Le paradoxe de la visite de Paul Biya: Qui conseillera qui, le jeune ou le vieux?
Douala, 24 Janvier 2013
© PONUS | Ouest Littoral
Paul Barthélémy Biya Bi Mvondo, 80 ans bien sonnés, et chef d'Etat depuis bientôt trente-un an, est en train de réussir, de hautes luttes, la prouesse d'une visite à l'Elysée pour un tête-à-tête avec François Hollande, 59 ans, et au pouvoir depuis quelques mois. Malheureusement les injonctions, les instructions, et les conseils ne viendront pas du côté que vous imaginez de toute évidence. Comment qualifiez-vous ce paradoxe?
Selon l’agenda déjà officialisé du Mouvement des entreprises de France (Medef), cette organisation patronale aura une rencontre avec le Président de la République du Cameroun son excellence Paul Biya, le 31 janvier 2012, de 8h30 mn à 10h30 mn. Ce qui confirme de plus en plus, la visite de Paul Biya en France, même si les sources diplomatiques, qui en font un mystère, sont encore attendues. Il y est indiqué que la rencontre entre Paul Biya et les entrepreneurs français, prévue pour durer 2 heures de temps, permettra aux entreprises françaises implantées au Cameroun et à celles qui envisagent d'y développer leurs activités, de s'informer sur l'état l'avancement des projets structurants, de l'évolution du cadre des affaires, des réformes à venir, des priorités du gouvernement camerounais en vue du développement économique. Elle donnera également l'occasion au patronat français d'évoquer des éventuelles difficultés qu'elles peuvent rencontrer dans leur développement, de réaffirmer sa volonté de contribuer à la croissance économique du Cameroun et d'identifier les formes de partenariat adaptées.
Ainsi donc, on peut déjà se réjouir du côté d’Etoudi quant à l'aboutissement de cette affaire de visite qui a donné des insomnies, Mais les observateurs ne comprendront jamais assez pourquoi tant d'efforts pour une rencontre où le respect mutuel devrait prévaloir entre deux Etats indépendants, qui plus est un déplacement où Paul et sa délégation affronteront, comme d'habitude, un comité d'accueil hostile, avec des manifestations, des lettres de protestation qualifiant le locataire d'Etoudi de dictateur, d'autocrate, de faux démocrate, qui vole ou pille les ressources de leur pays, verrouille les systèmes démocratiques, etc.
L'autre véritable paradoxe est ailleurs, et ne cesse lui-aussi de surprendre. C'est bien celui de voir avec quelle engouement des "papas" se battent pour rencontrer quelqu'un qui non seulement n'a pas encore leur expérience de chefs d'Etat, mais surtout qui a l’age de leur fils, fut-il un homologue. Comment comprendre que Paul Biya, né le 13 février 1933, au pouvoir depuis le 6 novembre 1982, c'est-à-dire depuis bientôt 31 ans, peine à se faire recevoir par un François Hollande, né le 12 août 1954 président depuis le 6 mai 2012, soit moins d'un an. Plus grave c'est ce jeune Président qui doit menacer et donner des instructions à son aîné en âge et en pouvoir à la tête d'un Etat, et lui apprendre la bonne gouvernance qu'il était censé recevoir de lui. C'est-à-dire l'art de gérer de façon cohérente les enjeux d'une société, ou encore la gestion cohérente des affaires communes à tout groupe humain constitué. Ce qui n'est autre que la somme de valeurs éthiques et morales. Ça curieusement le jeune Président le sait, mieux que ces parents qui gouvernent depuis une trentaine d'années.
Que François Hollande humilie Ali Bongo à Paris, on peut encore croire que celui-ci, bien qu’étant son aîné au poste de chef d'Etat, est au moins son cadet d'âge; mais de là, a sermonner ou à malmener Paul Biya et Sassou Nguesso qui est né le 23 novembre 1943, et plusieurs fois Président de la République, il y a un pas qu'il ne faut pas franchir. Malheureusement, ce fut le cas récemment au 14ème sommet de la francophonie, tenu les 13 et 14 octobre 2012 à Kinshassa. Cette situation où respect et droit d'aînesse sont inversés reflète tout simplement l'image choquante d'un suzerain des temps modernes vis-à-vis de ses vassaux locaux...
