L’Undp et les présidentielles
L’Undp et les présidentielles
- Mercredi, 24 Août 2011 09:25
- Boris Bertolt
1992-2004. La position de Bello Bouba, au fil des années.
Hier matin au siège de l’Union nationale pour la démocratie et le
progrès (Undp), sis à proximité de Mahima Elig-Essono, Bello Bouba n’a
pas eu le temps de s’asseoir qu’il avait déjà demandé à son secrétaire
général, le pharmacien Pierre Flambo Ngayap, de mettre les journalistes
hors du portail.
L’Undp tenait hier une réunion de son bureau politique. L’ordre du jour
n’a pas été communiqué, mais le secrétaire général, avant l’ouverture
des travaux, a indiqué que « l’actualité nationale et la perspective des
échéances politiques à venir » seront à l’ordre du jour, sans toutes
autres précisions.
Sur les 35 membres que compte le bureau politique, 29 étaient présents.
Ce bureau est amputé de trois membres : deux sont décédés et Delphine
Zanga Tsogo est démissionnaire du fait de ses nouvelles fonctions à
Elecam.
Cette réunion du bureau politique se tient à trois mois de l’élection
présidentielle. Jusqu’ici, ce parti n’a pas encore donné officiellement
une position sur ces élections. Bien que son président, Bello Bouba ait
clairement appelé le gouvernement à baisser les frais d’établissement de
la carte nationale d’identité pour faciliter les procédures
d’inscription sur les listes électorales.
Difficile à ce jour de mesurer le poids politique de ce parti qui a
pourtant été la deuxième force politique du Cameroun. Mais les chiffres
parlent d’eux – mêmes. De 68 députés en 1992, et 13 en 1997, l’Undp ne
compte aujourd’hui plus que six députés à l’Assemblée nationale. Le
parti dans lequel militait en 1991 lors de sa création de fortes
personnalités telles que Samuel Eboua, Ahmadou Moustapha, Issa Tchiroma
Bakary et Delphine Tsanga n’est plus à même de présenter des candidats
sur l’ensemble du territoire national.
Quant aux présidentielles, le parti de Bello Bouba n’a pris part à
aucune élection après celle de 1992. En 1997, ils avaient boycotté
l’élection tout comme le Social democratic front (Sdf), mais négocié
une plate–forme Rdpc-Undp quelques mois plus tard. Cette alliance avait
permis à l’Undp de bénéficier, en novembre 1997, de trois postes
ministériels et quelques places dans la haute administration. C’est à
cette faveur que Bello Bouba, Nana Aboubakar et Hélé Pierre ont pu
entrer au gouvernement.
A l’élection présidentielle de 2004, Bello Bouba décide de ne peut pas
se présenter au profit de Paul Biya. Mais, le nombre de postes
ministériels engrangés à la suite du scrutin passe de trois à deux, car
entre temp. Au fait, Hélé Pierre a entre temps rejoint le Rdpc. Mais
l’Undp n’a rien reçu en contrepartie.
A sa création, beaucoup voyaient ce parti comme une autre alternative
politique au Sdf contre le Rdpc de Paul Biya. Ce qui explique le fait
qu’aux élections du 11 octobre 1992, ce parti 20% des voix , juste
dernière Ni John Fru Ndi du Sdf (35,9% ) et Paul Biya du Rdpc (39,9%
)des suffrages.
C’est le 25 mai 1990 que Bello Bouba Maïgari, ex-Premier ministre en
exil au Nigeria, annonce la création d'un parti politique dénommé Union
nationale pour la démocratie et le progrès au Cameroun (Undpc)). Le 9
février 1991, les membres-fondateurs réunis en assemblée générale
constitutive à Douala, officialisèrent la naissance de ce parti sous la
dénomination finale Union nationale pour le progrès et la démocratie
(Undp). L'existence légale de l'Undp sera finalement reconnue par la le
25 mars 1991.
