Lutte contre la Corruption:Pour l’application de l’article 66 de la Constitution.

 

Publié le 28-07-2016  |  (Kribi - Cameroun). Auteur : OYONO Martin 
 
Lutte contre la Corruption:Pour l’application de l’article 66 de la Constitution.
© OYONO Martin
Lutte contre la Corruption:Pour l’application de l’article 66 de la Constitution.

 

Les dernières sorties de Monsieur Laurent ESSO, ministre d’Etat en charge de la Justice, au parlement à l’occasion de la dernière session de juin et devant la presse pour la communication du gouvernement sur le nouveau code pénal, ont fini par convaincre l’opinion nationale et internationale du manque de volonté du gouvernement à lutter efficacement contre la corruption et les détournements de deniers publics. Et pan ! Voilà que se pose et repose l’éternelle question de savoir quelle politique le gouvernement appliquet-il vraiment pour donner un sens réel aux nombreux discours du chef de l’Etat afin d’assainir les mœurs dans notre pays.


Qui définit la politique de la Nation ?

Le chef de l’Etat ou les membres du gouvernement chacun dans sa chapelle, comme les appelait Paul BIYA lui-même, des « roitelets dans leurs petits royaumes » à l’occasion du congrès extraordinaire de 2006 à Yaoundé ? Oui, à l’évidence, assuré- ment, quelque part, il y a un déphasage certain entre le discours présidentiel et l’implémentation sur le terrain de sa politique par certains de ses principaux collaborateurs. Et les Camerounaiss’interrogent toujours vers quels horizons nous naviguons au regard des déclarations du Garde des Sceaux lors de sa dernière communication, lorsqu’il s’insurge et s’indigne qu’on puisse même interpeller un camerounais soupçonné d’enrichissement illicite.


A se demander dans quel Cameroun vit notre ministre d’Etat en charge de la Justice, tant il y a aujourd’hui, comme il y avait il y a plus de 15 ans, des preuves évidentes des hauts et bas fonctionnaires qui se sont constitués en moins de 10 ans, et même moins, des fortunes colossales au Cameroun et à l’étranger. Heureusement que quelque part Dieu suscite toujours dans un groupe un qui puisse dire la vérité. Et celui là, à notre grande satisfaction, est aussi ministre de la République comme le Garde des Sceaux et de surcroît secrétaire général adjoint de notre grand parti le RDPC, j’ai nommé le ministre Grégoire OWONA.


Merci Monsieur le ministre et cher camarade, car s’il nous était donné de comparaître devant le tribunal de la Rigueur et de la Moralisation prônée par notre Président National, nous serions vous et moi les grands témoins de l’histoire qui sauveraient la barque du Renouveau National. Car en effet, vous avez eu le courage de nous édifier par vos interrogations et constats dans l’édition N° 2223 du journal « Le Jour » lorsque dans ses colonnes, vous faisiez alors l’édifiant diagnostic que voici : « Nous avons dépassé et perdu le sens de la mesure et ayons l’honnêteté et le courage de nous poser certaines questions comme : comment un fonctionnaire de catégorie A2 avec moins de (08) huit ans de carrière ou ministre depuis moins de (10) ans peut-il avoir de nombreuses propriétés au Cameroun et à l’étranger ? Avoir (10) dix voitures dans son parking ? Entretenir cinq, six ou sept ménages quand ce n’est plus ? Voyez-vous, on pourrait demander que la loi soit moins dure, il appartient aux magistrats d’apprécier ou nous pourrions même envisager la révision des lois actuelles ? »

Malheureusement tout cela votre collègue de la Justice n’en a pas certainement connaissance, lui qui a eu le mérite d’occuper de prestigieuses fonctions dans la 1èrerépublique et quisait mieux de quiconque la valeur sacrée que l’Etat accordait aux deniers publics ! Cinq cent mille francs (500.000 FCFA) détournés pour une peine de prison à vie, comparé au milliard détourné aujourd’hui en moyenne, quelle peine devrait-on infliger aux contrevenants ?

