de la République. De même qu’il dénonce les manœuvres de corruption de certains de ses anciens collègues. Pire encore, l’homme dévoile ses ambitions de présidentiable, en présentant aux camerounais son projet de société. La stratégie ne plait pas dans les cercles du pouvoir. Des chantres du régime Biya n’hésitent pas à monter au créneau pour tenter de « brouiller » la communication de celui qui reste toujours leur camarade du parti ( ?) Fame Ndongo, Cavaye Yéguié Djibril et bien d’autres étalent l’étendu de leur intelligence en traçant les lignes dans divers colonnes de journaux. Le ministre de la communication s’en mêle aussi. Lui qui avait invité à son temps les journalistes à « froisser » ses lettres et les « jeter » dans la poubelle. A Memve’ele, Paul Biya, lui, aussi ne manquera pas de dire un mot sur cette affaire : « On ne commente pas les commentaires ».
Depuis son interpellation et son incarcération à la maison d’arrêt de Kodengui, Marafa dit ne rien connaître des faits de détournement de 31 millions de dollars dans l’achat du Boeing Business Jet-2 (BBJ-2) pour lesquels il est accusé. Il doit en principe répondre de ces faits en tant que ex-secrétaire général à la présidence de la République. Ledit dossier lui aurait été confié par Paul Biya. Doivent aussi répondre de ces faits : Yves-Michel Fotso et Jean-Marie Atangana Mebara. Pour revenir à Marafa, il dit dans ses lettres avoir sollicité vainement Paul Biya le 7 mai 2008 afin d’être entendu dans cette affaire. Ce qui fait dire à cet ancien ministre que son incarcération n’a rien à avoir avec une affaire judiciaire, il s’agit plutôt d’une affaire politique. Lui qui affirme aussi payer le prix de sa « lucide franchisse » envers le Président Paul Biya. Dans ses lettres, il révèle avoir demandé au Président Paul Biya de ne plus se présenter à la présidentielle de 2004 ; et qu’il a toujours refusé d’apposer sa signature sur les « Appels du peuple » au Président.
Depuis son arrestation donc, le sujet Marafa alimente les conversations au Cameroun. Serait-ce à cause de ses révélations fracassantes ? Difficile d’y répondre. Mais une chose semble évidente : c’est que ces révélations vraies ou erronées seraient un caillou dans la chaussure du régime Biya. Pour éviter d’autres, le régime aurait engagé des « négociations » avec Marafa. Une curieuse démarche pour celui qui a d’abord été écroué à Kondengui le 16 avril 2012 avant d’être transféré au Secrétariat d’Etat à la Défense depuis le 25 mai dernier. La comparution de Marafa devant le juge Schlick alors qu’il avait récusé l’autre juge du nom de Pascal Magnaguémabé est-il un indicateur de ce que les négociations ont été fructueuses ? Si oui, Marafa et le pouvoir ont-ils fait des concessions ? Lesquelles ? Si toutes ces questions ne trouvent pas de réponses pour le moment, une constante demeure : l’accueil présidentiel de Marafa au Tgi du Mfoundi lundi dernier n’est pas un fait banal. L’on attend de voir ce qu’il en sera lors de sa deuxième comparution le 24 juillet prochain. Affaire à suivre …