Fort curieusement, les humiliations semblent ne pas offenser les concernés pour la simple qu'ils sont conscients de ce qu'ils y sont pour quelques choses. Car entre ceux qui massacrent les militants des droits de l'homme, ceux qui trichent aux élections et d'autres qui ont des biens mal acquis, ces Présidents ripoux se retrouvent dans toutes ces déviances gouvernementales. Et certainement au cours de cette visite des sujets de ce genre ne manqueront pas de créer des remous quand on sait que 17 ans après la promulgation de la constitution issue du sommet tripartite, le Conseil constitutionnel prévu n'a jamais été mis en place. Il en est de même de la Haute cour de justice, de l'article 66 sur la déclaration des biens, de la décentralisation, etc. Autant de sujets qui fâchent et qui font preuve d'une inefficacité non seulement dans le domaine des libertés, de la bonne gouvernance, de la démocratie, mais aussi dans celui de l'économie et du social, où tous les indicateurs sont au rouge: inflation galopante, hausse des prix à la consommation, pouvoir d'achat en pleine déconfiture, chômage important, faillite de l'école, persistance chronique d'une mal vie, détournement et corruption, perte de souveraineté alimentaire, etc. De quoi amener un cadet à tenir des propos désobligeants à l'endroit des aînés incapables et ne pas donner l'occasion de distribuer des amabilités et des éloges auxquels n'ont pas droit tous ces chefs d'Etat africains qui se bousculent pour se faire recevoir à l'Elysée et se prendre en photo, à la fin, sur le perron avec le maître des lieux.
Aucun objectif annoncé
«Voir Hollande et mourir»? C'est peut-être l'appréhension qu'ont certains de cette visite où le véritable but recherché et les objectifs fixés restent secrets. Selon certaines indiscrétions, cette visite de Biya en France aura un caractère un peu plus économique que les précédentes, au regard des membres de la délégation annoncés dans les coulisses. Mais pour quels résultats lorsqu'apparemment on fait peu cas de la présence de nos vrais opérateurs économiques. Pire, lorsque les objectifs, comme d'habitude, n'ont aucun chiffre.
A titre d'exemple, le 3 décembre 2012, le Président Ouattara est allé à Paris pour une «importante» rencontre du gouvernement ivoirien avec les bailleurs de fonds et investisseurs. Ils ont pris part à la réunion du Groupe consultatif sur le financement du Plan national de développement (Pnd) qui se veut un dispositif pour mobiliser les financements au profit de la Côte-d'Ivoire. Il était question de mobiliser les ressources publiques et privées nécessaires à la mise en œuvre de ce Plan national de développement. Cette rencontre organisée par le gouvernement ivoirien avec l'appui de la Banque mondiale autour de plusieurs axes dont la relance économique, la consolidation de la stabilité politique et la sécurité, avait pour coût global la forte somme de 11 706 milliards de F cfa pour la période de 2012 à 2015. Ce qui laisse entendre que ce pays a la lisibilité nécessaire et chiffrée sur sa politique d'émergence. Par conséquent, au terme de ce délai bien imparti, on s'étonnera de ce que la Côte-d'Ivoire qui n'est pas encore totalement sortie d'une guerre ait pris de l'avance sur un Cameroun où ont toujours régnées la paix et la stabilité..., mais sans développement.
Un exemple à suivre!
© PONUS | Ouest Littoral
Paul Barthélémy Biya Bi Mvondo, 80 ans bien sonnés, et chef d'Etat depuis bientôt trente-un an, est en train de réussir, de hautes luttes, la prouesse d'une visite à l'Elysée pour un tête-à-tête avec François Hollande, 59 ans, et au pouvoir depuis quelques mois. Malheureusement les injonctions, les instructions, et les conseils ne viendront pas du côté que vous imaginez de toute évidence. Comment qualifiez-vous ce paradoxe?
Selon l’agenda déjà officialisé du Mouvement des entreprises de France (Medef), cette organisation patronale aura une rencontre avec le Président de la République du Cameroun son excellence Paul Biya, le 31 janvier 2012, de 8h30 mn à 10h30 mn. Ce qui confirme de plus en plus, la visite de Paul Biya en France, même si les sources diplomatiques, qui en font un mystère, sont encore attendues. Il y est indiqué que la rencontre entre Paul Biya et les entrepreneurs français, prévue pour durer 2 heures de temps, permettra aux entreprises françaises implantées au Cameroun et à celles qui envisagent d'y développer leurs activités, de s'informer sur l'état l'avancement des projets structurants, de l'évolution du cadre des affaires, des réformes à venir, des priorités du gouvernement camerounais en vue du développement économique. Elle donnera également l'occasion au patronat français d'évoquer des éventuelles difficultés qu'elles peuvent rencontrer dans leur développement, de réaffirmer sa volonté de contribuer à la croissance économique du Cameroun et d'identifier les formes de partenariat adaptées.
Ainsi donc, on peut déjà se réjouir du côté d’Etoudi quant à l'aboutissement de cette affaire de visite qui a donné des insomnies, Mais les observateurs ne comprendront jamais assez pourquoi tant d'efforts pour une rencontre où le respect mutuel devrait prévaloir entre deux Etats indépendants, qui plus est un déplacement où Paul et sa délégation affronteront, comme d'habitude, un comité d'accueil hostile, avec des manifestations, des lettres de protestation qualifiant le locataire d'Etoudi de dictateur, d'autocrate, de faux démocrate, qui vole ou pille les ressources de leur pays, verrouille les systèmes démocratiques, etc.
