Lybie: Atrocités sur des noirs africains
Une
série de reportages réalisés à Tripoli ont montré que les forces
appuyées par l'OTAN avaient commis un massacre dans la guerre civile
libyenne. Ces reportages, publiés dans des journaux largement en faveur
de l'intervention des États-Unis et de l'OTAN pour renverser le régime
de Mouammar Kadhafi, viennent une fois de plus exposer le mensonge que
la guerre impérialiste contre la Libye est motivée par des visées
humanitaires et la volonté de protéger les civils.
Le Washington Post a publié samedi un article important intitulé, «
Les meurtres par vengeance se multiplient en Libye : la nouvelle
liberté assombrie par les attaques extrajudiciaires rebelles ». Ce titre fait référence à la contradiction qui existe entre les assertions du Conseil national de transition
(CNT), du nouveau régime libyen soutenu par l'OTAN ainsi que de
l'administration Obama que la Libye a maintenant gagné sa liberté et la
réalité d'un massacre politique et, dans certains cas, racial.
Le journaliste du Post Simon Denyer a affirmé que les troupes de Kadhafi «
ont exécuté des dizaines ou même des centaines de prisonniers
politiques cette semaine, pendant même que les combattants rebelles
victorieux semblaient exercer leurs propres sévices ». Il cite le témoignage de Diana Eltahawy, enquêteuse pour Amnistie internationale en Libye, qui «
décrit les mauvais traitements, la torture et le meurtre
extrajudiciaire de combattants pro-Kadhafi par les rebelles, au fur et à
mesure que ces derniers prenaient contrôle du pays d'est en ouest ».
Le
journaliste lui-même a vu cinq soldats de Kadhafi blessés et mourant
dans un poste médical avancé maintenant patrouillé par les « rebelles »,
laissés sans nourriture, ni eau, ni soins. Il a aussi vu 15 cadavres,
surtout d'Africains noirs et vraisemblablement partisans de Kadhafi,
laissés en décomposition au soleil devant la caserne de Bab al-Azizia où
demeurait une bonne partie de la famille de Kadhafi. Selon Denyer, «
certaines de ces morts ne semblaient pas être survenues au champ de
bataille. Deux hommes morts reposaient face contre terre dans l'herbe,
les mains attachées dans le dos au moyen de menottes plastiques ».
Le service de nouvelles McClatchy a décrit la même scène horrible : «
Les cadavres étaient apparemment ceux de combattants pro-Kadhafi, mais
les victimes n'étaient pas tombées au combat. Certaines avaient été
abattues dans leur tente, possiblement endormies, sans chaussures. Un
homme avait été abattu dans une ambulance et un autre dans un poste
médical avancé, toujours branché à une perfusion intraveineuse. D'autres
avaient subi des blessures par balle derrière la tête, laissant croire à
des exécutions par les combattants rebelles. »
Patrick Cockburn de l’Independent britannique a décrit la même scène dimanche, sous le titre, « Les rebelles se vengent sur les hommes du dictateur ». Il a écrit : «
Les corps en décomposition de 30 hommes, presque tous noirs et
plusieurs menottés, abattus tandis qu’ils étaient étendus sur des
civières et même dans une ambulance au centre de Tripoli, offrent un
avant-goût inquiétant de ce que sera l'avenir de la Libye. Le nouveau
régime fait des déclarations pieuses en disant ne pas vouloir se venger
sur les forces pro-Kadhafi, mais cela ne va pas jusqu’à vouloir protéger
ceux qui pourraient être qualifiés de mercenaires. Tout Libyen ayant la
peau noire accusé de combattre pour l’ancien régime a une faible chance
de survie ».
Amnistie internationale a confirmé que
plusieurs des centaines de milliers de travailleurs migrants de
l'Afrique subsaharienne ont été étiquetés « mercenaires » par
les forces du CNT, en vertu de leur couleur de peau, et ont été victimes
d'emprisonnement, de torture et d'exécutions sommaires.
