Une journée où le fait religieux éclipse le fait politique. Ce 6 avril 2012, est vendredi saint, une fête religieuse célébrée par les chrétiens, le vendredi précédant le dimanche de Pâques. Au Cameroun et dans plusieurs autres pays au monde, la journée est déclarée fériée chômée.Ce 6 avril 2012 aussi marque le 28 ème anniversaire de la tentative du coup d´Etat au Cameroun. En effet, le 6 avril 1984 , des membres de la garde présidentielle camerounaise, composée majoritairement de musulmans du nord-Cameroun, se soulèvent contre le président Paul Biya afin de ramener au pouvoir l'ex-président, Ahmadou Ahidjo. La révolte, qui fait des centaines de morts, est écrasée par l'armée après trois jours de combats.
Curieuse coïncidence ce jour de deux évènements
qui marquent la mort d´une part de Jésus-Christ sur la croix et celle
de la politique de « Rigueur et de Moralisation » annoncée par le
président Paul Biya lorsqu´il succède au premier président Ahmadou
Ahidjo, d´autre part.
Le vendredi saint marque la célébration de la passion du Christ et de sa
mort sur la croix et invite les fidèles au jeûne et á l'abstinence
afin de s'unir aux souffrances du Christ. La mort du Christ est
surtout une offrande faite á l´humanité pour absoudre celle-ci du
péché. Le Fils de l´Homme a réconcilié l´Humanité avec Dieu.
A contrario, le coup d´Etat manqué du 6 avril 1984 a conduit au raidissement de l´homme Biya et de sa politique de « rigueur et moralisation». Conséquences, 28 ans après ce putsch manqué et par ricochet, d´autres évènements malheureux survenus depuis les années 1990, des plaies restent encore béantes, alors que la tenue d´une conférence nationale (avec objet cette fois-ci) créerait de véritables conditions du mieux-vivre ensemble où chaque camerounais se sentirait désormais membre d´une même famille. La réconciliation nationale serait l´occasion d´unir les cœurs, de gommer les rancœurs et de construire une nation camerounaise solide.
Contournant l´idée d´une conférence nationale,
Jean-Vincent Tchienéom, dans l´une de ses chroniques estime que « il
(le président Paul Biya) a préféré se payer une tranquillité en
distribuant des prébendes politiques pour taire les revendications. Dans
ce partage du gâteau national, les élites du grand-nord s´en tirent
souvent avec des honneurs ».
Il conclut son analyse en ces termes : « la culture de la violence
politique et de l´intolérance accumulée depuis des décennies est une
entrave objective et réelle á la démocratisation et á la saine et libre
expression du multipartisme, au respect strict du droit á la différence
et du droit á la critique. Elle a suscité la peur, et la résignation,
mais aussi la haine, la révolte et l´esprit de vengeance au sein de la
société camerounaise ».
6 avril 2012, une journée des sentiments ambivalents : célébrer la passion du Christ et/ou oublier la tentative de putsch qui changea le destin de tout un pays ? Un donner á penser.