À quelques jours de l’arrivée de la Commission spéciale d'inspection de la Confédération africaine de football (Caf), le pays de Roger Milla se prépare comme il peut pour présenter un dossier bien plus convaincant que celui de ses concurrents que sont : la Côte d’Ivoire, l’Algérie, la Zambie, la Rdc ou la Guinée. Saura-t-il tirer son épingle du jeu ?
Le chrono est en marche et les coeurs battent la chamade. Plus que quelques jours et le Cameroun aura l’honneur d’accueillir dans ses murs, la Commission spéciale de la Caf mise sur pied pour évaluer les pays candidats à la Can 2019. En attendant, on en est à s’interroger sur les atouts qu’auront à défendre le ministre des sports et de l’éducation physique (Minsep) et les responsables du Comité de normalisation de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) qui ne cessent de multiplier des séances de travail à ce sujet. Quels arguments le Cameroun pourra-t-il défendre face aux émissaires de la Caf afin que l’organisation de cette fête du football africain lui soit (finalement) confiée ? On le sait, pour être éligible, le Cameroun doit remplir les exigences de la Caf formulées dans le cahier de charge : quatre grands stades avec des gazons naturels, huit terrains d’entraînement, des infrastructures hôtelières et hospitalières, les télécommunications, les moyens de transports...
C’est pourquoi dans une correspondance datée du 23 novembre 2013, ayant pour objet: « présentation du dossier d’infrastructures sportives proposées par le Cameroun pour abriter le tournoi final de la Can 2019 », Adoum Garoua avait écrit au président du Comité de normalisation de la Fécafoot: « j’ai l’honneur de vous faire connaître que le gouvernement camerounais a pris l’engagement de mettre à la disposition de la Caf conformément à ses exigences, les infrastructures sportives ci-après : «deux stades et cinq aires d’entraînement engazonnées à Yaoundé ; un stade et cinq aires d’entraînement engazonnées à Douala, Bafoussam, Garoua et Limbe. Par ailleurs, ajoutait-il, « il importe de préciser que les stades de Bafoussam et de Limbe, d’une capacité de 20 000 places chacun, sont d’ores et déjà en construction. S’agissant des villes de Douala et Yaoundé, la construction de deux stades aux capacités de 50 000 et 60 000 places devant abriter les cérémonies d’ouverture et de clôture, stades dont les études sont avancées, est envisagée. Il en est de même du réaménagement des stades existants à Yaoundé et à Garoua aux normes prescrites par la Caf.
Réseau routier
Et le patron des sports d’ajouter que le gouvernement camerounais s’engage également à compléter le dossier de candidature dans les meilleurs délais, en y versant notamment les plans d’aménagement des stades existant, des aires d’entraînement nécessaires pour chaque ville retenue, des parkings et un plan détaillé du réseau routier desservant les différentes infrastructures sportives ; le plan de la ville de Limbe en cours d’élaboration. A cela vient se greffer la nomenclature des infrastructures hospitalières et hôtelières de référence existantes, ainsi que leurs plans de développement ; le plan de développement des voies routières, ferroviaires et aériennes.
Un mois avant, le président du Comité de normalisation dans une correspondance adressée au secrétaire général de la Caf le 23 novembre 2013, indiquait qu’outre l’engagement du gouvernement camerounais concernant l’organisation de la Can 2019 et la mise à disposition des stades et aires d’entraînement, la Fécafoot s’engage à régler le problème des visas d’entrée et de sortie, la douane, la sécurité, le transfert bancaire et devises, les permis de travail, les contrats, les assurances, le transport et parking, les salles de travail de la Caf , la couverture médicale, la situations des hôtels, une carte géographique avec la mention des lieux prévus pour les matches avec indication des distances, etc. Aux dernières nouvelles, un Comité d’organisation devrait être crée à court ou moyen terme au Cameroun, afin qu’il penche sa réflexion sur certains grands axes à l’instar de la structure organisationnelle ; l’administration et la planification de l’événement ; la promotion et la commercialisation de l’événement ; les infrastructures de la Can et surtout une commission, chargée sur le plan technique, de faire triompher l’équipe féminine des Lions indomptables qui dispute la Can 2016 à domicile.