Un
témoignage à propos de sévices commis à l'endroit des rebelles vient
d'Alex Crawford de Sky News, un réseau de diffusion britannique
appartenant à Rupert Murdoch, qui a soutenu avec enthousiasme les « rebelles ». Le correspondant a été intégré aux forces anti-Kadhafi et à accompagné une unité qui a marché de Zawiya à Tripoli. « Nous le rapportons comme nous le voyons », a-t-il dit. «
Nous avons vu des combattants de Kadhafi ligotés et exécutés. C'est la
guerre. C'est ce qui arrive. Les représailles des rebelles ici sont
vraiment troublantes. »
L'agence de nouvelles britannique Reuters a rapporté la découverte de plusieurs charniers à Tripoli, prétendant qu'ils étaient la preuve « d’exécutions sommaires répandues au cours de la bataille pour la capitale libyenne ». Tout en attribuant le pire massacre aux forces de Kadhafi, quelque 53 corps retrouvés dans un entrepôt brûlé, le rapport de Reuters ajoute: «
des meurtres de sang-froid qui auraient été commis par les deux camps
ont été signalés au cours des derniers jours, assombrissant l'atmosphère
dans une ville où de nombreux résidents avaient salué la chute de
Kadhafi avec joie ».
Le Los Angeles Times a écrit dimanche à propos de «
la violence viscérale et acharnée des forces rebelles dans les
quartiers résidentiels connus pour être des bastions des partisans de
Kadafi. Les combattants rebelles utilisent de l'artillerie et des canons
antiaériens dans de tels quartiers, dont Abou Salim, Hadba et
Salahadin. À un certain moment cette semaine, les rebelles se servaient
de fusils d'assaut dans les immeubles résidentiels à Abou Salim, où ils
soupçonnaient la présence d'un tireur embusqué ».
En
d'autres termes, les forces soutenues par l'OTAN procèdent exactement au
même genre de tirs sans discernement d'armes lourdes dans les quartiers
résidentiels, qui ont servi de prétexte à l'origine l'intervention de
l'OTAN quand Kadhafi a ordonné une action semblable par ses propres
forces. Le témoignage du Times terminait par une citation d’un chauffeur de taxi de Tripoli qui a déclaré au journal: « J'ai peur qu'un jour nous devenions comme les Irakiens, nostalgiques de l'époque de Mouammar Kadhafi ».
Le journal Independent,
dans son article du dimanche en première page, a mis en garde le
Conseil national de transition contre le fait que la barbarie dans les
rues de Tripoli pourrait jouer politiquement contre eux. Il était déjà
assez difficile pour les partisans de l’intervention – comme l’éditorial
du journal même – de tenter de prétendre que Kadhafi procédait au
massacre de civils, mais « cela deviendra presque impossible si la transition d’un régime à l’autre déclenche des exécutions de masse. »
Le
journal britannique a aussi identifié Abdelhakim Belhadj, le commandant
récemment choisi pour diriger le Conseil militaire de Tripoli, comme un
ancien moudjahidine qui « a combattu en Afghanistan aux côtés
des talibans et qui était un islamiste suspecté de terrorisme par la CIA
et interrogé par celle-ci ». Belhadj fut un fondateur du
groupe de combat islamique de la Libye, qui est devenu la filiale
libyenne d’Al-Qaïda après les attaques terroristes du 11 septembre 2001.
Une
image effrayante émerge du nouveau régime qui est en train d’être
consolidé à Tripoli. Il est consolidé dans le sang, tandis que se
déroulent des massacres de civils pro-Kadhafi ainsi que des pogroms
contre les travailleurs africains immigrants. Tout cela se passe sous la
direction d’un allié d’Al-Qaïda qui reçoit ses ordres des quartiers
généraux de l’OTAN et de la Maison-Blanche.
Les crimes commis par
les forces du CNT, appuyées par l’OTAN, démontrent l’hypocrisie de la
campagne de propagande dirigée par l’administration Obama et ses
complices en Grande-Bretagne et en France. Ces pays tentent de justifier
l’offensive militaire contre la Libye, un pays riche en pétrole, au nom
des « droits humains » et de la prévention d’un massacre.
Quelques
journalistes qui sont sur le terrain à Tripoli n’ont pas été en mesure
de fermer les yeux quant au règlement de compte sanglant qui prend
place. Cela est à leur honneur et démontre aussi la position cynique et
réactionnaire prise par les commentateurs de la « gauche » aux
États-Unis et en Europe qui continuent de justifier la guerre
impérialiste contre la Libye et de masquer son caractère prédateur.
Les
évènements se déroulant en Libye constituent une démonstration pratique
pour la classe ouvrière internationale. Ceux qui ont défendu la
perspective d’une intervention « progressiste » par les
puissances impérialistes afin de défendre la démocratie et les droits
humains sont maintenant politiquement impliqués dans d’innommables
crimes. La seule opposition authentique et cohérente à l’impérialisme
est celle qui est conduite sur la base des principes historiques du
mouvement socialiste international, telle que défendue par le World
Socialist Web Site et le Parti de l’égalité socialiste.
Patrick Martin
Word Socialist