Au cours d’une conférence-débat le 28 août, les intellectuels étaient divisés sur la nature des assaillants.
L’intervention de l’homme politique Anicet Ekané jeudi 28 août 2014, au cours d’une conférence-débat sur Boko Haram mérite d’être relevée. En substance, il demande aux journalistes de ne jamais parler de Boko Haram, puisqu’il n’en existe pas au Cameroun. Il soutient mordicus que ce qui se passe dans l’Extrême-Nord, n’est ni plus ni moins qu’une insurrection armée.
Qui a organisé cette insurrection ? A quelle fin ? L’homme politique n’a pas souhaité aller plus loin pour expliquer sa pensée. L’idée de l’insurrection, Denis Kwebo, journaliste au quotidien Le Jour, Owona Nguini, socio politiste, la partagent. Même si Owona Nguini nuance son discours en indiquant qu’il ne s’agit pas d’un complot, comme cela semble être répandu dans l’opinion. Le socio-politiste estime qu’il ne faudrait pas penser qu’une partie du Cameroun cherche à se lever contre une autre.
Denis Kwebo abonde dans cette logique et explique que cette insurrection peut être composée des Camerounais de tous bords. Il prend un exemple au Nigeria pour étayer sa pensée selon laquelle, une rébellion est souvent hétérogène. Njoya Moussa est donc le seul des panélistes à soutenir l’idée selon laquelle, c’est bien Boko Haram qui mène des exactions dans le Nord-Cameroun.
«Il s’agit in fine d’un débat qui n’a pas permis d’avancer. Du moins, d’avoir une idée claire sur ce qui se passe dans cette partie du Cameroun. Les avis sont tellement tranchés. Mais le risque dans ces prises de position en temps de guerre est bien la crainte de stigmatiser une partie des Camerounais, partagés entre les coups de feu des assaillants et les critiques», explique un observateur présent à cette rencontre connue sous le nom de «Grande palabre».
Mais au-delà, cette conférence permet de comprendre comment ce sujet de Boko Haram est non seulement sensible, mais aussi difficile à cerner. Dans tous les cas, Bosco Talla, le coordonnateur de la Grande Palabre a avoué qu’il a eu à contacter douze personnes, dont seules deux ont accepté de participer à ce débat. Normal, ce qui se passe dans l’Extrême-Nord échappe malheureusement à la compréhension de plusieurs de nos compatriotes.
Par contre, le mérite de ce débat est qu’Owona Nguini par exemple ait fait une intéressante lecture politico-stratégique de la menace de cette secte. Il fait d’abord un rappel historique de l’insécurité dans le Grand-Nord en précisant que depuis une trentaine d’années, cette partie du Cameroun fait face aux bandits de coupeurs de route, avant d’être combattus des années plus tard. Pour ce qui est de Boko Haram, il pense qu’il est une véritable menace socio anthropologique et politique, du fait de la structuration complexe du Cameroun. Une telle situation pense-t-il, peut affecter le consensus national, déjà fragile.