Boris Bertolt
Les réserves sur Elecam
Il aura fallu plus de six heures pour que Bello Bouba, président de
l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp) mette un terme
à la réunion du bureau politique de son parti qui avait débuté dans la
matinée aux alentours de 11h30mn. Un communiqué final n’a pas été rendu
public, mais nous avons appris que les débats ont largement porté sur
la tenue de l’élection présidentielle. C’est ainsi que d’après plusieurs
membres ayant pris part aux débat, le bureau politique « a estimé
qu’Elecam faisait du bon travail, mais des réserves sont émises sur sa
capacité à organiser matériellement des élections crédibles.
Sur la participation des l’Undp au gouvernement, les membres du bureau
politique ont jugé la plate-forme « caduque ». Certains allant jusqu’à
la qualifier de « mauvaise ». Depuis 2004, l’Undp n’a plus que deux
personnes au sein du gouvernement.
Le bureau politique n’a pas donné de position claire sur la
participation de l’Undp à l’élection présidentielle. Mais lm’un des
participants a tenu à nous rassurer : « Les choses ne seront plus comme
en 1997 et 2004 ».
Le bureau politique n’est qu’une instance consultative au sein de
l’Undp. C’est le comité central qui décidera d’une participation de ce
parti à l’élection présidentielle. Les résolutions finales de la réunion
d’hier seront rendues publiques ce jour.
B. B.
Le tombeur de Samuel Eboua
Bello Bouba. Il ne s’est pas encore prononcé sur sa participation à l’élection présidentielle.
Il est né en 1947 à Baschéo, dans le département de la Bénoué.Bello
Bouba Maïgari réputé à l’époque très proche d’Ahmadou Ahidjo, occupe
plusieurs hautes fonctions sous le régime du parti unique. De 1972 à
1975, il est secrétaire général au ministère des Forçes armées. Puis
secrétaire général adjoint à la présidence de la République de 1975 à
1982. Dans le gouvernement d’Ahidjo du 7 janvier 1982, il est ministre
du Plan. Il est nommé premier ministre en novembre 1982, et le reste
jusqu’au 22 août 1983.
Son départ du gouvernement intervient dans un contexte où Paul Biya
accuse son prédécesseur de préparer un coup d’Etat. Bello Bouba est
remplacé par Ayang Luc, un autre ressortissant du septentrion. A la
suite de son éviction du gouvernement, il s’installe au Nigéria.
Il réapparait sur la scène politique en 1991 avec l’Undp, où il
parviendra à évincer Samuel Eboua pour prendre la tête de ce parti en
janvier 1992. Au départ, il affiche son hostilité au Rdpc. Allant
jusqu’à exclure Issa Tchiroma et Hamadou Moustapha qui participent au
gouvernement de novembre 1992. Mais en 1997, il va intégrer le
gouvernement pour ne plus le quitter. Il sera tour à tour ministre
d’Etat en charge du Développement industriel et commercial (1997 -2004),
ministre d’Etat des Postes et télécommunications (2004-2009) et depuis
2009, ministre d’Etat en charge des Transports.
« L’Undp est dans la roue du Rdpc »
Mathias Owona Nguini. Pour le politologue, les deux partis partagent le même socle conservateur.
Que pensez-vous de l’alliance entre l’Undp et le Rdpc?
L’Undp est devenu, depuis 1994, un parti de collaboration. Cette
formation politique qui était classée comme parti d’opposition,
participe désormais comme parti d’appoint aux coalitions formées par le
Rdpc. Dans cette optique, elle est un précieux instrument politique, qui
permet à M. Biya et à ses associés politiques, d’élargir leur stratégie
de clientélisme gouvernementale. En somme l’Undp est dans la roue du
Rdpc.
Qu’est ce que cette collaboration a apporté au Cameroun ?
Il est vrai que les ministres issus de l’Undp n’ont généralement pas eu
à occuper leur fonction de membres du gouvernement dans les ministères
de souveraineté. Cela est en partie dû au fait que, ce parti a toujours
opéré comme un junior partner dans ses alliances politiques et
économiques avec le Rdpc. N’empêche que les ministres de l’Undp n’ont
pas apporté une touche singulière, nettement repérable, dans les
secteurs ministériels qui leur ont été confiés. Leur gestion s’inscrit
en droite ligne de celle des ministres du Rdpc.
