Le chef de l’Etat a comparé la menace qui pèse sur le Cameroun à d’autres périodes de l’histoire du pays.
Depuis la récente attaque de la secte Boko Haram en territoire camerounais, on attendait, sans trop y croire cependant, une sortie du chef de l’Etat. Mais certainement pas de la manière dont elle est arrivée. C’est presque à la volée, après avoir évoqué le voyage qu’il entreprenait pour les Etats-Unis d’Amérique, que Paul Biya a reparlé de la situation sécuritaire du Cameroun en ce moment.
C’était la deuxième fois que le chef de l’Etat s’exprimait en public sur ce qu’il appelle « le Boko Haram ». La première fois, c’était à Paris, lors du sommet de l’Elysée, le 17 mai. Paul Biya avait alors introduit la réunion par un : « Nous sommes ici pour déclarer la guerre à Boko Haram». Paul Biya avait déjà à l’époque mentionné le caractère sournois de la secte.
Un plan pour combattre la secte avait été arrêté à l’issue de cette rencontre et l’on a noté au niveau du Cameroun un certain déploiement sur le terrain. Ce que Paul Biya a d’ailleurs rappelé samedi. « Il vous souvient qu'il y a quelques semaines, nos forces ont marqué des points importants contre le Boko Haram. Mais c'est une lutte longue, on a affaire à un ennemi pervers, sans foi ni loi, qui attaque la nuit, qui égorge, et qui a évidemment fait des exactions à Kolofata et à Hile- Halifa ».
A la suite des dernières attaques des terroristes, Paul Biya a réagi en limogeant deux chefs militaires. Pratiquement au lendemain de l’attaque, le chef de l’Etat a signé deux décrets relevant le colonel Gédéon Yossa, commandant de la légion de gendarmerie du Nord, et le lieutenant-colonel Justin Ngonga, commandant du 34ème bataillon d’infanterie motorisé.
Mais, dans sa réponse à la question sur la situation dans l’Extrême-Nord, le chef de l’Etat a surtout parlé de la suite de la bataille qu’il envisage au Cameroun, mais aussi à l’extérieur. Il parle notamment d’une stratégie régionale dont il pourrait discuter aux Etats-Unis avec les présidents Obama, Goodluck, Déby et Yayi Boni. « Alors, ce que je peux dire, c'est que les Camerounais doivent garder confiance. Le chef d'Etat-Major, je l'ai envoyé làbas pour réorganiser notre dispositif ; j'ai envoyé des secours, des renforts en hommes et en matériels. Je ne peux pas en dire plus. Nous avons renforcé notre potentiel et je crois que les jours à venir montreront que nos efforts pour organiser une riposte et une défense de notre territoire sont efficaces », dit-il pour ce qui est des mesures en interne.
Seulement, le discours de Paul Biya sur la menace qui pèse sur le Cameroun a quelque chose d’intriguant. Parlant de l’action de Boko Haram, Paul Biya l’a comparée à d’autres épreuves difficiles traversées par le Cameroun. Or les exemples évoqués laissent perplexes. Quelle comparaison peut-on en effet faire entre le conflit de la péninsule de Bakassi, le maquis au Cameroun ou encore les villes mortes ?
Plus grave, dans sa phrase, Paul Biya semble assimiler Boko Haram au Nigeria. « On a eu à lutter contre ce même Nigeria pour Bakassi », dit-il. Or, si pour Bakassi le Cameroun était opposé à l’Etat nigérian et à son armée, ce n’est pas le cas cette fois-ci. Boko Haram est également un ennemi pour le Nigeria. D’où le risque que les autorités nigérianes, qui doivent s’accorder avec celles du Cameroun pour combattre le même ennemi, prennent mal cette allusion.