L'autre véritable paradoxe est ailleurs, et ne cesse lui-aussi de surprendre. C'est bien celui de voir avec quelle engouement des "papas" se battent pour rencontrer quelqu'un qui non seulement n'a pas encore leur expérience de chefs d'Etat, mais surtout qui a l’age de leur fils, fut-il un homologue. Comment comprendre que Paul Biya, né le 13 février 1933, au pouvoir depuis le 6 novembre 1982, c'est-à-dire depuis bientôt 31 ans, peine à se faire recevoir par un François Hollande, né le 12 août 1954 président depuis le 6 mai 2012, soit moins d'un an. Plus grave c'est ce jeune Président qui doit menacer et donner des instructions à son aîné en âge et en pouvoir à la tête d'un Etat, et lui apprendre la bonne gouvernance qu'il était censé recevoir de lui. C'est-à-dire l'art de gérer de façon cohérente les enjeux d'une société, ou encore la gestion cohérente des affaires communes à tout groupe humain constitué. Ce qui n'est autre que la somme de valeurs éthiques et morales. Ça curieusement le jeune Président le sait, mieux que ces parents qui gouvernent depuis une trentaine d'années.
Que François Hollande humilie Ali Bongo à Paris, on peut encore croire que celui-ci, bien qu’étant son aîné au poste de chef d'Etat, est au moins son cadet d'âge; mais de là, a sermonner ou à malmener Paul Biya et Sassou Nguesso qui est né le 23 novembre 1943, et plusieurs fois Président de la République, il y a un pas qu'il ne faut pas franchir. Malheureusement, ce fut le cas récemment au 14ème sommet de la francophonie, tenu les 13 et 14 octobre 2012 à Kinshassa. Cette situation où respect et droit d'aînesse sont inversés reflète tout simplement l'image choquante d'un suzerain des temps modernes vis-à-vis de ses vassaux locaux...
Fort curieusement, les humiliations semblent ne pas offenser les concernés pour la simple qu'ils sont conscients de ce qu'ils y sont pour quelques choses. Car entre ceux qui massacrent les militants des droits de l'homme, ceux qui trichent aux élections et d'autres qui ont des biens mal acquis, ces Présidents ripoux se retrouvent dans toutes ces déviances gouvernementales. Et certainement au cours de cette visite des sujets de ce genre ne manqueront pas de créer des remous quand on sait que 17 ans après la promulgation de la constitution issue du sommet tripartite, le Conseil constitutionnel prévu n'a jamais été mis en place. Il en est de même de la Haute cour de justice, de l'article 66 sur la déclaration des biens, de la décentralisation, etc. Autant de sujets qui fâchent et qui font preuve d'une inefficacité non seulement dans le domaine des libertés, de la bonne gouvernance, de la démocratie, mais aussi dans celui de l'économie et du social, où tous les indicateurs sont au rouge: inflation galopante, hausse des prix à la consommation, pouvoir d'achat en pleine déconfiture, chômage important, faillite de l'école, persistance chronique d'une mal vie, détournement et corruption, perte de souveraineté alimentaire, etc. De quoi amener un cadet à tenir des propos désobligeants à l'endroit des aînés incapables et ne pas donner l'occasion de distribuer des amabilités et des éloges auxquels n'ont pas droit tous ces chefs d'Etat africains qui se bousculent pour se faire recevoir à l'Elysée et se prendre en photo, à la fin, sur le perron avec le maître des lieux.
Aucun objectif annoncé
«Voir Hollande et mourir»? C'est peut-être l'appréhension qu'ont certains de cette visite où le véritable but recherché et les objectifs fixés restent secrets. Selon certaines indiscrétions, cette visite de Biya en France aura un caractère un peu plus économique que les précédentes, au regard des membres de la délégation annoncés dans les coulisses. Mais pour quels résultats lorsqu'apparemment on fait peu cas de la présence de nos vrais opérateurs économiques. Pire, lorsque les objectifs, comme d'habitude, n'ont aucun chiffre.
A titre d'exemple, le 3 décembre 2012, le Président Ouattara est allé à Paris pour une «importante» rencontre du gouvernement ivoirien avec les bailleurs de fonds et investisseurs. Ils ont pris part à la réunion du Groupe consultatif sur le financement du Plan national de développement (Pnd) qui se veut un dispositif pour mobiliser les financements au profit de la Côte-d'Ivoire. Il était question de mobiliser les ressources publiques et privées nécessaires à la mise en œuvre de ce Plan national de développement. Cette rencontre organisée par le gouvernement ivoirien avec l'appui de la Banque mondiale autour de plusieurs axes dont la relance économique, la consolidation de la stabilité politique et la sécurité, avait pour coût global la forte somme de 11 706 milliards de F cfa pour la période de 2012 à 2015. Ce qui laisse entendre que ce pays a la lisibilité nécessaire et chiffrée sur sa politique d'émergence. Par conséquent, au terme de ce délai bien imparti, on s'étonnera de ce que la Côte-d'Ivoire qui n'est pas encore totalement sortie d'une guerre ait pris de l'avance sur un Cameroun où ont toujours régnées la paix et la stabilité..., mais sans développement.
Un exemple à suivre!