M. Bello Bouba pourrait-il présenter sa candidature à la présidentielle de 2011 ?
Il n’y a pas de chance à ce que l’Undp présente un candidat à la
présidentielle. Cette formation politique et son chef ont choisi de
s’aligner systématiquement sur le candidat du Rdpc à la présidentielle.
Si cette stratégie à été récompensée par la présence permanente de
quelques membres de l’Undp dans le gouvernement, elle a l’inconvénient
de faire de ce parti, une succursale politique du Rdpc. Bello Bouba
apparaît comme un chef de parti principalement occupé à préserver sa
dignité de ministre d’Etat plutôt qu’à mesurer les inconvénients de sa
collaboration avec le Rdpc, qui a contribué à démobiliser une grande
partie de l’électorat de son parti .
L’Undp a-t-elle une chance de se démarquer un jour du Rdpc ?
Au plan idéologique, non. Parce que, les deux formations partagent le
même socle conservateur lié à leur origine dans l’Unc. L’Undp pourrait
se distinguer du Rdpc en empruntant sur le terrain du clientélisme
ethno-régional, des dossiers historiques délicats, des querelles entre
les présidents Biya et Ahidjo, le push manqué de 1984 et ses
répercussions politico-judiciaires. Malheureusement pour les radicaux de
l’Undp, leur leader a choisi la voie d’une collaboration soutenue avec
le Rdpc. Cette dernière privilégie plutôt la vieille relation entre
barons de l’Ahidjoïsme.
L’absence de Samuel Eboua n’y est-il pas pour quelque chose ?
Les leaders du parti, ravis d’accéder aux positions gouvernementales
grâce à ses alliances personnelles, puis formelles avec le Rdpc, n’ont
pas mesuré les conséquences. Ceci a permis au Rdpc d’isoler
méthodiquement l’Undp en le confinant d’abord dans la région
septentrionale, avant de lui ôter ses positions de replis par une
savante reconquête du grand Nord. On comprend alors tout le soin mis par
les stratégies politiques du Rdpc de décembre 1991 à janvier 1992, pour
obtenir l’éviction de Samuel Eboua à la présidence de l’Undp.
Propos recueillis par Cathy Yogo
Votre avis : Que pensez-vous de la présence de l’Undp au gouvernement ?
« Ce n’est plus un parti crédible » : Ernest Talla, comptable
Ce parti est juste là pour remplir les formalités. Il a perdu sa
crédibilité depuis plusieurs années. Cette situation s’explique par le
fait que la démocratie camerounaise se porte très mal. La démocratie
un concept qui nous a été initié par les blancs et que nous n’avons
jamais maitrisé la vraie signification. Au Cameroun, les partis
politiques cherchent à se rallier avec le gouvernement parce que les
leaders veulent s’enrichir. Que ce soit l’Undp ou les autres partis
politiques, ils ne savent pas ce que signifie la être un pays démocrate.
Je leur conseille d’œuvrer d’abord pour le développement économique du
Cameroun parce que l’Europe a d’abord énormément investi sur le plan
économique avant de s’adapter à la démocratie classique.
« Ce parti qui va mourir » : Romuald Tasse, ingénieur
L’Undp est un parti qui va mourir parce que son ralliement avec le
parti au pouvoir ne lui apporte rien de concret sur l’évolution
démocratique de son parti. Le groupe a aussi perdu la confiance de
beaucoup de ses militants. En plus, c’est un parti politique qui depuis
des années n’a plus un seul député à l’Assemblée Nationale. Je pense que
les partis politiques dans notre pays doivent revoir leurs objectifs.
Certains aujourd’hui ne visent plus la conquête et l’exercice du pouvoir
ils ont d’autres objectifs que même leurs militants ne connaissent
pas.
« Un parti sans stratégie » : Aurélin Tagne, agent commercial
La stratégie de l’Undp n’est que la continuité du régime des leaders
politiques qui ont travaillé sous le règne d’Ahidjo, l’ancien président
de la République. Ces leaders se caractérisent beaucoup plus par
l’absence d’un programme politique pour l’évolution du leur formation
politique. Le cas de l’Undp aujourd’hui, s’explique par le fait que
c’est un parti sans stratégie fixe. Hier c’était un mouvement de
l’opposition. Aujourd’hui c’est un parti de la majorité.
P.N. (stg)