 

Aussi pour nous rendre utile à la République, voudrons-nous rafraichir les mémoires sur le comment et le pourquoi les Etats évolués et développés luttent contre l’enrichissement illicite et la corruption. Pourquoi ? Parce que la République n’est pas un bien individuel mais un bien public ou commun, « Respublica ». Les biens de la République, par conséquent, ne sont pas les biens qui reviendraient en particulier à certains dans la mesure des capacités et  mérites de chacun selon ce que la Constitution et les règles de fonctionnement de l’Etat prévoient.

 

C’est ce qu’on appelle la justice sociale, synonyme d’un équilibre assurant la stabilité des institutions. Et le Cameroun n’est pas un îlot isolé en matière d’institutions car il est régi par un corpus de loi dont la fondamentale reste la Constitution. La Constitution de la République du Cameroun, et plus précisément celle de 1996, stipule bien en son article 66 (al.1) et je cite « Le Président de la République, le Premier Ministre, les membres du Gouvernement et assimilés, le Président et les membres du Bureau de l’Assemblée Nationale, le Président et les membres du Bureau du Sénat, les Députés, les Sénateurs, tout détenteur d’un mandat électif, les Secrétaires Généraux des ministères et assimilés, les Directeurs Généraux des Entreprises Publiques et Parapubliques, les Magistrats, les personnels des administrations de l’assiette, du recouvrement et du maniement des recettes publiques tout gestionnaire de crédit et biens publics, doivent faire une déclaration de leurs biens et avoirs au début de leur fonction ». Pourquoi la déclaration des biens ?

 

Comme nous l’avons fait remarquer plus haut, la « Respublica », qui appartient à tous, fait de chaque citoyen de ce pays le gardien de la fortune publique. Et c’est logiquement pour éviter certaines déviances, car l’être humain est susceptible de succomber à la tentation, qu’on établit des règles à propos. Les gestionnaires publics et les comptables publics, bénéficiaires de prérogatives institutionnelles, sont astreints à déclarer leurs biens et avoirs au moment d’entrer dans leurs fonctions afin qu’à un moment T+1 la République puisse être informée clairement sur l’état de l’évolution de ceux-ci.

 

La dangerosité de la situation actuelle que vit notre pays s’inscrit donc dans l’instauration d’un état de fait en ce qui concerne l’enrichissement qu’on ne peut effectivement pas qualifier de licite ou d’illicite tant que la disposition sur la déclaration des biens et avoirs n’est pas effectivement appliquée, car plus loin l’article 66 stipule « une loi détermine les autres catégories de personnes assujetties aux dispositions du pré- sent article et en précise les modalités d’application ».

 

Alors question ; peut-on vouloir une chose et son contraire ? Rigueur et Moralisation et en même temps favoriser l’enrichissement illicite ? Pourtant les pays dont nous nous inspirons tant pour la Constitution que pour l’organisation de l’Etat ont prévu en dehors de la loi, des institutions spécialisées comme la brigade financière en France qui poursuit les auteurs de fraudes, d’enrichissement illicite ou de blanchiment d’argent, car la brigade financière travaille sur la base des dispositions d’un code pénal et d’un code de procédure pénale qui permettent aux enquêteurs et même aux citoyens de dénoncer les cas d’enrichissements illicites. Doit-on alors dire que le Cameroun est incapable d’instituer un tel dispositif ? C’est pourtant ce que visait le projet d’article 134 du code pénal nouvellement promulgué et malheureusement rayé du corpus du code.

 

Pourtant l’importance du ministère dont a hérité le Garde des Sceaux et qu’il a d’ailleurs piloté depuis son ancien poste de ministre secrétaire gé- néral de la présidence a bel et bien favorisé un cabinet d’expertise dans l’octroi du marché public d’élaboration du code pénal récemment adopté. Et lui qui bénéficiait d’un cré- dit d’intégrité a démontré qu’on pouvait se tromper car il a utilisé un objet dont il avait connaissance des origines délictueuses et l’a présenté au parlement. En le faisant, il a blanchi une infraction, il l’a légitimée, plus grave le peuple n’est toujours pas éclairé sur la réalité du montant de ce marché qui pourrait s’avérer constituer un cas d’enrichissement illicite.

