Lions Indomptables: Jean-Paul Akono est-il à la hauteur?

YAOUNDE - 19 SEPT. 2012
© Jean Robert Fouda | Repères

Au-delà de la médaille d'or olympique avec la sélection espoirs en 2000, le parcours du nouvel entraîneur national nommé le 13 septembre 2012 est surtout émaillé de scandales. Dans ce contexte particulièrement tendu, «Magnuson» semble pourtant décidé à qualifier le Cameroun pour la Coupe d'Afrique des nations (Can) 2013 et surtout bâtir une nouvelle équipe forte et conquérante.

Le technicien camerounais va engager une course contre la montre, question de restaurer rapidement confiance et sérénité au sein de la sélection nationale. Surnommé «Magnuson» par ses fans, M. Jean-Paul Akono devra donc agir vite puisque sa première grande évaluation pointe à l'horizon.

Les Lions indomptables devront, le 13 octobre 2012, s'imposer au moins par 3 buts d'écart face aux Requins bleus du Cap vert en match retour du dernier tour des qualifications pour la Can 2013. Au match aller disputé le 08 septembre, les Camerounais s'étaient inclinés à Praia 0-2. Une contre performance qui a scellé le sort du technicien français Denis Lavagne, après la défaite (1-2) face à la Libye trois mois plus tôt.

«La tâche semble quelque peu difficile parce que nous aurons le 13, non seulement à remonter deux buts, mais à marquer un de plus pour pouvoir obtenir la qualification. Deux buts c’est beaucoup pour une compétition éliminatoire comme la Can, mais je crois aussi que ce n'est pas impossible aussi de le faire. Le problème pour moi étant de régler certains petits problèmes qui gangrènent un peu la tanière des Lions», a expliqué M. Jean-Paul Akono vendredi dans une interview accordée à la radio nationale, Crtv.

L'insuffisance de préparation pourrait à nouveau handicaper les joueurs rentrés à peine de vacances dans leurs clubs professionnels. M. Jean-Paul Akono s'apprête à battre le rappel des troupes: Jean II Makoun, Benoît Angbwa, Jean-Armel Kana Biyik, Samuel Eto'o qui a décidé de ne plus répondre aux convocations de l'équipe nationale tant que prévaudront l'improvisation et l'amateurisme.

Le retour de Benoit Assou Ekotto qui a été envisagé également, pourrait finalement être reporte à une date ultérieure suite à la blessure récemment contractée par le joueur en championnat d'Angleterre. «Le Cameroun c'est quand même leur pays, le Cameroun a besoin d'eux, leur pays a besoin d'eux», a indiqué l'entraineur.


PROSPECTION À LA BASE

M. Jean-Paul Akono a voulu, à travers sa présence dimanche à Douala, lors du derby Union-Les Astres comptant pour la 23e journée du championnat de première division, poser les bases d'un vrai renouveau de l'équipe nationale. La prospection à la base de nouveaux talents reste l'un des chantiers prioritaires.

Plusieurs places semblent disponibles chez les Lions indomptables notamment le poste de latéral droit et deux postes de milieu de couloir. Deux joueurs en particulier intéressent le sélectionneur: Fai Collins et Ashu Tambe, qui ont été les pièces maitresses de l'Union, l'équipe leader du premier championnat professionnel.

La supervision des joueurs locaux pourrait rehausser le niveau des championnats nationaux (Dl et D2) qui regorgent de jeunes aux potentialités énormes. Il reviendra ensuite à «Magnuson» d'instaurer une seine concurrence entre professionnels et amateurs.

Autre souci: le climat tendu en sélection. M. Akono prend en main une équipe nationale en panne de résultats, sans véritable âme. Un Mondial 2010 raté a accentué les tensions entre plusieurs joueurs cadres. En un mot, il a pour devoir, de redonner à cette équipe camerounaise, son statut de grande nation de football, mais surtout, de lui restituer son label indomptable, car, il faut bien le reconnaître, les Lions ne font plus peur à personne, sauf peut-être à eux-mêmes.

Analyse qui n'est pas exagérée au regard de leur parcours à la 19e Coupe du monde: trois matches, autant de défaites, indiscipline caractérisée et une inconfortable avant dernière place (31è/32) au classement général. Sans oublier l'élimination de la Can 2012 organisée conjointement par le Gabon et la Guinée équatoriale…


ET LE CHARISME ALORS?

Passée cependant l'euphorie et les commentaires qu'aura suscités le limogeage de M. Denis Lavagne, accusé de tous les maux, un sentiment mitigé se dégage désormais après la décision du Minsep nommant un nouveau coach national de football. Jean Paul Akono en homme providentiel sur le banc de touche des Lions indomptables était une thèse impensable lorsqu'il fût chassé comme un vaurien de l'équipe nationale en 2001, à la suite d'un match perdu en Angola. Des piges par la suite au Tchad et au Rwanda, triste destin pour un médaillé d'or des jeux Olympiques de Sidney 2000.

«Magnuson» effectue un retour controversé après avoir glané deux titres continentaux avec l'équipe nationale militaire constituée essentiellement de civils. Celui qui est aujourd'hui considéré comme le messie des Lions indomptables a été véhément conteste et poussé à la porte par les supporters du Canon de Yaoundé. En 2004, il fût pris à partie par toute la presse camerounaise pour rançonnement des joueurs. Portée devant les tribunaux, l'affaire avait permis de mettre à nu ses pratiques peu orthodoxes au sein de l'équipe nationale espoirs.

Jean-Paul Akono profite de son activisme sur les chaînes de radio et les plateaux de télévision pour sortir de l'oubli dans lequel il a été plongé depuis sa nomination comme directeur technique national de football adjoint N°1 en 2010. Dans ces conditions, il est difficile de savoir s'il aura effectivement le charisme et le courage de n'aligner que les joueurs les plus compétitifs.

D'autant plus que, un spécialiste du foot, invité à une émission de sport à STV à l'époque où Camus Mimb y officiait en 2010, faisait un témoignage pour le moins troublant. Selon ce spécialiste, au cours d'un entraînement, Samuel Eto'o a ignoré la main que lui tendait son encadreur Akono. «Je ne te salue pas. Je t'avais donné l'argent pour acheter une voiture; mais tu ne l'as pas fait», rapportait l'invité de Martin Camus Mimb. Jean Paul Akono a-t-il donc l'étoffe nécessaire?

La nomination du nouveau coach est un éternel saupoudrage. Pour obtenir les résultats escomptés, la balle est surtout dans le camp des pouvoirs publics. En effet, il s'agit, pour l'Etat, de mettre désormais à la disposition du duo d'entraîneurs. Akono-Ndtoungou, un arsenal financier et matériel efficient. Or, sans assurance, sans contrat de travail, encore moins de salaire mensuel préalablement défini, les entraîneurs locaux sont toujours moins bien traités que leurs collègues expatriés parfois moins compétents. Et, dans la précarité, les techniciens camerounais seraient tentés de marchander des places. Ce qui compliquerait davantage la situation de l'équipe nationale.

Les pouvoirs publics auraient frappé un grand coup en donnant la chance aux jeunes coaches. De Towa à Ekeké, en passant pas Djonkep, Belinga et Mboma... Cette nouvelle génération des entraîneurs camerounais est constituée de personnes qui ont la tête froide et ne sont pas encore corrompues par certaines pratiques maffieuses autour de la sélection des joueurs.



19/09/2012
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