S’estimant lésée depuis la disparition de l’ex première dame, l’élite du Nyong et Mfoumou a crié son ras-le-bol hier.
Le symbole est suffisamment fort. C’est à Titus
Ebogo, ancien commandant de la Garde présidentielle (Com Gp), qui
intervenait pour la circonstance comme patriarche du département du
Nyong et Mfoumou, qu’est revenue la tâche de dire le « mot » de colère
de l’élite de cette unité administrative, face à ce que celle-ci
considère comme une infidélité du Renouveau à l’égard des populations
locales, depuis le décès de Jeanne Irène Biya, en juillet 1992.
Au moment de prendre la parole, l’ancien Commandant de la Gp, entonne,
en langue locale, un chant qui appelle au rassemblement des
ressortissants d’Endom (village natal de Jeanne Irène Biya) pour
défendre leur contrée. La communion est totale avec l’assistance.
Titus Ebogo s’en ira par la suite puiser dans les Saintes écritures. «Craignons d’oublier !», scande-t-il. Ce faisant, il invite l’assistance à transmettre de générations en générations les bienfaits du Renouveau : routes, écoles, hôpitaux, etc. Le patriarche Yebekolo (ethnie locale) salue ensuite la nomination par le passé des originaires du Nyong et Mfoumou à de hautes fonctions. Même si, un brin cynique, il précise que «certains [parmi les personnes nommées] ont réussi tant bien que mal tandis que d’autres ont échoué dans la mission qui leur a été confiée».
Et de poursuivre : «sur le plan affectif, Paul Biya a séduit les ressortissants du Nyong et Mfoumou dès les premiers jours de sa jeunesse». A ce stade, personne n’entrevoit la trajectoire du propos de Titus Ebogo. C’est alors que le «craignons d’oublier» de départ devient «craignez d’oublier». Viendra alors la phrase-choc, en langue locale, une fois de plus : «Ce n’est pas parce qu’elle n’est plus là qu’on va oublier le Nyong et Mfoumou». Ça y est ! Le Colonel a mis les pieds dans le plat. Il ne s’arrête pas là : «Pendant les moments sombres, en avril 1984, c’est un fils du Nyong et Mfoumou, qui a contribué de manière décisive à remettre les pendules à l’heure à Yaoundé, capitale politique !», fulmine M. Ebogo.
Pour lui, l’Histoire retiendra que Paul Biya et le Nyong et Mfoumou ont une relation dont Dieu seul connaît les fondements. Il gratifiera par la suite René Emmanuel Sadi d’une salve évocatrice : «Votre déplacement à Akonolinga est un voyage touristique ou d’agrément, car Paul Biya et le Nyong et Mfoumou n’en font qu’un…».
Listes électorales
Tous les intervenants qui se succéderont par la suite sur le podium
s’emploieront à décrire le mal-être des populations du Nyong et Mfoumou,
dont ils situent invariablement le début après le décès de Jeanne Irène
Biya, qu’ils prendront le soin de ne pas nommer. «Merci pour l’unique
ministre ! […]. Même nos morts à l’esprit, les militants seront au
rendez-vous de la présidentielle», lâchera un président de section. Tout
en essayant de tempérer le propos de Titus Ebogo, le député Nkodo Dang
reconnaîtra que ce département est en proie à «un enclavement à nulle
autre pareil» et que «les populations [y] vivent dans un état de
paupérisation avancée».
Robert Nkili, le président du comité départemental de la campagne d’inscription sur les listes électorales dans le Nyong et Mfoumou, par ailleurs ministre du Travail et de la Sécurité sociale, prendra, pour sa part, entièrement à son compte les propos de Titus Ebogo.
«Lui c’est nous et nous c’est lui»,
martèlera-t-il, en rappelant au passage les «liens de sang» qui unissent
M. Biya et le Nyong et Mfoumou.
A son tour, René Emmanuel Sadi, le secrétaire général du comité central
du Rdpc affirmera que «le Rdpc se meut ici [dans ce département] comme
du Kanga [principale espèce de poisson locale] dans le Nyong». D’après
lui, «le Nyong et Mfoumou a récolté les fruits de sa fidélité» et en
récoltera encore. Mais, les militants gagneront à ne pas évoluer en
ordre dispersé. De plus, «le Nyong et Mfoumou doit se constituer en
véritable pôle de développement. A condition d’éclore de nouvelles
solidarités agissantes et productrices. A condition de prendre le risque
de l’innovation et de l’action», dira M. Sadi.
Mais le défi qu’il est urgent de relever, c’est d’«accroître le nombre d’électeurs favorables à notre candidat», pense-t-il. Ainsi, en dehors de la forte délégation de ministres et cadres du Rdpc qui accompagnait le Sg du comité central du parti au pouvoir, le Rdpc a dépêché hier à Akonolinga un comité censé appuyer le comité départemental d’inscriptions sur les listes électorales dans sa mission. Ce comité est constitué des ministres Jean Baptiste Béléoken, Marie Thérèse Abena Ondoua, Louis Paul Motazé et du président régional de cette campagne d’inscriptions dans le Centre, président du Groupe parlemantaire Rdpc à l’Assemblée nationale, le député Jean Bernard Ndongo Essomba.