 

 Cela étant, le Département de la Justice devrait rendre compte au chef de l’Etat et à la Nation de toutes les sommes recouvrées dans le cadre l’opération « Epervier » conformé- ment aux dispositions de la loi portant création et fonctionnement du Tribunal Criminel Spécial (TCS), car, avec la banalisation à l’égard de l’enrichissement illicite, il y a lieu de craindre que les sommes remboursées jusqu’alors n’aient été elles mêmes détournées. Devons-nous alors édifier les citoyen ssur les conséquences de l’enrichissement illicite pour dire que ce sont les « fameux » fonctionnaires de catégorie A2 dont parlait votre collègue et camarade Grégoire OWONA, qui sont propriétaires des nouveaux quartiers dont le plus illustratif est le quartier Golf en face de l’Ambassade des Etats-Unis ? Savez-vous que le prix du mètre carré (m²) dans ces lieux est aujourd’hui de 200 mille FCFA en moyenne soit pour construire une villa comme celle qui y sont visibles, le propriétaire qui occupe un espace de 1000 m² doit débourser la rondelette somme de 200 millions ?

 

Comment penser que ces villas cossues puissent coûter elles-mêmes moins de 300 millions, ce qui induirait que les propriétaires fonctionnaires de ces lieux voisins de la résidence du prometteur de la Rigueur et de la Moralisation, décaissent en moyenne 500 millions soit un demi-milliard de FCFA. Oui, si l’enrichissement illicite est donc une infraction anti constitutionnelle alors dans la même lancée, nous voudrons vous balader du côté des résidences construites pour les Camerounais moyens à MFANDENA, où il ne s’agit plus de logements sociaux, mais de logements acquis toujours par ces fonctionnaires et transformées en résidences meublées aux noms des conjoints, enfants et amis.

 

Les vrais opérateurs économiques dans le secteur de l’hôtellerie vous diront qu’ils n’ont que leurs yeux pour pleurer tant sur internet que par d’autres canaux, ces « hôtels particuliers »leur font une concurrence déloyale. Comment oublier l’aliénation des biens meubles et immeubles de l’Etat au franc symbolique au profit de quelques personnes proches du Ministère des Domaines et des
Affaires Foncières?

 

Vous avez dit enrichissement illicite infraction inconstitutionnelle ? Alors que plusieurs dossiers de détournements de deniers publics dans les indemnisations inscrites pour la construction des projets structurants du Chef de l’Etat inondent le Tribunal Criminel Spécial et que les commanditaires semblent ne pas être inquiétés ? Vous avez dit enrichissement illicite infraction inconstitutionnelle ? Allez donc visiter le détail technique des réalisations des projets structurants du Chef de l’Etat dont la Centrale électrique construite à Kribi par AES Sonel où les matériaux utilisés ne sont pas d’une technologie conforme (moteurs à pistons en lieu et place de turbines silencieuses) ce qui non seulement compromet l’environnement mais ne permet pas de maximiser la performance de cette usine jusqu’à nos jours.

 

Des surfacturations si on veut en parler, le plus gros scandale viendrait du barrage Hydro électrique de MEMVE’ELE où il est établi que l’ouvrage initial proposé au président de la République ne sera pas celui qui sera livré à la fin des travaux avec paradoxalement des coûts de travaux initiaux maintenus alors que des économies de près de 80 milliards auraient dû être réalisées.

 

Alors comme pour le cas de l’achat de l’avion présidentiel qui aurait pu causer la mort de l’illustre bénéficiaire ou sa famille, à qui profitent tous ces crimes perpétrés au détriment des grandes réalisations du chef de l’Etat, de la fortune publique et du peuple camerounais ? A une minorité prédatrice assuré- ment, que la banalisation de l’enrichissement illicite, de la corruption et des détournements de deniers publics aura favorisée au cours des dernières décennies et qui constitue une véritable menace pour la paix et la stabilité de notre pays, de notre chère patrie.


Hon. OYONO Martin
Député RDPC de l’Océan
Grand Officier de l’Ordre de la valeur


Copyright © OYONO Martin, Kribi - Cameroun  |  28-07-2016



28/07/2016
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