Serpent de mer
C’est à croire que le dossier du Cameroun est en béton armé et qu’il pourrait convaincre les émissaires de la Caf qui viennent de boucler leur mission en Côte d’Ivoire. Toutefois, on est à se demander si ces bonnes intentions pourront se matérialiser par des actes concrets sur le terrain. Car, le projet d’infrastructures au Cameroun s’apparente à un serpent de mer. Le stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé dont on annonce la rénovation complète a été construit en 1979 et présente une capacité de 38 509 places assises. La relique accueille depuis plus d’un demi-siècle, les matchs de l’équipe nationale de football du Cameroun ainsi que les matchs de certains clubs des championnats d’élite.
Il accueillit en 1988 le jubilé Roger Milla. Ahmadou Ahidjo en lançant ce vaste projet de construction de quatre stades omnisports, entendait pallier le déficit du Cameroun en infrastructures sportives en dotant à terme tous les chefs-lieux de provinces et villes du Cameroun d’infrastructures sportives adaptées à la pratique du sport en général et du sport d’élite en particulier, permettre au pays dont on vante le talent de ses fils, d’accueillir à court terme, des événements sportifs de haut niveau. Mais le régime Biya et son tristement célèbre « Grandes ambitions » a posé un tacle irrégulier à cet ambitieux projet, choisissant de privilégier la stagnation.
Structures vieillissantes
La suite on la connaît. Les clichés de la vétusté visibles au stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé (qui ne répondent plus actuellement aux normes internationales) sont là pour s’en convaincre. Même pour les non initiés de l’architecture, un tour dans la cuvette de Mfandena permet de réaliser que de grands travaux doivent être entrepris pour viabiliser ces structures vieillissantes. Le site du futur grand stade Paul Biya d’Olembé lui, s’étend sur 100 ha. Il est prévu pour compter 60.000 places. Etaient également prévus sur le même site, la construction d'un Centre de sports nautiques et d'un hôtel trois étoiles d'une capacité de 200 lits. Le coût total des investissements de cette première phase s'élèvait à 94,6 milliards de Fcfa contre 170,8 milliards pour la seconde étape.
Hélas ! Les travaux n’ont jamais débuté, sept ans après l’annonce de leur lancement. La Cameroon Development Corporation (Cdc) et les populations qui occupaient les lieux, ont été délogés. Mais, elles n’ont pas encore reçu d’indemnisations. Or, plus de 300 millions Fcfa devaient être redistribués aux déguerpis. Sans suite. En 2009, lorsque le site a été déblayé par la Mission d’aménagement et d’équipement des terrains urbain et ruraux (Maetur), c’était parce que, a priori, la première phase du Pndis devait s’achever en 2011 ; mais le Pndis, comme on le clame ici, est mort. Et le site est resté vierge. Aucun bulldozer n’est repassé par là.
Ambitions
Pourtant, c’est depuis plus de dix ans que le gouvernement camerounais en partenariat avec la République populaire de Chine, grâce à Exim Bank of china, a lancé un ambitieux programme de développement des infrastructures sportives labélisé Programme national de développement des infrastructures sportives (Pndis). Lequel avait pour ambitions de doter le Cameroun d’infrastructures sportives de qualité à la pratique du sport. Résultat consternant. Après les Chinois, les investisseurs américains à travers la multinationale Aecom Government Services sont rentrés dans la danse en 2011 au point de signer avec le gouvernement camerounais un protocole d’accord relatif au financement et à la construction d’infrastructures sportives. Mais c’était sans compter sur l’inertie et le népotisme des dirigeants camerounais qui juraient pourtant de doter le pays d’équipements de pointe avec la construction d’infrastructures de grande qualité.