Comment les chefs militaires engagés dans la guerre dans l’Extrême-Nord s’accordent et s’organisent pour repousser les combattants de la secte hors des frontières.
C’est le dernier grand frémissement du front. En effet, des indiscrétions font état de ce que Boko Haram, désappointé par les derniers revers que leur ont fait subir nos forces de défense, préparent une grande offensive. Les localités camerounaises de Fotokol, Darak et Hilé Alifa sont des cibles potentielles que les terroristes envisagent d’assaillir sous peu, d’après nos informations.
Du coup, le dispositif que le chef de l’Etat a nommé le 14 août dernier pour rendre les forces de défense nationales plus efficaces dans la lutte contre cette secte, est mis à rude épreuve. Toutefois, les deux principaux chefs des opérations Emergence 4 et Alpha qui ont la responsabilité de bouter hors du territoire national toutes les velléités expansionnistes des adeptes d’Aboubakar Shekau paraissent sereins.
En effet, le colonel Joseph Nouma du Bir et le colonel Jacob Kodji commandant de la 4ème région militaire interarmées, s’apprêtent, en parfaite harmonie, à relever le défi des terroristes. On sait que les membres de la secte Boko Haram seraient partis de la ville nigériane de Bama qu'ils occuperaient depuis la semaine dernière pour se regrouper dans l'une de leurs bases logistiques plus proche de la frontière camerounaise, àWoulgo. C'est de là qu'ils pourraient lancer une éventuelle attaque contre les positions camerounaises, apprend-on.
Dans les rangs des soldats camerounais au front, il se murmure que ces assaillants sont attendus de pied ferme. Le bilan des derniers affrontements à Fotokol, largement en faveur de nos forces, est là pour en témoigner s'il en était besoin. Même avec leur ego surdimensionné qui fait que chaque revers soit considéré comme un affront à relever, il n'en reste pas moins que la réalité du champ de bataille reste de nature à ramener à la raison même les esprits les plus pernicieux. Malheureusement, ceux qui l'apprennent souvent n'ont plus la chance de l'expérimenter en ce monde.
Aux postes de commandement des opérations Emergence 4 et Alpha, des officiers rencontrés ne semblent pas nourrir d’acrimonie particulière. On confesse que les deux chefs sont des amis très proches. Les colonels Kodj et Nouma sont en effet deux anciens de la promotion « Rigueur et moralisation », le cru de 1985 de l’Ecole militaire interarmées (Emia). Cette promotion a la particularité qu’elle a été la première à être baptisée par Paul Biya, alors nouveau président de la République.
La camaraderie des deux promotionnaires s’est bonifiée en amitié au fil des ans. Cette relation entre les deux chefs est de nature à favoriser ce que les puristes appellent "la cohésion" dans la conduite des opérations miliaires sur le terrain. Dans le même temps, la proximité géographique des deux commandements constitue à n'en point douter un facteur favorable dans le processus décisionnel et d’émission des ordres de conduite sur le terrain. Le principe d'unicité du commandement est ainsi superposé à celui de la concentration des efforts pour constituer une force capable de pallier certaines défaillances liées aux impondérables du champ de bataille. C'est en cela que la création de la toute nouvelle RMIA4 est la bienvenue pour la suite.
Pour résoudre les problèmes de manque d’armements lourds des Bir, d’indécision due aux querelles de leadership et rejoindre les deux principes d’unicité de commandement et de concentration des efforts, Paul Biya a décidé de déconcentrer le pouvoir de la Rmia. Dans le principe, il veut disposer de forces plus réactives, rapprocher physiquement le commandement afin d’accroître la synergie des actions militaires. Il veut comprimer les responsabilités opératives et tactiques pour réduire les délais décisionnels.
Les agissements des terroristes de ces derniers jours, ont démontré que les dispositifs jusque-là mis en place étaient trop rigides pour contrecarrer un adversaire qui change sans cesse de physionomie. Le nouveau dispositif se veut donc souple et rapide. Depuis le 25 août dernier, le tandem de chefs militaires, qui, fait inédit dans l’histoire de la guerre conduisent deux opérations d’une même armée pour la même mission (protéger l’intégrité du territoire national) a réussi à maintenir les Boko Haram hors du Cameroun.